2.2.2.3 Redessiner l'architecture de la cible.
Dans la perspective d'un LBO ou d'un OBO, redessiner le contour
de la cible peut s'avérer profitable.
Cela consiste principalement à donner une architecture
juridique à la cible qui corresponde à ses activités. Le
but est alors d'établir une congruence entre activités
d'exploitation et structures juridiques. En effet, cela permet de valoriser au
mieux les différentes branches, voire d'adopter des solutions
différentes pour chacune d'entre elles.
En effet, on peut avoir intérêt à se
recentrer sur son coeur de métier ou à réduire la voilure
générale du montage en allégeant son
périmètre.
Cela correspond d'ailleurs à un fort mouvement actuel,
de grands groupes cédant certaines de leurs filiales ou filialisant
certaines de leurs branches d'activité afin de renforcer leur
cohérence. Ceci conduit d'ailleurs à la mise en place de nombreux
LBO de reprise103.
Dans cette perspective, un montage préalable va
consister à filialiser les différentes activités jusque
là réunies au sein de la cible. La société initiale
apporte des actifs correspondant à une branche à une
société nouvelle dont elle détient 100% des titres.
Un commissaire aux apports doit procéder à
l'évaluation des apports en question.
In fine, nous obtenons une société
initiale qui devient une holding de fait, et des filiales à 100%.
Concernant la holding, cette modification de fonds doit être
approuvée par une Assemblée Générale
Extraordinaire.
Le résultat est la constitution d'un groupe à
partir d'une seule entreprise initiale.
En revanche, d'un point de vue fiscal, cette restructuration
juridique risque d'avoir un coût, puisqu'une plus-value sera probablement
constatée au sein de la holding.
103 Marie-Jeanne Pasquette - Pariez sur les ventes à la
découpe - La vie financière - 18 mai 2007
Situation initiale Situation après
montage
2.2.3 La structuration juridique du financement.
Fondamentalement, les LBO ont pu se développer grâce
à l'évolution conjointe des ingénieries financière
et juridique.
En effet, sans elles, la mise en place de structures
complexes, notamment en terme de financement, serait impossible, et partant de
là, les LBO tout comme les OBO n'auraient pu connaître leur
développement actuel.
L'ensemble de la dette d'acquisition est levé par un
holding qui se doit d'être pur, afin de servir de réceptacle
à l'ensemble du financement. Ce dernier est construit sur une
idée simple, le niveau de rémunération et le degré
de subordination sont intrinsèquement liés. Le principe
fondamental est que tout prêteur junior ou mezzaneur ne peut être
remboursé de son principal qu'après le remboursement
intégral de l'ensemble des dettes senior.
Il en va de même de toute garantie consentie à l'un
des prêteurs juniors. Elle ne pourra être exercée que
lorsque l'ensemble des dettes seniors aura été payé.
Il convient donc de donner un cadre juridique à la
subordination en question104.
Différentes techniques utilisant des engagements
contractuels passés par les établissements consentant les dettes
d'acquisition ont été développées.
La première solution est la mise en place de
créances de dernier rang, c'est-à-dire que son titulaire consent
à ce qu'elles soient remboursées après toutes les autres
créances chirographaires, antérieures ou postérieures.
D'un point de vue juridique, cela se traduit par une stipulation
pour autrui, le bénéficiaire étant le banquier senior, le
promettant le mezzaneur et le stipulant la holding
d'acquisition105.
C'est une mesure simple qui présente l'avantage
d'être opposable au tiers.
La cession d'antériorité organise quant à
elle la subordination à travers une convention passée entre le
prêteur senior et le prêteur junior, ce dernier s'engageant
à ne recevoir aucun remboursement aussi longtemps que la dette senior
n'aura pas été totalement éteinte.
Néanmoins, la convention n'étant pas passée
directement avec la holding, elle se révèle moins efficace que la
précédente.
Enfin, les différentes conventions organisant la
subordination entre prêteurs comprennent en général une
clause limitant l'exercice de certains de leurs droits par les prêteurs
juniors. Ces clauses, souvent qualifiées de claw-back106,
prévoient que le mezzaneur ne pourra agir en cas de manquement de la
holding à ses obligations qu'avec l'accord du prêteur senior.
Ainsi, il ne peut déclarer exigible ses créances ni
déclencher une procédure de redressement judiciaire à
l'encontre de la holding sans l'accord des banquiers seniors.
Cette clause semble juridiquement potestative, dans la mesure
où il confère par avance un droit discrétionnaire à
l'une des parties, en l'occurrence les banquiers seniors.
104 Les dettes de LBO - LexInter
105 Ernst & Young Société d'avocats -
Levée de fonds, à quoi faut-il s'attendre ?
106 Franck Moulins - La crise du venture a sensiblement
modifié les pratiques des LP's - Capital Finance - 24 janvier 2005
Néanmoins, à ce jour, aucune jurisprudence n'existe
sur la validité de ces conventions en cas de défaillance de la
holding de reprise.
La question principale qui se pose ici est la validité des
engagements conventionnels modifiant le rang de créanciers, alors que
les textes en la matière sont d'ordre public.
Dans le cas d'une procédure collective, il est possible
d'imaginer que les paiements soient effectués de manière
identique que les prêteurs soient seniors ou juniors.
Dans ce cas, aussi longtemps que les conventions entre banquiers
seniors et mezzaneurs sont valides, les remboursements reçus par ces
derniers devront être rétrocédés aux prêteurs
seniors.
En l'occurrence, l'ingénierie juridique sert
véritablement de support à l'ingénierie
financière, l'optimisation d'un montage d'OBO passant tout d'abord
par la structuration du financement et ensuite par la mise en place de
conventions établissant des relations juridiques entre
créanciers107.
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