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Le refus de la linéarité dans l'adaptation cinématographique de la Rue Cases-Nègre de Joseph Zobel

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par Théophile Muhire
Université Natinale du Rwanda - Licence en Lettres 2004
  

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1.5.2 Le personnage au cinéma

Parmi les objets qui peuplent le monde diégétique, le personnage occupe incontestablement une place prépondérante. Autour de lui et par rapport à lui s'organise le récit en même temps qu'il est généralement source et support d'une intense activité d'identification. Cela est probablement plus sensible encore au cinéma puisque, à la différence du roman où il n'existe que sous forme de traces typographiques -où il n'est, suivant l'expression de Philippe Hamon20(*) qu'un « être de papier »-, il est présent sous la forme de sa réalité analogique d'image et de sons. Il est un « être iconique » et par-là ressemble étrangement aux personnes de la vie réelle.

S'interrogeant sur le problème du personnage au cinéma, Iouri Lotman établit un parallélisme entre le comédien de théâtre et le personnage de roman pour mieux cerner la spécificité de l'acteur dans le film. Selon lui, « l'homme à l'écran s'apparente beaucoup plus à l'homme dans le roman et se distingue de l'homme à la scène »21(*). La possibilité de retenir l'attention sur des détails de l'apparence extérieure par un gros plan ou en faisant durer l'image sur l'écran existe intégralement dans le roman sous la forme de description détaillée tandis que sur scène elle est pratiquement impossible.

Un personnage de film se définit, pour Sidney Field22(*) à trois niveaux : professionnel (le point de départ de la caractérisation ), personnel (sa famille, ses amis), et intime. Il ajoute que le personnage étant le fondement du scénario, il faut le connaître avant de mettre un mot sur le papier.

1.5.3 Le personnage comme signe

Entre le personnage du scénario (voire du roman en cas d'adaptation) et celui du film effectivement réalisé, il aura donc fallu passer par le « casting » et choisir les divers interprètes. En ce sens, le personnage au cinéma décline une double identité : celle de l'acteur-interprète (comédien) et celle du personnage. En témoigne du reste l'usage fréquent et l'emploi souvent indifférencié de l'une ou de l'autre désignation. C'est donc là une différence majeure et évidente avec le récit écrit.

Cependant, ce que je vois sur l'écran, ce n'est pas l'acteur mais une image de lui. Sa réalité perceptible et sensible est faite d'images et de sons. Là se situe une autre différence avec le roman (avec le théâtre aussi mais pour des raisons exactement inverses puisque sur la scène les comédiens sont bien réels) où le personnage est fait de manière linguistique. Dans la perspective sémio-narratologique, cette différence de signifiant apparaît comme fondamentale dès lors qu'il s'agit de décrire le personnage comme un signe. Car c'est bien de cela qu'il s'agit, au moins à un premier niveau. En tant que signe, il appartient à un système, le système textuel, duquel il tire sa valeur. Il a ensuite une valeur, son sens, son signifié.

Le personnage sera donc analysé comme un signe saisi au sein du système textuel, avec sa face signifiante et sa valeur, à quoi il conviendra d'ajouter son fonctionnement narratif. Cela ne signifie pas que ce soit la seule manière « autorisée » d'analyser le personnage. D'autres approches, psychanalytiques, socio-historiques, rhétoriques, etc., sont tout aussi envisageables mais elles répondent à des pertinences autres que narratologiques.

* 20 Hamon, p, « Pour un statut sémiologique du personnage », in : Poétique du récit, Paris, Seuil, 1976

* 21 Lotman, I, esthétique et sémiotique du cinéma, Paris, Editions Sociales, 1977, p. 148

* 22URL : <http://mlvdj.free.fr/dia2b.htm>

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo