Conclusion §2.
72.- Si l'on considère le droit de
propriété comme un pouvoir exclusif sur une chose, alors dans
cette perspective la chose contrefaite peut faire l'objet d'un droit de
propriété. Le propriétaire n'aura que la
propriété de la corporalité de la chose, mais n'aura pas
le pouvoir d'engager le bien dans un rapport juridique. La chose contrefaite
sera donc indisponible puisque son maître ne peut l'engager dans un acte
juridique. La règle de police de l'objet tirée de l'article 1128
du Code civil confirme cette approche. L'article vise avant tout des choses
appropriées pour lesquelles le droit, à titre exceptionnel,
restreint certains pouvoirs liés à leur propriété,
en empêchant d'en disposer.
120. Civ 1ere 3 nov. 2004, n°02-10880 ,Bulletin 2004 I
N° 237 p. 199 « la cour d'appel après avoir souverainement
établi que la cause de l'engagement souscrit était en
réalité l'investiture du candidat par l'association et l'exercice
des fonctions électives sous son étiquette, a retenu à bon
droit qu'une telle cause était illicite comme portant sur un objet hors
commerce»
121. Com 16 mai 2006 N° de pourvoi: 04-19785
(publié au bull) Le chainage de la Cour de cassation renvoie à
l'arrêt rendu sur la chose contrefait: Chambre commerciale, 2003-09-24,
Bulletin 2003, IV, n° 147, p. 166 (cassation)
47
Conclusion chapitre II.
73.- La patrimonialité de la chose
contrefaite entendue dans son sens le moins juridique, c'est-à-dire au
sens de la pécuniarité, est inexistante sauf rares exceptions.
Dépourvue de marché licite, la chose contrefaite ne peut avoir
une quelconque valeur marchande. En revanche, elle peut faire l'objet d'une
évaluation délicate dans un cadre indemnitaire.
L' absence de valeur ne signifie pas pour autant que la chose
contrefaite est hors patrimoine. La chose contrefaite n'est pas exclue de la
sphère de la patrimonialité prise dans son sens le plus juridique
(caractère de ce qui est dans le patrimoine). Elle peut faire l'objet
d'un droit de propriété valable mais ce droit est contenu par
l'interdit qui est fait à son propriétaire d'en disposer. Cette
interdiction se fait au moyen de l'extracommercialité qui limite la
circulation juridique du bien. En d'autres termes, la chose contrefaite est
dans le patrimoine du propriétaire mais n'est pas disponible. Elle a
donc un statut particulier qui lui permet d'échapper au
prérogatives des créanciers. En ce sens
l'extracommercialité ne se distingue pas de l'indisponibilité.
Cette propriété de la chose contrefaisante a des implications,
notamment en matière de responsabilité du propriétaire
gardien présumé de la chose.
L'utilité technique et normative de l'article 1128 du
Code civil en tant qu'instrument de police contractuelle confirme cette
approche.
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