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Les contrats dans le cyberespace à l'épreuve de la théorie générale: problèmes et perspectives

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par Cica Mathilda DADJO
Université d'Abomey Calavi - BENIN - Maîtrise en droit des affaires et carrières judiciaires 2003
  

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Paragraphe 2 Les adaptations à entreprendre en matière de preuve

Les adaptations éventuelles auront deux objectifs : donner au document électronique une force probante et définir les conditions dans lesquelles une signature électronique pourra être prise en compte.

A. LA FORCE PROBANTE DU DOCUMENT ELECTRONIQUE

Dans un premier temps, on pourrait élargir le domaine de la preuve en relevant le seuil de l'exigence de la preuve. Ceci permettra de soustraire à l'exigence de preuve par écrit une grande partie des contrats cyberspatiaux104. Par ailleurs, le monde des affaires ne se réduit plus aux seuls commerçants, surtout en ce qui concerne le cyberespace. Il serait dès lors opportun de modifier aujourd'hui le fondement du clivage entre la liberté de preuve et la preuve par écrit en étendant le régime de la preuve libre à l'ensemble des professionnels105.

La seconde solution qui semble la plus pertinente serait d'agir sur l'admissibilité des modes de preuve en actualisant certaines notions face à la disparition du papier dans le cyberespace.

Contrairement à la notion d'original qui au travers de l'exigence implicite de signature, renvoie à un titre papier, le terme document semble être neutre, aussi bien quant au support utilisé qu'à ces caractères formels. Il peut

103 Lire à cet effet, DE LEYSSAC (L. C.), « Le droit fondamental de la preuve, l'informatique et la télématique », Petites

affiches, 29 mai 1996, p.5 ; SEDALLIAN (V.), Droit de l'Internet, éd. Net Press, 1997, p. 102. On pourrait à la limite

parler d'impossibilité relative mais en aucun cas d'impossibilité absolue : BENSOUSSAN (A.), « Contributions théoriques

au droit de la preuve dans le domaine informatique, aspects juridiques et solutions techniques », Gaz. Pal. 1991 2 doct.

P.361.

104 L'article 1341 impose la rédaction d'un écrit signé à titre probatoire pour les actes juridiques mettant en jeu une somme supérieure à 5000F CFA.

être signé pour établir l'approbation du contenu sinon l'engagement (document contractuel constitutif d'un original) comme il peut ne pas être signé sans cesser d'être pour autant un original.

En somme, tout en gardant intactes les exigences de l'article 1341, une réforme devrait prévoir qu'un document électronique pourra tenir lieu d'acte sous seing privé dans certaines conditions.

Ainsi, il serait souhaitable de ne pas étendre les exceptions au domaine de la preuve écrite mais d'inscrire dans la section relative aux preuves littérales du code civil un article portant sur les documents électroniques. Cette assimilation est cependant sous condition que le document puisse éclairer indiscutablement sur le contenu et sur les auteurs de l'acte. C'est à dire que le document soit assorti d'une signature fiable et conservée de manière durable 106 sous le contrôle des signataires ou, d'un tiers, à qui ces derniers souhaitent confier cette fonction. Il serait en effet préférable de remplacer l'expression « copie fidèle et durable » par celle de

« procédé technique fiable de conservation »107.

La question est alors de savoir dans quelles conditions la preuve est rapportée que les exigences portant sur la fiabilité du document sont remplies.

On imagine mal en effet un particulier faire la preuve d'un système informatique. Il faudra alors ne reconnaître le document électronique que s'il a été certifié par un tiers ; on retrouve en quelque sorte le mécanisme de l'acte authentique qui pour son instrumentum, fait foi jusqu'à inscription en faux. Pratiquement, on aboutirait au remplacement de l'article 1333 du code civil par

un nouvel article relatif aux documents électroniques.

B. LA RECONNAISSANCE JURIDIQUE DE LA SIGNATURE ELECTRONIQUE.

105 En substituant la notion de professionnels à celle de commerçant.

106 Art. 1348 al 2 C.Civ.

107 Sur la durabilité de la preuve électronique, voir POTTIER (I.), «La valeur probante des images stockées sur disques optiques numériques», Normatique n° 39 août- septembre 1992, p. 3.

Dans la mesure où, ni au plan formel, ni au plan fonctionnel, elle ne rencontre d'obstacle rédhibitoire, la signature électronique devrait être admise comme substitut de la signature manuscrite.

