2 L'ingénierie financière et juridique au
service d'un
projet global.
2.1 Le montage de l'OBO : une véritable
architecture
financière.
Comme nous l'avons déjà indiqué, l'OBO
reprend la trame générale du LBO, en particulier la structuration
de celui-ci autour d'un levier financier.
Aussi développerons-nous l'architecture
financière qui sera mise en place dans le cadre d'un OBO, pour terminer
par les possibilités d'optimisation financière qu'offre ce
montage pour la cible elle-même.
2.1.1 Les principes de base de l'optimisation du levier
financier.
La première condition pour mettre en place un levier
financier reposant sur sa propre entreprise est bien évidemment que
cette dernière réponde à un certain nombre de
critères. En résumé, qu'elle approche au mieux ce que l'on
pourrait appeler la cible idéale, puisqu'en l'espèce, la
société cible est donnée dès le départ.
On peut résumer l'ensemble des conditions à
travers l'idée que l'entreprise doit être financièrement et
économiquement saine et qu'elle doit disposer de perspectives de
croissance réelles.
En effet, cela conditionne la réalisation de
plus-values potentielles lors de la sortie finale et donc l'attrait pour les
investisseurs qui prendront part à l'OBO. Par ailleurs, si elle
connaît une croissance extrêmement forte, un risque de conflit
entre investissements industriels et remboursement de la dette d'acquisition
est probable. Idéalement l'entreprise sera à maturité, sur
un marché en croissance.
Sa rentabilité doit être élevée, et
surtout constante. En effet, le montage suppose une visibilité
financière sur 5 ans en général. On attend donc de
l'entreprise qu'elle génère des cash-flows prévisibles, et
suffisants pour faire face à la dette d'acquisition pendant toute la
durée de l'opération.
De plus, sa structure financière importe autant que ses
résultats financiers annuels. Ainsi, ses dettes d'exploitation ainsi que
ses dettes à long terme doivent être limitées, le montage
visant à générer un fort endettement. Si celui-ci existe
déjà, cela reviendrait à endetter une entreprise
surendettée, ce qui serait excessivement risqué.
A l'inverse, une trésorerie excédentaire est
souhaitable, celle-ci permettant ainsi de faire face au besoin courant de
l'entreprise sans mettre en péril le bon déroulement de
l'opération d'OBO.
Afin de bénéficier des concours financiers
nécessaires au montage, la présence d'actifs corporels
substantiels mais surtout réalisables sera très utile. Sans
servir de garantie juridique directe, ils contribuent à réduire
fortement le risque du montage.
Pour finir, si le bilan présente des réserves
distribuables élevées, ce sera une source intéressante de
financement supplémentaire pour le montage de reprise.
Ensuite, la valorisation de la cible représente un
aspect important du montage de l'OBO. En effet, ce montant doit faire l'objet
d'un accord de toutes les parties (minoritaires potentiels, fonds
d'investissement, cadres repreneurs).
Le dirigeant étant à la fois l'actionnaire de la
cible et le repreneur de celle-ci, la valorisation de la cible doit lui
permettre de toucher une somme élevée, tout en ne
générant pas une dette excessive pour la suite.
Par ailleurs, surtout si des aspects successoraux entrent en
jeu, cette valorisation doit pouvoir satisfaire aux critères de
l'administration fiscale, qui croise des évaluations selon la
méthode des multiples et une valorisation fondée sur l'actif net
réévalué.
Enfin, le montage doit faire peser sur la holding de reprise,
et donc in fine sur la cible, une dette à laquelle cette dernière
puisse faire face. C'est en effet là l'enjeu principal des montages
d'acquisition par effet de levier financier, c'est-à-dire par
endettement.
Si la rentabilité économique de la cible doit
être supérieure au coût du financement d'acquisition (taux
d'intérêt), pour qu'existe un effet de levier, le respect d'un
certain nombre d'autres ratios est indispensable.
Ceux-ci n'ont certes pas de valeur absolue, mais empiriquement,
on sait qu'ils ont un pouvoir déterminant sur l'issue d'un LBO ou d'un
OBO72.
On les qualifie à ce titre souvent de ratios prudentiels,
les partenaires financiers, et en particuliers les banquiers senior leur
accordant une importance considérable73.
Les fonds propres doivent ainsi représenter au moins un
tiers du montant total de l'opération. Dans le cas d'un OBO, l'apport
des titres de la cible à la holding représente souvent
près de 50% des actions détenues par le dirigeant, ceci afin de
ne pas faire peser sur l'opération une tension excessive.
La dette nette ne doit pas excéder cinq fois le
résultat d'exploitation (Ebit), ceci afin d'en rendre le remboursement
possible, sans compter exclusivement sur des plus-values de sortie. C'est
encore plus vrai si le dirigeant mettant en place un OBO ne compte pas
céder son entreprise à la fin du processus. Il devra donc pouvoir
rembourser la dette de l'OBO grâce aux résultats courants de sa
société.
La dette senior quant à elle ne doit théoriquement
pas dépasser trois à quatre fois l'Ebit.
Ce postulat est le corollaire direct du ratio
établissant que les frais financiers ne doivent pas excéder 50%
de l'Ebit. Le risque de dépôt de bilan est multiplié par
près de 10, si ce ratio est dépassé, d'après les
observations empiriques récentes.
Par ailleurs, le gearing mesurant le rapport entre les dettes
totales et les fonds propres ne doit pas dépasser trois. Dans le cas
contraire l'entreprise est clairement sous capitalisée.
Enfin, le montage se fondant sur la remontée des
résultats de la cible vers la holding via les dividendes pour faire face
à la dette d'acquisition, le montant de ceux-ci est crucial.
Le POR (Pay-Out-Ratio), qui mesure le rapport entre les
dividendes et le résultat net de la cible, doit rester en
deçà de 75 à 80%. En effet, dans le cas contraire, les
résultats de la cible seront captés en vue du remboursement
exclusif de la dette d'acquisition, ce qui risque d'étouffer la
société cible, et d'en interdire le développement, qui
conditionne pourtant la réussite de l'opération.
72 Banque de France - Le système bancaire
français face au risque Private Equity / LBO
73 AFIC - LBO : Guide pratique
L'idée centrale reste donc de mettre en place une
architecture équilibrée de montage en maximisant l'effet de
levier financier, tout en trouvant un équilibre permettant de faire face
à la dette d'acquisition ainsi qu'au service de celle-ci.
L'équilibre concerne tout autant la répartition des
résultats entre cible et holding, ou entre montage financier et
développement industriel.
Le propre de l'OBO étant de mettre de part et d'autre
le même dirigeant actionnaire, la survalorisation de la cible
couplée à une faiblesse de fonds propres de la holding mettant en
risque l'ensemble du montage, elle doit donc plus facilement pouvoir être
évitée.
En effet, le but d'un OBO étant d'assurer la
pérennité de l'entreprise, le dirigeant sera amené
à rechercher un montage aussi équilibré que possible,
apportant en cela une réponse à la difficulté
habituellement rencontrée par les montages de LBO.
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