2.1.2 Des sujets tabous
Ce problème d'exigence sur lequel nous nous sommes
penchés
entraîne une sélection sévère des
programmes diffusés, et par conséquent un
choix très restreint. Est ce que les sujets qui sont
déterminés par les trois
différentes chaînes publiques comme étant
« inabordables » ou
nécessairement évités, représentent
une perte de points d'audience ? Nous
pouvons répondre par l'affirmative. Certes, les
chaînes de France Télévisions
font tout ce qu'elles peuvent pour diffuser des programmes
variés, pour tous les
publics, afin de pouvoir conquérir le maximum de
téléspectateurs. Néanmoins,
il existe des types d'émissions ou de thèmes qui ne
sont pas abordés.
Dans le type d'émission, on peut citer les concepts de
real TV. Dès que
ce genre de programmes est apparu en France, et que les
chaînes privées se
sont précipitées pour acheter les concepts de
différentes émissions comme Big
Brother, version originale de Loft Story, Marc Tessier (voir
Figure 1), Président de France télévisions a
immédiatement
refusé d'adhérer à ce genre de programmes.
Cette prise de
position a provoqué de gros débats en interne, car
tout le
personnel du groupe a craint de rater un virage dans le
développement de la télévision, et de «
couler » devant la
concurrence privée. Effectivement, durant les
émissions comme Loft Story, qui
eu un énorme succès d'audimat en 2001, et la «
Star Academy », qui sévit
encore de nos jours sur les écrans au bout de la
quatrième édition, pour ne
Zone de Texte: Figure 1
citer que deux exemples, les chaînes publiques n'ont pas
connu d'aussi bons
résultats. Du moins dans un premier temps... Cependant,
c'était un choix
stratégique fort, car cela a permit, clairement, de
différencier l'audiovisuel
public de l'audiovisuel privé. A une période qui
pose la question de savoir si ces
émissions de real tv ne sont pas un manque de respect et
une décadence de
la télévision, le groupe a eu la bonne
réaction de différenciation et de
positionnement, même si cela lui a coûté une
occasion ratée de gagner en
téléspectateur durant le prime time. En revanche,
à long terme, le choix de
refuser la real tv s'est révélée être
bénéfique : non seulement le nombre de
téléspectateurs « perdus » lors des
soirées « Loft Story » s'est affirmé n'être pas
si
conséquent que cela (ça n'a pas porté
préjudice à long terme sur les
audiences des chaînes publiques, sans doute aussi parce que
le choix de
regarder une émission comme celle là est devenue
très vite politique et moral,
et que les gens se sont peu à peu divisés en deux
camps), mais aussi parce
qu'à long terme, les chaînes de France
Télévisions ont gagné en respect et
reconnaissance de leurs valeurs : le grand public a salué
l'effort du groupe de
ne pas s'être laissé emporté dans la vague du
moment et d'avoir revendiqué
haut et fort son choix de non diffusion de ces programmes
à débat.
Puis, à côté de ce genre d'émission,
nous avons les sujets difficiles à
traiter sur une chaîne privée, tant comme
éventuels sujets d'émission, que
comme catégorie de programmes. A classer dans ces «
nécessités de
prudence » : tous les sujets violents, sur le plan physique
et/ou psychologique,
ou immoraux. Exit donc tous les films d'horreur, pour adultes, ou
les déclarations
à polémique comme celle de Patrick Le Lay, en 2003,
sur sa mission de
« vendre de l'espace de cerveau disponible »...Ce n'est
pas sur une chaîne de
France Télévisions que l'on trouvera tout
ça. Des thèmes violents ou polémiques
peuvent avoir de bons scores d'audience, en films ou
émissions. Citons comme
exemples « La Méthode Cauet », sur TF1, le film
érotique hebdomadaire sur M6,
Loft Story également sur M6... Par contrainte morale (de
« service public »
comme on pourrait lire dans les presse qui le cite souvent sans
jamais préciser
clairement ce que c'est), France 2, France 3 et France 5 ne
peuvent s'engager
sur ce chemin. Pour preuve, cette phrase tirée de la
charte de
: « elles (les chaînes de service public) conservent
le souci d'éviter
toute vulgarité ». Paradoxalement, elles ripostent en
tentant des émissions
débats s'en approchant légèrement : le ton
particulier de Marc Olivier Fogiel
dans « On ne peut pas plaire à tout le monde »
qui frôle l'irrespect sur France 3,
le thème du libertinage dans une émission de Jean
Luc Delarue « Ca se
discute » sur France 2... L'exception se trouve sans doute
sur France 5, où
aucun risque de dérapage sur des sujets aussi
délicats n'est possible. Peut être
est ce à venir... D'où les difficultés des
trois chaînes publiques : comment réussir
à se positionner toujours sur le juste milieu entre
contrainte morale et tentation
de traiter des sujets qui, c'est certain, sont facteurs de bonnes
audiences, sans
être évidemment repris par le Conseil
Supérieur de l'Audiovisuel...
l'antenne9
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