La biosecurite dans le protocole de cartagenapar Alassani KOUNTE Universités de Lome, Maastricht, Liege, Abomey Calavi - DEA 2001 |
B- La multiplication des mesures de protection face aux risques sanitairesEn effet, comment gérer un risque que l'on ne connaît pas et est-ce nécessaire de prendre des mesures sans évidence scientifique ? « Dans le doute, abstiens-toi ! » Toutes les mesures prises pour lutter contre la vache folle vont à l'encontre de cet adage. Ici, on agit, on adopte des mesures de prévention même si les connaissances scientifiques ne sont pas complètes. On applique ce qu'on appelle le principe de précaution devant des risques que l'on ne peut pas quantifier avec exactitude, mais que l'on ne veut pas courir. Le principe de précaution n'est pas toujours simple à appliquer. Prendre des mesures malgré l'absence de preuve ou malgré le manque de connaissances, c'est accepter de ne pas avoir la solution ; c'est accepter d'agir, malgré une situation truffée de points d'interrogation. Reste une question : appliquons-nous trop le principe de précaution ou pas assez ? Les autorités suisses ont pris la vache folle très au sérieux. Dès le premier cas en 1990, les premières mesures pour la protection des consommateurs ont été prises et cela bien avant que l'on sache que la vache folle pouvait se transmettre à l'homme. L'objectif de ces mesures est de ne laisser aucune chance aux prions pathogènes d'entrer dans les denrées alimentaires et les biens de consommation. De même le maïs transgénique offert par les Nations Unies pour prévenir les risques de famine en Zambie a été refusé par le Président Zambien Levy Mwanawasa. Bien que près de 30 % des 10,2 millions d'habitants de la Zambie soient menacés par la famine, le Gouvernement du Président Levy Mwanawasa a cédé à la peur des modifications génétiques et a refusé d'autoriser l'importation de céréales GM. Le Président lui-même a réitéré son refus d'administrer à ses compatriotes un "poison" pouvant avoir des effets à long terme, tant qu'il ne disposerait pas de données suffisantes et crédibles pour le convaincre du contraire. « En raison de notre faible capacité scientifique et technologique, a expliqué le président Levy Mwanawasa, nous ne sommes pas en mesure d'évaluer le risque présenté par les OGM. » Donc la prudence s'impose et le pays ne veut pas entendre parler d'OGM pour sa population, tout affamée qu'elle soit. Les autorités zambiennes ont exprimé leur intention de s'en tenir au "principe de prudence", qui stipule qu'en cas d'incertitude scientifique, un pays doit s'abstenir d'adopter des mesures qui risquent de compromettre la santé humaine ou animale ou de nuire à l'environnement. "Je ne permettrai jamais que les Zambiens servent de cobayes, quelle que soit l'ampleur de la crise alimentaire", déclara le Président Zambien. Le Ministre de l'agriculture et des coopératives, Mundia Sikatana, a opiné : "Nous aurons de bons produits alimentaires pour nos concitoyens, qu'il nous sera possible de garantir. On ne devrait pas être forcés d'accepter quoi que ce soit72 '' Après des mois de bagarre, le Programme alimentaire mondial (FAO) a accepté de retirer les 15.000 tonnes de maïs génétiquement modifié destinés à Lusaka, et de les remplacer par des céréales plus classiques. Dans le même temps, l'Union Européenne débloquait 28 millions d'euros pour aider le pays à acheter le maïs traditionnel. Même si en Afrique, le concept de sécurité alimentaire concerne plus souvent la régularité des approvisionnements que leur innocuité, le cas Zambien prouve que les Africains peuvent aussi se soucier de la qualité du contenu de leur assiette73. 72. source Afrique Relance, disponible sur le site : http://www.un.org/french/ecosocdev/geninfo/afrec 73 . .Source :Jeune Afrique l'intelligent page 65-67 Suite aux dangers que constituent les OGM en l'absence d'un code d'hygiène alimentaire, la réglementation togolaise dans cette matière obéit à la loi française du 1er Août 1905 sur les falsifications en matière de produits. Elle est relative à la falsification, au préconditionnement des aliments et à la distribution74. Paragraphe 2 : La prévention des risques biotechnologiquesLe concept de la prévention des risques biotechnologiques recouvre un vaste évantail de mesures, de politiques et de procédure destinées à réduire au minimum ou à éliminer les risques potentiels que la biotechnologie pourrait comporter pour l'environnement et la santé humaine. Il est essentiel que des mesures de protection crédibles et efficaces soient prises concernant les OGM, afin de tirer le maximum du potentiel de la biotechnologie tout en réduisant les risques possibles. Dans ce volet, nous étudierons la nécessité d'une biosécurité (A) ensuite la nécessité d'une sécurité alimentaire durable (B)
