PREMIERE PARTIE :
LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT PAR UN RENFORCEMENT DE
LA SECURITE DES MOUVEMENTS TRANSFRONTALIERS
Le protocole de Cartagena est le premier instrument
international contraignant permettant de renforcer la sécurité
des mouvements transfrontaliers des organismes vivants modifiés (OVM),
de façon à protéger l'environnement et la santé
humaine.
Nous allons, dans cette première partie, analyser le
dispositif de sécurité prévu par le protocole
(chapitre 1), et la recherche d'une protection plus efficace
de la diversité biologique (chapitre 2).
CHAPITRE 1: LE DISPOSITIF DE SECURITE PREVU PAR
LE PROTOCOLE
Ceci se retrouve clairement dans les principales dispositions
contenues dans le texte du protocole (Section 1) et à
travers les instances chargées des missions de sécurité
prévues par le protocole (Section 2).
SECTION 1 : LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DE SECURITE
EN
MATIERE DE MOUVEMENTS
TRANSFRONTALIERS
Le Protocole de Cartagena définit
précisément son champ d'application, instaure une nouvelle
procédure permettant aux Etats importateurs d'organismes vivants
modifiés d'être pleinement informés des risques et
d'éventuellement interdire l'importation.
Cette première section traitera successivement d'un
mécanisme de sécurité basé sur le mouvement
transfrontalier des OVM (paragraphe 1) et les règles
s'appliquant aux mouvements transfrontaliers des OVM (paragraphe
2).
Paragraphe 1 : Un mécanisme de
sécurité basé sur le mouvement transfrontalier des
OVM
Nous préciserons d'abord l'objectif du protocole
(A) ensuite son champ d'application (B)
A- L'objectif du protocole
De son vrai nom, le « Protocole de Cartagena sur la
prévention des risques biotechnologiques relatif à la Convention
sur la diversité biologique », il a pour objectif de
contribuer à contrôler le transport, le mouvement entre les pays
et l'utilisation d'un OVM, en assurant un degré adéquat de
protection de la diversité biologique et de prévention des
risques pour la santé humaine. Il est basé sur l'approche de
précaution
L'article premier définit l'objectif du protocole en
conformité avec l'approche de précaution : assurer un niveau
de protection adéquat pour le transfert, la manipulation et
l'utilisation sans danger d'organismes vivants modifiés qui peuvent
avoir des effets défavorables sur la diversité biologique et la
santé humaine.
En effet, l'article 1
dispose : « Conformément à l'approche de
précaution consacrée par le principe 15 de la Déclaration
de Rio sur l'environnement et le développement, l'objectif du
présent protocole est de contribuer à assurer un degré
adéquat de protection pour le transfert, la manipulation et
l'utilisation sans danger des organismes vivants modifiés
résultant de la biotechnologie moderne qui peuvent avoir des effets
défavorables sur la conservation et l'utilisation durable de la
diversité biologique, compte tenu également des risques pour la
santé humaine, en mettant plus précisément l'accent sur
les mouvements transfrontières ».
Il reconnaît que les OVM sont porteurs de risques et
méritent un traitement spécifique.
De ce fait, les parties s'engagent à prendre toutes les
mesures juridiques et administratives nécessaires à l'application
du protocole. Rien dans le protocole ne restreint le droit des Etats de prendre
des mesures plus rigoureuses, dans la mesure où elles sont compatibles
avec l'objectif et les dispositions du protocole (article 2).
L'article 3 définit le terme d'organisme vivant
modifié comme « toute entité biologique capable de
transférer ou de répliquer du matériel
génétique, y compris des organismes stériles, des virus et
des viroïdes,[...]possédant une combinaison de matériel
génétique inédite obtenue par recours à la
biotechnologie moderne ».
Au titre du protocole, la « biotechnologie
moderne » s'entend d'une part, « de l'application de
techniques in vitro aux acides nucléiques, y compris la recombinaison de
l'acide désoxyribonucléique (ADN) et l'introduction directe
d'acides nucléiques dans les cellules ou organites », et
d'autre part, « de la fusion cellulaire d'organismes n'appartenant
pas à une même famille taxonomique qui surmontent les
barrières naturelles de la physiologie de la reproduction ou de la
recombinaison ».
Il ressort de cette définition que les organismes
génétiquement modifiés (OGM) sont l'une des deux grandes
catégories d'OVM, c'est-à-dire ceux dont le matériel
génétique ou ADN a été transformé d'une
manière qui ne s'effectue pas par multiplication ou recombinaison
naturelle.
