1.3.4 Elimination de la
nicotine
La nicotine étant une molécule basique, son
excrétion salivaire ou urinaire est fortement dépendante de
faibles variations du pH. Dans les urines, si le pH est supérieur
à 7, la nicotine est sous forme basique non ionisée, liposoluble
et est donc réabsorbée par le tubule rénal. A pH
inférieur à 7, elle est sous forme ionisée, non
liposoluble et son élimination urinaire est augmentée (46, 45).
Les fluctuations plasmatiques liées à la brièveté
de sa demi-vie et la variation de l'élimination urinaire en fonction du
pH, expliquent que la nicotine ne soit pas le marqueur de choix de
l'imprégnation tabagique.
1.3.5 Mode d'action de la
nicotine
La forme active de la nicotine est un cation dont la charge se
situe sur l'azote du cycle pyrrolidine. Cette forme active ressemble à
l'acétylcholine quant à l'espace séparant les charges
positives et négatives. L'acétylcholine est une molécule
flexible. Il existe deux types de récepteurs de l'acétylcholine:
les récepteurs nicotiniques sur lesquels la nicotine peut se fixer et
les récepteurs muscariniques qui peuvent être activés par
la muscarine. La nicotine et la muscarine sont donc des agonistes
spécifiques d'un seul type de récepteurs cholinergiques (un
agoniste est une molécule qui se fixe sur le récepteur et mime
l'effet du neurotransmetteur).
La nicotine a pour cible la neurotransmission
cholinergique. Elle se fixe à la place de l'acétylcholine sur les
récepteurs nicotiniques cholinergiques, des récepteurs canaux. La
liaison de l'agoniste sur le récepteur nicotinique provoque un
changement de conformation de l'architecture protéique du
récepteur, ce qui ouvre le canal ionique pendant quelques millisecondes.
Le canal est sélectif pour les cations (surtout le sodium), son
ouverture entraîne donc une brève dépolarisation. Puis le
canal se referme et le récepteur devient transitoirement
réfractaire aux agonistes : c'est l'état de
désensibilisation, qui est normalement suivi d'un retour à
l'état de repos, fermé et sensible aux agonistes. En cas
d'exposition continue à l'agoniste (même à faible dose),
cet état de désensibilisation est durable (inactivation à
long terme) (42,47). (Figure 5).
Conditions normales physiologiques: après ouverture
du canal sodique par liaison de l'acétylcholine, le récepteur
passe par un état désensibilisé avant de revenir au stade
de repos ou d'être renouvelé.
Conditions tabagiques: la nicotine remplace
l'acétylcholine et sur stimule le récepteur nicotinique. Puis le
récepteur est inactivé à long terme et son renouvellement
est saturé par la nicotine.
Figure 5 : Cycle de fonctionnement d'un
récepteur nicotinique:
1.3.5.1. Effets
centraux
La nicotine traverse facilement la barrière
hémato encéphalique et elle est absorbée par une simple
diffusion passive et un transport actif par le plexus chorode. Elle est alors
distribuée dans l'ensemble du cerveau avec des concentrations plus
élevées au niveau du thalamus, de l'hippocampe, de
l'hypothalamus, de l'aire tégumentaire ventrale, du cortex
préfrontal, du cortex du système visuel et du cervelet.
La fixation de la nicotine sur des récepteurs
nicotiniques s'accompagne d'une activation physiologique des diverses zones
cérébrales. La nicotine module la libération de nombreux
neurotransmetteurs et hormones tels que l'acétylcholine, la
vasopressine, l'ACTH et les monoamines (sérotonine, dopamine,
noradrénaline) qui interviennent dans les fonctions cognitives et dans
la régulation de l'humeur et des émotions. La plupart des effets
centraux de la nicotine sont les résultats d'une stimulation directe des
récepteurs nicotiniques cérébraux, stimulation qui
explique les propriétés psycho actives de la nicotine conduisant
au renforcement positif du comportement:
Ø activation des fonctions cognitives, de la
mémoire à court terme et de vigilance,
Ø sensation de plaisir et de bien-être,
Ø régulation de l'appétit : effet
anorexigène;
Ø régulation de l'humeur, de
l'anxiété et action antidépressive (42,47).
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