3.2.2.1 L'article 223 B du CGI : un cadre incontournable
?
Dans cette optique, l'article en question dispose :
« lorsqu'une société a acheté,
(...), les titres d'une société qui devient membre du même
groupe aux personnes qui la contrôlent, directement ou indirectement, ou
à des sociétés que ces personnes contrôlent,
directement ou indirectement, au sens de l'article 23 3-3 du code de commerce,
les charges financières déduites par les sociétés
membres du groupe sont rapportées au résultat d'ensemble pour une
fraction égale au rapport du prix d'acquisition de ces titres à
la somme du montant moyen des dettes, de chaque exercice, des entreprises
membres du groupe. Le prix d'acquisition à retenir est réduit du
montant des fonds apportés à la société
cessionnaire lors d'une augmentation du capital réalisée
simultanément à l'acquisition des titres (...).La
152 La communauté du LBO face à ses
responsabilités, in Capital Finance, 4 Juin 2007
réintégration s'applique pendant l'exercice
d'acquisition des titres et les huit 153 exercices suivants (...)
»
L'article précise également que ces dispositions ne
s'appliquent pas :
« a. Si la cession est opérée entre
sociétés membres du même groupe ;
b. Au titre des exercices au cours desquels la
société rachetée n'est plus membre du groupe sous
réserve que sa sortie du groupe ne résulte pas d'une fusion avec
une autre société du groupe ;
c. Si les titres cédés à la
société membre du groupe ont été acquis
immédiatement auparavant, auprès de personnes autres que celles
mentionnées au septième alinéa, et en vue de
rétrocession ;
d. au titre des exercices au cours desquels la
société n'est plus contrôlée par les personnes
visées à la première phrase du septième
alinéa.»
Par conséquent, le but est donc de limiter les montages
visant à se racheter une entreprise à soi- même, ceci pour
deux raisons :
- cela ne correspondait pas, selon les mots mêmes de Michel
Charasse à une utilisation rationnelle des fonds des entreprises
- cela revenait à faire supporter par la
collectivité une partie du coût d'un montage à visée
avant tout patrimoniale154.
Ce qui doit se traduire par une réintégration dans
le résultat imposable à l'IS des charges financières
liées au rachat, même indirect, de ses propres titres.
En conséquence, l'opération d'acquisition de ses
propres titres deviendra logiquement beaucoup plus onéreuse, du seul
fait de l'absence de levier fiscal.
En effet, les charges financière déductibles
seront rapportées au résultat d'ensemble du groupe dans une
proportion égale au ratio entre le prix d'acquisition des titres et le
montant moyen des dettes du groupe au cours de l'exercice.
La formule à appliquer est donc :
153 Loi de finance rectificative pour 2006
154 Denis Andres - Cabinet Arsène - Amendement Charasse :
Esprit es-tu toujours-là ?
Charges fi déductibles / Résultat d'ensemble = Prix
des titres en N / Montant des dettes de l'exercice, d'où
Charges fi déductibles = (Prix des titres x
Résultat d'ensemble) / Montant des dettes
La réintégration au sein du résultat
imposable prend effet dès la première année et se poursuit
pendant les 8 exercices suivants (depuis 2007, auparavant le durée de
réintégration était de 15 ans au total)155.
Ceci peut donc se traduire par une réintégration
plus que proportionnelle aux seuls intérêts de la dette
d'acquisition. Par ailleurs, dans le mesure où le texte prévoit
une réintégration pendant huit ans, cela risque de se traduire
par un montant total à réintégrer nettement plus
élevé que les seuls intérêts liés à la
dette d'acquisition.
De plus, selon Denis Andres (Cabinet Arsène), la
sanction est particulièrement sévère au regard de la
diminution de la durée moyenne des emprunts, faisant de ce dispositif
anti abus une « arme lourde ». Il s'est donc
révélé être une parade efficace à certains
montages, comme le souligne G. de Blignières : «L'amendement
Charasse a été mis en place pour éviter des schémas
permettant la déduction de charges financières artificielles et
des opérations dont la motivation est de nature exclusivement fiscale,
faisant en sorte que la base imposable décroisse sans arrêt.
J'estime que l'amendement Charasse est sain, il évite les
abus156 ».
La notion centrale reste, dans le cadre de cet amendement la
notion de contrôle. Jusqu'à présent, son
appréciation était laissée à d'administration
fiscale. Désormais, au regard de l'article 40 de la loi de finance
rectificative pour 2005, la notion de contrôle au sens de l'article 223 B
du CGI se trouve alignée sur celle du Code de commerce en son article
233-3. Ainsi, le contrôle en question passe de 33% à 40% 157.
155 Arnaud Mourier - La sécurité fiscale de
l'amendement Charasse
156 « L'intégration fiscale, avantages, limites et
inconvénients » Revue PME - n°22 été 2005
157 Woog Sari Freville Avocats - Fusions Acquisitions / Capital
Investissement : réforme de "l'amendement Charasse", suppression de
l'amendement rampant
En effet, une personne est présumée par la loi
exercer le contrôle si elle dispose d'une fraction des droits de vote
supérieure à 40 %, alors qu'aucun autre associé ou
actionnaire ne détient une fraction supérieure158. Le
contrôle peut par ailleurs être retenu si l'administration est en
mesure de prouver que plusieurs des actionnaires agissent de concert.
En revanche, dans le cas de participation minoritaire par
plusieurs membres d'une même famille, le contrôle sera
apprécié au regard du groupe familial, et non des individus.
L'application de l'amendement Charasse est donc
déterminée par le contrôle à plus de 40% de la cible
et de la holding par le même actionnaire ou par des actionnaires dont il
est prouvé qu'ils agissent de concert. La doctrine administrative
précise159 que "lorsque la société cessionnaire
acquiert les titres auprès de plusieurs vendeurs, la notion de
contrôle s'apprécie en faisant masse de l'ensemble des
contrôles exercés par chacun des vendeurs". On a dans ce cas une
présomption de contrôle conjoint.
Dans le cas d'un LBO, ou plus précisément pour
ce qui est des OBO, l'acquisition portera presque systématiquement sur
l'ensemble des titres, où du moins sur des titres représentant
plus de 40 % du capital.
Par conséquent, si la définition du contrôle
de la holding obéira réellement au seuil en question, en ce qui
est du contrôle de la cible, il sera présumé dans tout
montage à effet de levier.
Un risque similaire pèse si les actionnaires initiaux,
présumés contrôler conjointement la cible,
détiennent aussi une proportion du capital de la holding
supérieure à 40%.
On retient de toute façon que le montant des
intérêts financiers à réintégrer dans le
cadre de l'intégration fiscale n'est déterminé ni par la
structure du financement, ni par le poids des anciens actionnaires de la cible.
A ce titre, dès lors que le contrôle est avéré, et
l'option pour l'intégration fiscale retenue, on devra bien
procéder à la réintégration prévue.
La réintégration prévue prend fin
dès lors que le contrôle par les actionnaires visés n'a
plus lieu. A l'inverse, en cas de reprise de contrôle des actionnaires
originaux, même après une première
158 CMS Bureau Francis Lefebvre - L'amendement Charasse sous
contrôle - Option Finance - 30 avril 2007
159 Trib Adm de Lille - 1er dec 2005 - n°03-4190,
SAS FTR
acquisition par des personnes extérieures à la
structure initiale, l'application de l'amendement reprend de fait.
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