Les biotechnologies cherchent, par des méthodes faisant appel au génie génétique et à diverses techniques biologiques, à augmenter les rendements (production et productivité) et à améliorer l'efficacité des produits utilisés dans le domaine de l'agriculture, l'agro-alimentaire, l'élevage, la santé animale, la médecine humaine, la dépollution, etc. La biotechnologie crée et modifie génétiquement les organismes vivant pour des raisons essentiellement économiques. Toute modification génétique d'une espèce fait d'elle une espèce étrangère même dans son écosystème d'origine. En effet, la biosécurité apparaît comme l'une des questions les plus urgentes qui se pose à la communauté internationale et concerne la prévention des risques biotechnologiques. Elle vise également le contrôle des nouvelles introductions d'espèces ou de gènes dans des milieux qui leurs sont étrangers. Il s'agit essentiellement de la ``gestion des risques de type biologique et environnemental associés à l'alimentation et à l'agriculture, y compris les forêts et les pêches'', un secteur qui couvre la sécurité sanitaire des aliments ainsi que la vie et la santé des végétaux et des animaux qui ont introduit comme l'érosion de la biodiversité, la propagation des maladies transfrontières, du bétail, les armes de guerre à action toxique et la maladie de la vache folle. Le nombre considérable d'accords internationaux, de lois non directives et d'organes intergouvernementaux qui ont été établis pour traiter de la biosécurité témoignent de l'ampleur de la complexité du sujet. Le besoin de biosécurité alimentaire et agricole s'est accru avec la mondialisation de l'économie, le développement rapide des communications, des transports et du commerce, les progrès technologiques et la sensibilisation accrue aux questions touchant à la biodiversité et à l'environnement. Au plan international c'est l'Accord sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires (ou accord SPS) de l'OMC qui fournit la couverture la plus complète à cet égard. 74. La protection de l'hygiène alimentaire au Togo, mémoire de DEA, AKOMA-POATHY Noël, UB, 2000, page 14 La nécessité d'une biosécurité implique, selon Michel PRIEUR, une «application rationnelle d'une combinaison de mesures biologiques, biotechniques, chimiques, physiques, culturales ou intéressant la sélection des végétaux dans laquelle l'emploi de produits chimiques phyto pharmaceutiques est limité au strict nécessaire pour maintenir la présence des organismes nuisibles en dessous du seuil à partir duquel apparaissent les dommages ou une perte économique inacceptable »75. Au Togo, en effet, le cadre juridique national se caractérise par une absence de législation nationale spécifique à la prévention des risques biotechnologiques. Seule une large interprétation de l'article 80 de la loi no 88-14 du 03 novembre 1988 portant code de l'environnement permettrait au Togo de soumettre l'introduction d'OVM à une autorisation « sans préjudice de la législation phytosanitaire, l'introduction au Togo de toute espèce animale ou végétale nouvelle est soumise à l'autorisation du ministre chargé de l'environnement. Cette autorisation sera refusée, dès lors qu'il y a lieu de craindre que la prolifération de l'espèce considérée nuise aux populations des espèces indigènes et aux équilibres naturels ». Néanmoins l'adhésion aux ententes internationales relatives à la gestion des risques biotechnologiques et l'existence de législations connexes ou voisines méritent d'être évoquées. Le Togo a adhéré à plusieurs ententes relatives à la sécurité en biotechnologie. En juin 1992, à Rio de Janeiro, a été adopté l'Agenda 21. Le cinquième programme de son chapitre 16 traite de l'établissement de mécanismes pour le développement des biotechnologies et leur application dans le respect de l'environnement76, (la reconnaissance par la communauté internationale des risques potentiels de l'utilisation de la biotechnologie moderne, a entraîné l'adoption d'une approche prudentielle. Ainsi les membres de la communauté internationale se sont convenus de la nécessité d'assurer la sécurité dans la mise au point, l'application, les échanges et le transfert des biotechnologies au moyen d'un accord international sur les principes à appliquer en matière d'évaluation et de gestion des risques) Pour une biosécurité nous envisageons que les mesures et les actions suivantes soient menées par le ministère de l'environnement notamment : Mesures préconisées La mise en place d'un système de quarantaine au niveau
du Ministère de l'environnement
75. L'agriculture biologique une agriculture durable ? Sous la direction de Michel PRIEUR, droit comparé de l'environnement, 1996, page120 76. L'agenda 21 consacre son chapitre 16 à la « gestion écologiquement rationnelle des biotechnologies ». Actions envisagées Adoption d'un Cadre national sur la biosécurité comprenant la création d'une Commission nationale sur la biosécurité ayant pour tâches de: - Coordonner les activités des promoteurs privés
et des centres de recherche par la tenue d'ateliers et de réunions de
sensibilisation et de formation qui regrouperont les différents
partenaires.
