II. Les contraintes à tenir tout en gardant sa
place sur le marché
La différence avec les chaînes de
télévision privées n'apporte pas que
des avantages dans la différenciation auprès des
téléspectateurs. Appartenir à
ce système public sous entend également des
contraintes. A régime spécial,
contraintes spéciales...
2.1 Le devoir de moralité du service public
Le fait d'être une chaîne de service public implique
de porter
particulièrement attention à ce qui est
diffusé à l'antenne. Rémi Festa le
rappelle : « être une chaîne de service public,
c'est plaire à tous les publics... ».
En conséquence, il faut pouvoir être accessible
à tous, et ne pas choquer...
2.1.1 Etre un organisme public, obligation d'exigence
Nous l'avons vu plus haut, être un organisme public permet
à France
Télévisions d'avoir des bases solides, que ce soit
dans l'histoire ou à son entrée
sur le marché, une fois privatisé.
Néanmoins, la demande de tous les publics à
l'égard des trois chaînes hertziennes n'en est que
plus forte. En effet, si la
chaîne veut conquérir le maximum de personnes, elle
doit satisfaire aux
exigences de certains publics sans se compromettre auprès
d'autres... Et pour
cela, elle doit équilibrer les programmes qu'elle diffuse
pour s'assurer une
différence par rapport aux autres chaînes
privées, tout en ne faisant pas « fuir »
d'autres téléspectateurs qui ne se sentent pas
compris par la chaîne. En
résumé, plus le public est large (et donc
conçu de plusieurs segmentations de
cibles...) plus les critères simultanés auxquels
doivent répondre les produits
télévisuels proposés sont nombreux et
difficile à tenir... Une chaîne privée
comme M6 par exemple, si elle cible en fin d'après midi
les jeunes de 15 à 25
ans, va diffuser des vidéos clips par exemple. En
revanche, France 2, elle, ne
pourra as s'engager sur ce même chemin, et ce pour deux
raisons :
premièrement, elle ne souhaite pas faire partie du
commerce musical, en
enchaînant en boucle les chansons de stars
déjà internationalement connues
et qui n'ont pas besoin de promotion... (A ce titre, elle
préfère instaurer un mini
programme comme « CD'aujourd'hui », qui fait
découvrir la culture musicale
alternative ou les révélations). Et
deuxièmement, c'est un programme trop
ciblé pour satisfaire ne serait ce qu'une majorité
de cette cible jeune. D'où la
difficulté de vouloir concurrencer les chaînes
privées tout en ayant en tête que
l'on est une chaîne publique !
De plus, l'exigence a deux sources : le public et le Conseil
Supérieur de
l'Audiovisuel (CSA). Dans le cas du public, il est dans l'esprit
général que
France 2, France 3 et France 5 doivent être
irréprochables. L'exigence est
d'autant plus lourde que ce sont des chaînes
financées par la redevance, en
conséquence (le raccourci est vite fait dans la tête
de chaque français)
chacun paye la télévision publique. Résultat
: chaque personne du grand
public se sent concernée et est en attente de ce qui passe
sur chacune des
trois chaînes « puisqu'elle a payé ». Cela
explique d'ailleurs pourquoi, à la
moindre erreur d'un journaliste sur France 2, ou à
l'apparition d'une animatrice
sur France 3 au chemisier un peu décolleté (citons
l'exemple de Mireille Dumas,
dans son émission « Vie privée, Vie Publique
»), les courriers « pleuvent » dans les
services de France Télévisions. En ce qui concerne
le CSA en revanche, la
vigilance est bien évidemment beaucoup plus formelle et
réglementée.
Le CSA est il plus exigeant avec les chaînes de service
public qu'il ne
l'est avec les chaînes privées ? « Oui,
répond Rémi Festa, la relation est
différente car les demandes d'engagement sont plus fortes
» « Un écart est
moins bien toléré que s'il s'était
passé sur TF1 ou M6 »8. En fait, cette moins
grande tolérance peut s'expliquer ainsi : France 2, France
3 et France 5 doivent
montrer l'exemple... à deux niveaux. Non seulement elles
doivent être
exemplaires en matière de qualité des programmes,
de l'information, de
diversité culturelle et valeurs, mais elles doivent aussi
servir d'exemple si une
erreur est commise, pour montrer aux chaînes privées
qu'elles doivent aussi
faire attention à ce qui se passe sur leur antenne et
qu'elles aussi peuvent se
retrouver à la place de l'une ou l'autre des chaînes
publiques.
8 Interview avec Rémi Festa, Directeur des Etudes de
France Télévisions Holding, réalisée le 8 mars
2005, voir annexe 2.
C'est à travers tous ces types d'exigence que l'on peut
dire que
dépendre de la redevance est une contrainte. La pression
exercée et la
vigilance permanente ne permettent pas toujours à France 2
par exemple
d'avoir tous les moyens pour se mettre à niveau de TF1 et
réussir à la
concurrencer avec force. Des moyens comme les sujets
abordés. Pour être
grand public, une chaîne ne doit pas diffuser certains
programmes, ou afficher
certains discours, afin de ne pas choquer ou de plaire à
une majorité de
personnes.
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