Paragraphe 2 : le contexte historique dans la
société islamique
Un bref rappel historique permet de saisir les raisons des
prescriptions qui ont fondé le Droit musulman pour ce qui concerne la
famille et l'adoption.
Dans la société pré-islamique
jusqu'à l'époque du prophète, coexistaient deux
systèmes d'union différenciés par le statut de la femme
dans chacun d'eux et impliquant des différences fondamentales en
matière d'éthique et de droit, ce sont : le système
matrilinéaire et le système patrilinéaire.
Dans le système matrilinéaire la filiation est
incontestablement établie par la mère qui demeure dans sa tribu
avec son enfant après le mariage.
Il n'en va pas de même dans le système
patrilinéaire où seule la chasteté de la mère,
légitime la filiation paternelle de l'enfant et son appartenance
à la tribu de l'époux.
A l'instar de la religion chrétienne, l'islam a
privilégié le système patrilinéaire; il a pour ce
faire, opté pour l'institution du mariage.
Il a considéré la famille comme la structure de
base fondamentale de la société, il édicta des principes
et des règles pour la protéger contre toute transgression,
illustration flagrante d'une possible survenance.
Selon l'origine de la privation de parents, l'islam classe les
enfants en 3 catégories: légale (enfants nés dans le
mariage), illégale (nés hors mariage), d'origine inconnue
(enfants trouvés).
Il pose le principe que l'origine d'un acte qualifie ses
conséquences, un acte illégal ne peut engendrer que des
conséquences illégales, l'enfant né hors mariage est par
conséquent illégitime et ne peut prétendre à une
filiation.
Cependant toute latitude est laissée aux docteurs de la
Loi pour imaginer les solutions les plus appropriées, propres à
garantir la paix sociale.
Ainsi fût fait durant des siècles, dans un esprit
de générosité envers la mère et l'enfant,
quelquefois au mépris du bon sens pour tempérer les
conséquences de la fameuse maxime latine dura lex. Sed
lex. (la loi est dure mais c'est la loi).
Afin d'éviter les éventuelles controverses
relatives à la filiation d'un enfant, le législateur musulman a
décidé que tout enfant né d'une mère mariée
appartient réellement ou putativement au lit du mari, et doit donc
être systématiquement inscrit dans sa filiation.
Afin d'écarter autant que faire se peut le doute sur la
paternité de l'enfant à naître, il est exigé de la
femme veuve ou divorcée de respecter un délai de viduité
couvrant plusieurs cycles menstruels avant de pouvoir se remarier; Afin
d'éviter les naissances hors mariage (illégitimes), la polygamie
est reconduite et il est recommandé aux parents de marier leurs filles
dés la puberté, dès qu'elles sont en âge de
procréer.
Les maternités hors mariage sont prohibées, les
précautions juridiques sont prévues pour qu'il n'y en ait point
et s'il advenait qu'une femme mariée soit enceinte alors que le mari est
absent depuis plus de neuf mois, la tradition confortée par certains
imams (hommes de loi) permettait le recours à un subterfuge qui
consistait à admettre que la grossesse pouvait durer très
au-delà de la gestation normale, jusqu'à 3 ou même 5 ans
selon l'imam Malek.
Chaque société engendre des mécanismes
régulateurs de tension sociale en fonction de ses valeurs.
On peut considérer l'adoption comme l'un de ces
mécanismes qui consiste à pallier les conséquences d'une
privation parentale et secondairement l'absence d'enfant.
C'est l'enveloppe d'une sauvegarde éthique, dont la
forme juridique dépend de la culture et du degré de
prégnance des traditions dans le pays considéré à
une période donnée.
Elle participe de l'éthique d'une
société, elle change avec elle et présente de ce fait une
dimension historique qui relativise sa conception dans le temps.
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