B- La nécessité d'une sécurité alimentaire durable Régulièrement mis en accusation, le semencier américain Monsanto a publié une charte dans laquelle il promet de « faire bénéficier les agriculteurs sans ressources du Tiers Monde de la connaissance et des avantages de toutes les formes d'agriculture, afin de contribuer à la sécurité alimentaire et à la protection de l'environnement ». Comme il n'est pas évident pour le consommateur Ewé ou Kabyè de connaître la composition de ce qu'il mange et de savoir si cela est conforme aux prescriptions alimentaires de sa religion, Monsanto déclare « respecter les préoccupations d'ordre religieux, culturel et éthique dans le monde en n'utilisant pas de gènes issus de l'homme ou de l'animal dans ses produits agricoles destinés à l'alimentation humaine et animale »77. Les documents accompagnant les organismes vivants modifiés destinés à être introduits intentionnellement dans l'environnement de la partie importatrice, semences par exemple, doivent indiquer qu'il s'agit d'organismes vivants modifiés, spécifier leur identité et leurs traits et caractéristiques pertinents ainsi que les règles de sécurité à observer pour la manipulation, l'entreposage, le transport et l'utilisation de ces organismes, et indiquer les coordonnées de la personne à contacter pour tout complément d'information, ainsi que, le cas échéant, le nom et l'adresse de l'importateur et de l'exportateur. Les documents accompagnant les organismes vivants modifiés destinés à être utilisés directement pour l'alimentation humaine et animale, ou destinés à être transformés, doivent indiquer clairement qu'ils « peuvent contenir » des organismes vivants modifiés et qu'ils ne sont pas destinés à être introduits intentionnellement dans l'environnement et elle doit donner les coordonnées des personnes ou des organismes à contacter pour tout complément d'information. Le protocole exige des parties qu'elles prennent une décision exposant en détail les modalités de cette obligation, en particulier la façon dont il faudra spécifier l'identité de ces organismes ainsi que toute identification particulière, et ce au plus tard dans les deux ans qui suivent l'entrée en vigueur du protocole. 77. . Jeune Afrique l'Intelligent précité, page 68 Les documents accompagnant les organismes vivants modifiés destinés à être utilisés en milieu confiné, par exemple à des fins de recherche scientifique ou commerciale dans des locaux en milieu clos, doivent indiquer clairement qu'il s'agit d'organismes vivants modifiés, en spécifiant les règles de sécurité à observer pour la manipulation, l'entreposage, le transport et l'utilisation de ces organismes, et préciser les coordonnées des personnes ou organismes à contacter pour tout complément d'information, y compris le nom et l'adresse de la personne et de l'institution auxquelles les organismes vivants modifiés sont expédiés. Face à la demande croissante des consommateurs en matière d'amélioration de la sécurité sanitaire des aliments dans le monde, l'Organisation Internationale des Epizooties (OIE) a reconnu la nécessité d'étendre ses activités normatives et scientifiques à la « sécurité sanitaire des aliments d'origine animale en phase de production ». Dans le cadre de ce nouveau domaine d'action, l'OIE collaborera avec d'autres organisations compétentes à la réduction des risques de santé publique liés aux aliments du fait de dangers provenant des animaux, étant entendu comme danger tout agent biologique, chimique ou physique y compris les OGM , présent dans un aliment pouvant avoir un effet nocif sur la santé. Le programme de travail de l'OIE pour la période 2001-2005 recommande que « l'OIE joue un rôle plus actif dans le domaine de la santé publique et de la protection du consommateur » et précise que cette participation doit concerner « les zoonoses et les maladies transmissibles à l'homme par l'intermédiaire des aliments, que les animaux soient ou non touchés par ces maladies ». Le rôle de l'OIE s'était traditionnellement limité à la prévention de la transmission des maladies animales aux autres animaux et à l'homme. Le Directeur général de l'OIE a constitué un Groupe ad hoc sur la sécurité sanitaire des aliments dont les recommandations ont été soumises pour approbation au Comité international de l'OIE et adoptées par celui-ci en 2002. Un groupe de travail permanent sur la sécurité des aliments a été constitué en vue d'assurer la coordination des activités de l'OIE liées à la salubrité des aliments. Ce groupe de travail, dont font partie plusieurs experts de la Commission du Codex Alimentarius et des Comités du Codex, bénéficie d'une large représentation géographique. Il accordera une attention particulière aux besoins des pays en développement. Lors de ces différents travaux, l'OIE rendra à la fois service au pays importateur en prévenant la diffusion de maladies et au pays exportateur en prévenant la diffusion de maladies et au pays exportateur en contribuant à la sécurité sanitaire de l'ensemble de la chaîne, « du producteur au consommateur ». L'élaboration des normes de santé publique et de santé animale préalablement à l'abattage des animaux contribuera par exemple à restaurer la confiance des consommateurs dans les denrées alimentaires. Enfin, l'implication de l'OIE renforcera la protection du consommateur en termes de sécurité sanitaire et se traduira par une amélioration globale de la santé animale et de la santé publique78. En définitive, pour une sécurité alimentaire durable, nous devons oeuvrer pour une « application rationnelle d'une combinaison de mesures biologique, biotechnique, chimique, physique, culturale ou intéressant la sélection des végétaux dans laquelle l'emploi de produits chimiques phyto pharmaceutique est limité au strict nécessaire pour maintenir la présence des organismes nuisibles en dessous du seuil à partir duquel apparaissent les dommages ou une perte économique inacceptable.»79 78. source : www.oie.int/fr/secu_sanitaire/fr_introduction.htm 79. l'agriculture biologique une agriculture durable ? Sous la direction de Michel PRIEUR, droit comparé de l'environnement 1996, page 362 |
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