1.1.1. Vision des hôteliers
La vision des professionnels de l'hôtellerie ne
diffère pas du reste de la so-
ciété. C'est-à-dire que pour eux la personne
sourde incarne un individu diffèrent des
autres avec une déficience à traiter. Ainsi dans
leur vision, un sourd est un individu
qui appartient à une communauté sociale en
minorité qui est capable dans la majorité
des cas d'oraliser et lire sur les lèvres.
« Il est à noter que ces préoccupations
pécuniaires Ð comme
l'installation des dispositifs nécessaires Ð
s'ajoutent à la ques-
tion de la fréquentation. Cela dit, si la
fréquentation des
sourds profond, dans un établissement hôtelier
n'arrive
qu'«une fois par an », la prise en compte de cette
clientèle
dans les investissements de services et dispositifs est alors
peu
intéressante puisqu'elle n'augmente pas le chiffre
d'affaires. »
(Lavassani, 2019)
Ainsi puisque la fréquentation des sourds dans les
hôtels est rarement aper-
çue, son accueil devra se faire de
préférence avec le minimum de coûts et d'efforts,
autant plus que les sourds savent « normaliser » leurs
relations avec les autres.
1.1.2. Freins à une meilleure
accessibilité
La mauvaise compréhension des hôteliers de la
surdité conjointe à une vision
erronée de la surdité dans les hôtels
complique la voie d'une accessibilité égale et
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équitable. Ainsi cela suscite des malaises chez les sourds
et provoque des freins sur
la voie de leur accès optimal aux services
hôteliers.
Notre étude nous avait révélé que la
personne sourde s'adapte constamment
pour communiquer ou pour demander un service. Une carence dans
tous ce qui est
accès à l'information spécifique de
l'établissement d'accueil ne nous a pas étonné.
C'est-à-dire que raccourcir toutes les informations aux
quelques mots et quelques
phrases écrites sur un bout de papier, là où
des livrets d'accueil illustrés ou des vidéo
explicatives préenregistrées en LSF n'est pas
possible, beaucoup d'informations sur
notamment des offres périodiques échappent aux
clients sourds. De la même façon,
une lacune d'accès facile aux services, pour lesquels il
faut pouvoir appeler par télé-
phone ou attendre et entendre qu'on toque à la porte de la
chambre, rendent le séjour
peu agréable.
Pour exemple, une commande de room service, une demande de
serviette
dans la chambre, un signalement d'un fuite d'eau dans la chambre,
une demande d'un
réveil ou d'un départ tardif à minuit etc.,
obligera le client sourd à se déplacer à l'ac-
cueil. Il sera alors obligé d'écrire sur un bout de
papier ou taper sa sollicitation sur
son téléphone pour montrer aux personnels, et il
devra ensuite attendre qu'ils lui ré-
pondent ou qu'on lui rend le service :
« fÉ] je vais donner un exemple et vous parler
d'une vraie
expérience. Par exemple si j'ai besoin d'un service ou
une
chose particulière par exemple une serviette si je
suis dans la
chambre et que je vois qu'il y a une chose qui manque
c'est
toujours à moi de descendre à la
réception pour le demander
car je ne peux pas téléphoner ou communiquer
avec la récep-
tion. Puis à la réception, pour me donner la
serviette il y'a
toujours deux cas : soit la personne me demande d'attendre
à
la réception pour aller chercher la serviette, et me
la donner
directement à la réception. Pour ça je
dois attendre longtemps.
Deuxième cas c'est lorsque le réceptionniste me
demande de
retourner dans ma chambre pour me le monter dans « 10
mi-
nutes » comme ils disent toujours. Mais s'il toc
à la porte moi
je n'entends pas donc je suis obligé à laisser
la porte ouverte
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jusqu'à ce qu'il revient. Et cela, ces 10 minutes
parfois durent
beaucoup plus de temps. »
(Lavassani, 2019, Transcription d'entretien avec le sourd 2,
p.71)
De ce fait, nous comprenons mieux que certaines mesures
suggérées dans les
critères d'accessibilité touristique et cadre
bâti des établissements de services,
comme l'installation des amplificateurs du son pour les
malentendants, ainsi que les
investissements mis en action pour financer cela, ne
résolvent pas les problématiques
de l'accessibilité des sourds.
La surdité est un blocage soudain de communication
(Kerbourc'h, 2010) entre
tous les deux parties d'intervenants, c'est-à-dire les
clients sourds et les personnels
entendants de l'hôtel. Néanmoins, dans un rapport
égal et éthique, aucune de ces
parties d'intervenants ne devra essayer de dominer l'autre en lui
imposant des sur
effort pour une adaptation à autrui. Toutefois, de nos
jours grâce aux NTIC ceci est
réalisable sous forme de facilitateurs techniques et
technologiques de l'accessibilité :
« [...] Nous [les sourds] attendons qu'en France, les
hôtels de
moyen gamme avec les prix raisonnables, utilisent plus
les
nouvelles technologies pour nous accueillir. Les hôtels
de luxe
et très cher s'ils proposent des services
adaptés on y va rare-
ment bien sûr. [...] Je pense que c'est vraiment
dommage que
dans les hôtels en France on fait moins d'effort que
dans
d'autres pays hors l'Europe comme les États-Unis.
Là-bas
l'anglais c'est leur langue d'origine et les clients
d'habitude
savent cette langue, donc nous les sourds nous
attendons
moins d'effort de leur part mais on voit qu'ils font plus
d'effort
à communiquer, à m»mer, à
même utiliser les nouvelles tech-
nologies dans les hôtels de milieu de gamme, là
où les sourds
fréquentent encore plus. »
(Lavassani, 2019, Transcription d'entretien avec le sourd 2,
p.72-73)
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