La coopération judiciaire pénale dans la zone CEMAC( Télécharger le fichier original )par Théophile NGAPA Université de Dschang - Cameroun - DEA en Droit Communautaire et Comparé Cemac 2005 |
Paragraphe I : Les difficultés d'ordre juridiqueSur le plan juridique, plusieurs critiques sont le plus souvent avancées à la pratique de l'entraide. En analysant de près les dispositions du législateur CEMAC sur la question, on s'aperçoit que le législateur CEMAC essaye tant bien que mal de les contourner. Les difficultés juridiques les plus courantes sont la protection du secret bancaire (A) et les lenteurs de la procédure d'entraide (B). A- La protection du secret bancaireLe secret bancaire peut être défini comme « l'obligation de confidentialité à laquelle sont tenus les établissements de crédit par rapport aux actes, faits et informations concernant leurs clients, et dont ils ont connaissance dans l'exercice de leur profession157(*) ». Il a donc pour but d'assurer la discrétion des transactions financières. Il met à la charge du banquier une obligation de confidentialité dont la violation est susceptible d'engager sa responsabilité civile. Cette institution qu'est le secret bancaire bénéficie dans certains Etats d'une réglementation tellement rigide qu'elle empêche toute possibilité de levée. Ceci a été pendant longtemps le cas de la Suisse158(*) et de nombreux autres « paradis fiscaux ». Mais, il apparaît que le lien est souvent vite fait entre une opération de blanchiment et la protection du secret bancaire. En fait, les criminels pour injecter les produits de leurs crimes dans des circuits légaux ont le plus souvent recours aux établissements financiers, notamment dans les pays qui sont réfractaires à toute levée du secret bancaire. Le banquier sera d'autant plus crédible s'il peut demeurer le plus silencieux possible159(*). Mais il s'avère que le secret bancaire se pose le plus souvent en véritable obstacle à la pratique de l'entraide judiciaire. En effet, l`autorité judiciaire qui poursuit le blanchiment aura le plus souvent besoin des relevés bancaires pour apporter la preuve de cette infraction et celle de l'origine criminelle des fonds. C'est pourquoi la majorité de la doctrine préconise l'inopposabilité du secret bancaire aux autorités judiciaires pour un souci d'efficacité dans la répression de la criminalité. C'est pour tenir compte de cette situation que le législateur CEMAC a refusé que le secret bancaire soit opposé aux autorités judiciaires. L'article 57 du règlement CEMAC portant prévention et répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique centrale dispose que «l'entraide peut notamment inclure (...) les documents pertinents y compris de relevés bancaires, de pièces comptables, de registres montrant le fonctionnement d'une entreprise ou ses activités commerciales et financières ». Cette solution est corroborée sur le plan interne par le législateur camerounais. En effet, l'article 8(1) de la loi relative au secret bancaire160(*) dispose que « le secret bancaire ne peut être opposé à l'autorité judiciaire agissant dans le cadre d'une procédure pénale et aux officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire du Procureur de la République ». Cette avancée réalisée dans le cadre de la CEMAC en ce qui concerne la lutte contre la criminalité financière est fort appréciable. Le législateur donne ainsi aux autorités judiciaires des Etats membres des moyens juridiques pour aller au-delà de la protection du secret bancaire et s'échanger mutuellement les documents bancaires nécessaires pour établir la preuve de certaines infractions comme le blanchiment des capitaux. Une autre difficulté rencontrée dans la pratique de l'entraide répressive est la lenteur de la procédure. * 157 Article 3 de la loi camerounaise N° 2003/04 du 21 Avril 2003 relative au secret bancaire * 158 ZIEGLER (Jean), professeur de droit, à l'époque député suisse qui bataille contre le blanchiment d'argent sale et la corruption au niveau international remarquait de façon presque mélancolique que : « j'ai fait quarante-cinq voix au parlement sur deux cent en Septembre (1998) en demandant la suppression pure et simple du secret bancaire » * 159TCHABO SONTANG (Hervé Martial), mémoire précité, p. 6 * 160 Loi N° 2003/004 du 21 Avril 2003 précité |
|