Section 4 Les règles juridiques applicables au
contrat cyberspatial
La détermination de la législation applicable
au contrat cyberspatial nous permettra de qualifier ce contrat.
Paragraphe 1 Détermination de la
législation applicable
au contrat cyberspatial
Avant de déterminer la législation applicable au
contrat cyberspatial, il faudra préciser ce qu'est un contrat
cyberspatial.
A. DEFINITION DU CONTRAT CYBERSPATIAL
Lionel Bochurberg a une vision assez large de la
notion de contrat cyberspatial puisque pour lui, il s'agit d'un
contrat « par lequel la formation et/ou l'exécution emprunte un
moyen de transmission ou de communication » 53
numérique. En d'autres termes, serait qualifié de
cyberspatial le contrat conclu sous forme écrite sur support
papier et par lequel l'une des parties achète à l'autre des
oeuvres littéraires numérisées. Le vendeur
expédiera l'objet de la commande à partir de son
ordinateur et l'acheteur le recevra également sur son ordinateur.
Ce cas de figure, ne fait pas partie des contrats
cyberspatiaux.
Le moyen par lequel doit être exécutée
l'obligation n'est d'aucune utilité pour qualifier le contrat
cyberspatial. L'exemple décrit plutôt un contrat traditionnel pour
lequel l'exécution s'effectuera sous forme
numérisée54.
En ce qui concerne la réflexion sur la nature
même du contrat cyberspatial ainsi que sur les questions de
droit international privé que soulèvent les contrats qui
intéressent la présente étude, seuls comptent ceux conclus
dans le cyberespace. Les autres, quelle que soit la façon dont sont
exécutées les obligations, relèvent de la théorie
traditionnelle, sans poser de problèmes particuliers autres que ceux
touchant spécifiquement à l'exécution des obligations.
À la première définition
présentée, Sylvette Guillemard55
préfère celle proposée par Vincent Gautrais.
Pour lui, un contrat électronique est « la situation par
laquelle un engagement est conclu entre deux ou plusieurs
personnes qui utilisent chacun un ordinateur
branché sur un réseau de
53 BOCHUBERG (L.), Internet et commerce
électronique, Paris, Dalloz, 2001, p.112.
54 La prise en considération du mode
d'exécution de l'obligation sert plutôt à décrire
non pas le contrat lui-même mais plutôt, si nécessaire, le
type de commerce. Effectivement, on pourra parler de commerce
électronique lorsque l'une des étapes de la relation
contractuelle s'effectuera en ligne, qu'il s'agisse de la conclusion de
l'entente ou de l'exécution de l'obligation ou de l'une des
obligations.
55GUILLEMARD (S.), le droit international privé
face au contrat cyberspatial, op. cit.
communication comme moyen de transmettre une offre et
une acceptation, éléments constitutifs dudit contrat
»56.
Catherine Kessedjian en donne une variante qui a l'avantage de
cibler encore plus la naissance même de l'entente en excluant
expressément d'autres étapes : « Nous appelons
«contrats électroniques» les contrats
«signés» sous forme électronique, en ligne ou en temps
différé, quelle que soit
la forme prise par la négociation elle-même ou
l'exécution de ce contrat »57.
Tout en adoptant cette définition, il serait plus
indiquer de privilégier l'expression « contrat cyberspatial
», plutôt que numérique ou électronique, afin de
mettre en relief non pas le type de technique utilisée mais le fait
que
les relations d'affaire se nouent dans l'espace virtuel.
Toutes les relations contractuelles dans le cyberespace
ne donnent pas nécessairement lieu à un contrat cyberspatial.
Mais dans le cadre de la présente étude, l'intérêt
sera porté sur le contrat cyberspatial au sens strict du terme.
B. DE L'APPLICABILITE DES REGLES TRADITIONNELLES AU CONTRAT
CYBERSPATIAL
La question fondamentale est de savoir si les
règles traditionnelles s'appliquent aux relations juridiques dans le
cyberespace. En effet, de par la description qui en a été faite
dans le chapitre précédent, le cyberespace est un monde virtuel
qui a longtemps été perçu comme se soustrayant
à toute emprise juridique. Mais, malgré l'acharnement de
certains libertaires comme John Perly Barlow58, il est
aujourd'hui admis que le cyberespace est régi par
les législations traditionnelles. Le cyberespace
n'est qu'une continuation de
notre monde réel qui n'échappe pas aux
règles sociales. Les cybernautes, loin
56 GAUTRAIS (V.), L'encadrement juridique du contrat
électronique international, thèse de doctorat, Faculté des
Études
supérieures, Université de Montréal,
1998P.6 note 20
57 KESSEDJIAN (C.), « Internet et le
Règlement des différends » dans GROSHEIDE (F.W.),
BOELE-WOELKI (K.), dir.,
Molengrafica 1999-2000, Koninklijde Vermande 2000, 69 p. 82
note 49.
58 John Perry Barlow est l'un des principaux
fondateurs de l'Electronic Frontier Organisation en lutte contre les
projets
de lois aux Etats-Unis qui restreindraient la liberté
des utilisateurs des réseaux électroniques. Cet organisme
véhiculait
un véritable idéalisme politique tendant
à affirmer que l'utilisation des réseaux électronique doit
échapper aux concepts
juridiques forgés au sein de nos nations
« matérielles ». Voir John Perry Barlow,
Déclaration de l'indépendance du
Cyberespace, inédit, 1996.
d'être des créatures virtuelles ayant
légitimité à revendiquer leurs propres lois, sont de
concrets êtres humains, titulaires d'une nationalité
définie, et de ce fait
« assujettis à leurs droits nationaux respectifs
»59.
Aussi, même si certains journalistes ont
tenté de démontrer que le réseau Internet
évoluait dans `un no man's land juridique', tant au niveau
national qu'international, les professeurs de droit ont refusé
cette hypothèse
en dessinant un cadre juridique applicable à
Internet60 . Les tribunaux ont
commencé à juger61 les litiges relatifs
au World Wide Web et à http.
Les règles de droit s'appliquent donc au contrat
cyberspatial tant au niveau national, par hypothèse le droit
béninois qu'au niveau international grâce au droit
international privé. Nous pourrons donc nous baser sur la
législation béninoise en l'occurrence le code civil, et les
Conventions internationales pour étudier le contrat cyberspatial.
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