Le protocole institue un cadre réglementaire à
l'échelle internationale pour concilier les impératifs
commerciaux et la protection de l'environnement et de la santé humaine
par rapport à l'industrie de la biotechnologie qui connaît un
essor rapide.
B. Le champ d'application du
protocole
Le protocole porte essentiellement sur des OGM
destinés à être introduits directement dans l'environnement
(tels que semences et poissons) et sur les produits agricoles
génétiquement modifiés (comme le maïs et les
céréales destinés à être utilisés
directement pour l'alimentation humaine et animale, ou à être
transformés). Il ne s'applique pas aux OGM qui sont des produits
pharmaceutiques destinés à l'homme relevant d'autres accords
internationaux, ni aux produits qui sont des dérivés des OGM,
tels que l'huile de friture issue de maïs génétiquement
modifié ou le papier issu d'arbre génétiquement
modifié.
Le protocole de Cartagena s'appliquera, selon l'article 4 aux
mouvements transfrontières, au transit, à la manipulation et
à l'utilisation de tout organisme vivant modifié qui pourrait
avoir des effets défavorables sur la diversité biologique et la
santé humaine.
En effet, le protocole de distingue trois catégories
d'Organismes Vivants Modifiés :
- Les Organismes Vivants Modifiés destinés
à être utilisés en milieu confiné
- Les Organismes Vivants Modifiés destinés
à être introduits dans l'environnement(semences
transgéniques).
- Les Organismes Vivants Modifiés destinés
à être utilisés à l'alimentation ou à
être transformés (exemple lécithine de soja).
Le protocole de Cartagena n'aborde pas les questions
liées à la sécurité sanitaire des aliments.
Celles-ci sont traitées par des spécialistes associés
à d'autres mécanismes internationaux, tel le Codex
alimentarius16. Le protocole ne traite pas non plus
des produits non vivants dérivés de végétaux ou
d'animaux génétiquement modifiés, tels le maïs
usiné ou d'autres produits alimentaires transformés. Il n'exige
pas la séparation des denrées susceptibles de contenir des
organismes vivants modifiés . Les denrées ne sont pas
visées par sa procédure d'accord préalable en connaissance
de cause, laquelle aurait pour effet de perturber gravement le commerce et de
compromettre l'accès aux produits alimentaires sans avantages
proportionnels pour l'environnement.
16. La Commission du Codex Alimentarius a
été créée en 1963 par la FAO et l'OMS afin
d'élaborer des normes alimentaires, des lignes directrices et d'autres
textes, tels que des codes d'usages, dans le cadre du programme mixte
FAO/OMS sur les normes alimentaires. Les buts principaux de ce programme sont
la protection de la santé des consommateurs, la promotion de pratiques
loyales dans le commerce des aliments et la coordination de tous les travaux de
normalisation ayant trait aux aliments entrepris par des organisations aussi
bien gouvernementales que non gouvernementales.
Le protocole n'exige pas l'étiquetage des produits de
consommation. Son objectif est de faire face aux risques que les organismes
vivants modifiés pourraient présenter pour la diversité
biologique. Les questions liées aux préférences des
consommateurs ne figuraient pas à l'ordre du jour des
négociations. L'obligation prévue dans le protocole de documenter
l'identification des produits expédiés qui portent les mentions
« peuvent contenir des organismes vivants modifiés »
et « ne sont pas destinés à être introduits
intentionnellement dans l'environnement » peut être satisfaite
par la présentation des documents d'expédition.
Aux termes du protocole, l' « utilisation en
milieu confiné » s'entend de toute opération,
entreprise dans un dispositif, une installation, ou toute autre structure
physique, faisant intervenir des organismes vivants modifiés qui sont
réglementés par des mesures spécifiques qui en limitent
effectivement le contact avec le milieu extérieur, et l'impact sur ce
milieu.
Le protocole ne s'applique pas, en revanche, aux mouvements
transfrontières d'OVM qui sont des produits pharmaceutiques
destinés à l'homme relevant d'autres accords ou organismes
internationaux (article 5). Aussi, les règles du protocole ne
s'appliqueront pas à des OVM en transit sur le territoire d'un Etat, le
transit relevant de la réglementation de chaque Etat ( article 6
paragraphe 2)
Selon le Protocole, « mouvement
transfrontière » s'entend de tout mouvement d'un organisme
vivant modifié en provenance d'une Partie et à destination d'une
autre Partie, à ceci près qu'aux fins des articles 17 et 24,
``mouvement transfrontière'' s'étend aux mouvements entre Parties
et non Parties.
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