SECTION 2 :
LA
KAFALA DANS LES JURIDICTION DES PAYS MUSULMANS
Paragraphe 1 : Que dit l'Islam sur l'adoption ?
La protection de la filiation compte parmi les
priorités orientant la législation en Islam. Ainsi, toute
pratique portant préjudice d'une façon ou d'une autre à la
filiation d'un individu a été interdite.
Le Prophète Mohamed a par exemple condamné, avec
des mots très durs, la femme qui tenterait d'attribuer à un homme
la paternité d'un enfant qui ne serait pas de lui, mais aussi le
père qui renierait la paternité de son fils légitime. Il
dit en ce sens:
"Toute femme qui fera entrer dans une famille celui qui n'est
pas des leurs (c'est à dire qu'elle attribue à son mari un enfant
né de l'adultère) , alors elle n'a aucun lien avec Allah, et
Allah ne lui fera jamais entrer dans Son paradis; et tout homme qui reniera son
enfant alors qu'il l'observe (c'est à dire qu'il a conscience et il sait
pertinemment que cet enfant est le sien), Allah Se voilera de lui et le
déshonorera le Jour Final en présence des premiers et des
derniers (c'est à dire l'humanité entière)." (Abou
Dâoûd, Nasaï et Ibné Mâdjah)
De même, le fait pour quelqu'un de faire remonter sa
généalogie à un autre que son père compte parmi les
péchés majeurs ("Al Kabâïr") en Islam. Le
Prophète Mohamed dit au sujet de ce genre de personne:
"Quiconque prétend avoir un autre père que le
sien, en connaissance de cause, s'interdit l'accès au paradis."
(Boukhâri et Mouslim)
C'est en gardant ces principes à l'esprit que l'on peut
comprendre à présent la position juridique de l'Islam par rapport
à l'adoption:
- Si l'adoption porte atteinte à la filiation de
l'enfant, en ce sens que ce dernier est considéré comme
étant un membre à part entière de la famille (c'est
à dire qu'on attribue à son père adoptif sa
paternité; on agit à son égard comme s'il était
lié aux membres de la famille par des liens de sang; on lui
reconnaît, à l'instar d'un enfant naturel, une part de
l'héritage...), alors cela est strictement interdit en Islam. C'est pour
condamner cette forme d'adoption, qui était très répandue
dans le monde, et plus particulièrement en Arabie avant
l'avènement de l'Islam, que ces versets du Qour'aane ont
été révélés:
"Il n'a point fait de vos enfants adoptifs vos propres
enfants. Cesont des propos [qui sortent] de votre bouche. Mais Allah dit la
vérité et c'est Lui qui met [l'homme] dans la bonne direction.
Appelez-les du nom de leurs pères : c' est plus
équitable devant Allah. Mais si vous ne connaissez pas leurs
pères, alors considérez-les comme vos frères en religion
ou vos alliés. Nul blâme sur vous pour ce que vous faites par
erreur, mais (vous serez blâmés pour) ce que vos coeurs font
délibérément. Allah, cependant, est Pardonneur et
Miséricordieux." (Sourate 33 / Versets 4 et 5)
- Par contre, s'il s'agit pour un homme et une femme de
prendre en charge un enfant qui est orphelin ou qui n'a aucun soutient et de
s'occuper de lui comme de leur propre enfant, en lui accordant toute la
tendresse et la douceur dont il a besoin, en lui assurant sa prise en charge
matérielle et en lui donnant une bonne éducation (morale,
spirituelle, intellectuelle...), sans porter atteinte en aucune façon
qui soit à sa véritable filiation, alors, cela est
considéré comme un acte très méritoire aux yeux
d'Allah. C'est à ce sujet que le Prophète Mohamed disait
(traduction explicative du Hadith):
"Au paradis, le tuteur de l'orphelin et moi-même seront
comme ces deux doigts"; il fit alors un "V" avec l'index et le majeur et les
écarta. (Boukhâri)
Il est à noter cependant que, même dans ce cas,
l'enfant adopté ne deviendra pas un "Mahram" pour sa mère
adoptive. Il n'aura pas non plus une part d'office dans l'héritage de
ses parents adoptifs. Mais rien n'empêchent ces derniers de lui faire don
d'une partie (ou même de l'intégralité) de leurs bien
durant leur vivant, ou de lui léguer jusqu'à un tiers de ce
qu'ils possèdent après leur mort.
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