Au plan formel tout d'abord, si la signature est une notion clef du système de la preuve légale, ses éléments constitutifs ne sont définis par aucun texte. De ce fait, l'indication d'un patronyme, si elle est habituelle, n'est pas imposée et l'emploi d'un code numérique confidentiel pourrait être admis. Quant au caractère manuscrit de la signature, le législateur pourrait intervenir pour permettre l'emploi d'un paraphe apposé par procédé mécanique.

Au plan fonctionnel, ce qui importe pour qu'une mention soit susceptible de constituer une signature, c'est son aptitude à garantir d'une part l'identification de son signataire et d'autre part la manifestation de son adhésion au contenu de l'acte108.

Diverses techniques sont actuellement développées sur le marché. Elles consistent à créer les conditions techniques pour que la signature électronique présente un grand nombre ou la totalité des fonctions perçues comme caractéristiques d'une signature manuscrite.

Des différentes formes de signatures électroniques développées109, la signature dite numérique ou digitale à clé publique semble la plus fiable. Elle repose sur les procédés de cryptographie asymétrique110 qui peuvent servir non seulement à des fins de signature, mais aussi dans le but de garantir la confidentialité des échanges. Le procédé fonctionne comme suit : le message

est signé par son auteur à l'aide de sa clé privée, puis il est expédié au

destinataire, qui peut le déchiffrer uniquement avec sa clé publique

108 La signature (comme étant) un élément nécessaire à la perfection d'un acte juridique et qui identifie celui qui

l'appose. Elle manifeste le consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte. BENSOUSSAN (A.), Informatique Télécoms Internet, Règlements Contrats Fiscalité Réseaux op. cit. p. 201 :. Voir egl. GOBERT (D.),

MONTERO (E.), «La signature dans les contrats et les paiements électroniques, l'approche fonctionnelle», DA/OR, avril

2000, n° 53, PP. 17-39.

109 Voir GOBERT (D.), MONTERO (E.), «La signature dans les contrats et les paiements électroniques, l'approche fonctionnelle», op. cit.

110 Pour une explication détaillée, PARISEN (S.), TRUDEL (P.), L'identification et la certification dans le commerce électronique, Quebec éd. Yvon Blais. Inc. 1996, PP.93-113 ; HUBIN (J.), «la sécurité informatique, entre la technique et

le droit », Cahiers du C.I.R.D., n° 14, E. Story-Scientia, 1998, spéc. pp. 68-112.

complémentaire à la clé privée de l'émetteur. Ainsi, le destinataire est certain que le message émane bien de son auteur dûment identifié111. Autrement dit,

on donne deux clés au client prestataire. La première, la clé du destinataire, reste privée. La seconde, la clé de vérification est rendue publique ; lorsque

les parties signent, un procédé électronique contenu dans la certification fige

le contenu de l'acte. Ainsi, ce procédé permet de signer des documents électroniques dont l'origine et l'intégrité seront certifiées par le tiers.

L'utilisation de la cryptographie asymétrique à des fins de signature permet de remplir, efficacement et de manière sûre cette fonction d'identification. Pour autant que les clés publiques soient conservées dans de bonnes conditions de sécurité, le risque de fraude est ici considérablement réduit112. En outre, des mécanismes d'opposition et de révocation des clés existent dans tous les systèmes pour parer à toute éventualité.

Même dans la mesure où le code peut, par fraude être copié, entraînant l'identification d'un opérateur qui n'est pas le titulaire légitime du code, remarquons que la signature manuscrite peut également être falsifiée. Aussi, si le législateur de 1804 a jugé sage de ne pas accorder à la signature classique une valeur absolue, il paraîtrait paradoxal d'exiger au 21ème siècle une sécurité absolue d'éventuelles formes de signature.

En ce qui concerne l'adhésion au contenu de l'acte, dès l'instant où la

clé de chiffrement est appliquée de manière volontaire et personnelle113 par l'auteur d'un document électronique, il est permis de considérer qu'il exprime son consentement à l'ensemble du contenu de celui-ci.

Il serait alors souhaitable que le législateur reconnaisse la signature électronique mais en se bornant à fixer un cadre général à sa validité : un signe ne pourrait valoir signature qu'à la seule condition de remplir la double

fonction d'identification et d'approbation susvisée. La liberté serait ainsi laissée

111 Pour autant qu'un certificat délivré par une autorité de certification confirme que la clé publique appartient

réellement à l'émetteur.

112 Les experts considèrent que les crypto systèmes les plus performants, sont pratiquement inviolables et capables de résister à toutes les attaques.

aux parties de choisir entre elles le signe susceptible de répondre à de telles

exigences.

113 A l'exclusion de toute opération purement automatique.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle