1 L'Obo, un Lbo réconciliant des logiques
contradictoires
1.1 Des logiques particulières propres à
chaque entreprise.
Afin de comprendre au mieux ce qui conduit une entreprise et
plus précisément son dirigeant actionnaire à envisager un
montage d'OBO, un examen des situations en présence semble
nécessaire.
Nous l'avons souligné en introduction, l'OBO est un
mécanisme qui permet de réunir des logiques discordantes,
qu'elles soient financières, patrimoniales ou industrielles. Cela nous
conduit donc à nous pencher sur un certain nombre de cas où cette
solution apparaîtra comme très indiquée au regard de la
perspective retenue28.
Nous chercherons donc, avant de nous pencher sur les aspects
techniques de l'OBO et ses différents moyens d'optimisation, à
illustrer la diversité des situations auxquelles un OBO est à
même de répondre.
Ceci nous permettra de voir qu'un type de montage unique
permet de faire face à une multitude de situations économiques
couramment rencontrées par les PME françaises ou
étrangères et par leurs actionnaires.
En même temps, nous commencerons à avoir un
aperçu de l'architecture financière et juridique de l'OBO, dont
la suite de cette thèse détaillera les différentes
étapes ainsi que les alternatives permettant d'en optimiser le
fonctionnement et les bénéfices.
1.1.1 Remplacer un dividende par un capital.
Un entrepreneur d'une soixantaine d'année désire
prendre sa retraite et passer les commandes de sa société
à son fils.
La société en question, que nous nommerons A est
mûre, dégage des bénéfices de manière
récurrente, et constitue de ce point de vue la cible idéale pour
un montage financier.
28 Georges-Edouard Buet - L'OBO : un outil de gestion
du patrimoine professionnel efficace - Option Finance n°900 - 2 octobre
2006
Le fils de l'actionnaire dirigeant y travaille quant à
lui depuis plusieurs années, et, à la différence de
nombreux cas d'entreprises familiales, est pleinement en mesure d'assurer la
succession de son père29.
Néanmoins, la difficulté réside ici dans
le dilemme suivant : soit l'entrepreneur fait le choix d'une cession classique,
à un industriel ou à un fonds, via un LBO, soit il
privilégie la transmission à son fils.
Or, comme de très nombreux dirigeants de PME
détenant la majorité du capital de leur entreprise, ceux-ci ne
disposent pas de patrimoine annexe substantiel, et tirent la majorité de
leurs revenus de l'entreprise (salaires et dividendes). Par ailleurs, on sait
bien que dans nombre de cas, le train de vie de la famille du dirigeant est
assuré par l'entreprise (épouse salariée, véhicule
de fonction, notes de frais, voire personnel de maison salarié par
l'entreprise...). La question est alors fondamentalement de savoir comment se
constituer un patrimoine et maintenir son train de vie tout en transmettant son
entreprise.
De nombreux aménagements fiscaux, au premier rang
desquels la loi Dutreil de 2005 facilitent la transmission des titres d'une
société, en en allégeant la fiscalité. Les
conditions de détention des titres pendant 5 ans, ainsi que celle
concernant les fonctions de direction occupées seraient ici
réunies sans difficultés. Si l'on considère que les
dividendes doivent continuer à être distribués à
l'entrepreneur, on peut faire le choix d'un démembrement des titres, la
nue-propriété étant transférée au fils,
l'usufruit restant la propriété du père, qui recevra donc
les dividendes.
Pour autant, cela suppose que l'entreprise verse de
manière constante les dividendes attendus par le père, ce qui se
traduit parfois en pratique par une sorte de tutelle exercée par
l'ancienne génération sur la nouvelle. Par ailleurs, cela ne
permet pas de sécuriser le patrimoine que constituent les titres de la
société.
Si l'on considère au contraire qu'il est
préférable que l'entrepreneur dispose à sa retraite
d'un capital sécurisé dont le placement lui assurera un revenu
important, un OBO semble tout indiqué. Il permettra en même
temps au fils de l'entrepreneur de conserver le contrôle de l'entreprise
et
29 Anne-Laurence Fitere - Entreprise familiale : Ces
héritiers qui réussissent - Enjeux Les Echos - 1er
juin 2007
d'avoir les coudées franches pour son
développement. On est donc face à une solution optimale de
transition tant pour les individus que pour la société.
Concrètement le montage sera le suivant. L'entrepreneur
commence par créer une holding à laquelle il apporte une partie
des titres de la société A. La holding rachète alors les
titres restant de A à l'entrepreneur. Cela génère une
dette d'acquisition qui sera remboursée grâce aux cash flows
dégagé par la société A.
L'entrepreneur transmet alors la holding à son fils qui
contrôle ainsi la cible à 100%.
Une fois réalisé, ce montage assure
l'indépendance totale du père comme du fils.
Si l'on se place maintenant du point de vue des parties
prenantes (stake holders en anglais), que sont les partenaires financiers, les
clients, fournisseurs... un tel montage est de nature à assurer la
pérennité de la société A. Qui plus est, la
succession en interne prévient fortement les risques liés au
changement de direction. Enfin, il est évident que le passage des
rênes à une nouvelle génération est de nature
à redynamiser l'entreprise et à lui permettre d'effectuer les
changements qu'un dirigeant proche de la retraite serait réticent
à mettre en oeuvre. Bien que l'espérance de vie progresse
fortement (trois mois chaque années depuis 50 ans, voire 10 mois sur les
2 dernières années30), l'âge du dirigeant peut
se révéler à terme un handicap pour l'entreprise.
L'exemple de Jean Mantelet, patron historique de Moulinex a montré le
tort qu'une telle démarche peut causer à une
entreprise31.
Les conséquences d'un tel montage, s'il est un
succès, sont donc positives pour l'entrepreneur, pour son
héritier, pour l'entreprise elle-même et pour ses partenaires, et
donc finalement pour l'ensemble de l'économie.
30 AP - L'espérance de vie dépasse les
80 ans en France - 24 mars 2005
31 Valérie Segond - Comment les PDG
français verrouillent leur siège - La Tribune - 19 mai 2005
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