B- Les limites de l'action en recouvrement
Les principes qui sous-tendent l'action en recouvrement visent
à garantir le paiement de la créance publique. Ces principes
n'ont, cependant, pas une portée absolue. Dans le but de garantir une
protection juridique aux contribuables, ces principes font l'objet d'une
limitation. C'est ainsi que l'action en recouvrement est limitée par le
jeu de la prescription, l'opposition aux poursuites et la responsabilité
du comptable public. La prescription constitue une limitation de l'action en
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impôts directs au Sénégal et au Congo. GALAM
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recouvrement, alors que l'opposition et la mise en jeu de la
responsabilité du comptable public sont des limites aux actes de
recouvrement.
- La prescription de l'action en
recouvrement
La prescription de l'action en recouvrement renvoie à
la prescription extinctive. Elle a pour effet de libérer un
débiteur d'une obligation au terme d'un certain délai durant
lequel le créancier s'est abstenu d'agir. L'article 218 du Code des
obligations civiles et commerciales précise que l'inaction du
créancier pendant le délai fixé pour la prescription
extinctrice libère le débiteur de son obligation.
- Les modalités d'exercice de la
prescription
La prescription de l'action en recouvrement fait
échapper, les créances publiques et les personnes qui sont dans
son champ d'application, aux poursuites. Il se peut également que le
délai de prescription soit modifié.
- Le champ d'application du délai
Tout d'abord, il y a lieu de préciser la notion de
délai de prescription. Il faut ensuite déterminer les
créances et les personnes pouvant bénéficier de la
prescription.
- Le délai de prescription
Appliquée à l'action en recouvrement de
l'impôt, la notion de prescription extinctive, qui est un mode
d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant
un certain laps de temps a pour corollaire une notion de délai. Il
s'agit d'un espace de temps à l'écoulement duquel s'attache un
effet de droit. La longueur de cet espace de temps, essentiellement variable,
est appelée « délai ». Il comporte un point de
départ et une échéance. A défaut d'action du
comptable public pendant un certain délai fixé par la loi,
celui-ci perd son droit d'agir contre un débiteur qui se trouve
libéré de son obligation de paiement.
Dans le domaine fiscal, il convient de distinguer le
délai de prescription de l'action en répétition du
délai de prescription de l'action en recouvrement. Le délai de
prescription de l'action en répétition ou prescription d'assiette
est celui pendant lequel l'Administration peut établir ou constater
l'existence d'une dette fiscale constituée par 1impôt en principal
et
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éventuellement une imposition complémentaire ou
des pénalités fiscales. Tandis que le délai de
prescription de l'action en recouvrement est celui pendant lequel le
créancier peut poursuivre le recouvrement forcé de ces
impositions ou pénalités. La déchéance du droit
d'exercer l'action en recouvrement doit être distinguée de celle
du droit de reprise, faculté ouverte à l'Administration de
réparer les omissions ou insuffisances d'imposition dans un délai
légal, à l'expiration duquel le service n'est plus en droit, en
raison de la prescription, d'établir une imposition.
Aux termes de l'article 646 du Code général des
impôts sénégalais, le délai de prescription de
l'action en recouvrement est de 10 ans à compter de la date de
notification au redevable du titre de perception ou du dépôt, par
lui, du titre ou de la déclaration non soldée à
l'échéance. Ce délai est de 5 ans, à partir du jour
de la mise en recouvrement du rôle pour les impôts directs et taxes
assimilées. Tandis que l'article 382 du Code général des
impôts congolais se limite à la quatrième année
suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due. L'article 218 du Code
des obligations civiles et commerciales précise que le délai pour
la prescription extinctrice court à compter du lendemain du jour
où l'obligation est exigible. Il expire au jour d'anniversaire,
même férié.
Le délai de prescription de l'action en recouvrement
pour le cas du Sénégal parait assez lent tandis que celui du
Congo est si court.
Dès lors, le comptable public compétent qui n'a
exercé aucune poursuite dans ces délais perd son recours et est
déchu de tous droits et de toute action contre le redevable
défaillant. Il devient responsable de l'entière
réalisation des titres ou rôles dont il a la charge. Le
délai de prescription de l'action en recouvrement peut se combiner avec
des délais de prescription inhérents aux actions civiles ou
pénales engagées par les comptables. Le délai à
retenir est celui qui prend fin le premier.
- Les sommes soumises à prescription
L'étendue de la prescription des impôts
perçus par voie de rôle est la même pour chaque article du
rôle considéré isolément et non pour l'ensemble des
impôts dus au titre d'une année. La formule exécutoire
collective portée sur un rôle vaut pour l'ensemble des impositions
y afférentes. Les majorations pour défaut de paiement à
échéance et les frais de poursuite suivent en matière de
prescription, le régime des droits visés dans les rôles.
S'agissant des impôts faisant l'objet d'un titre de
perception, la Prescription s'applique à toutes les sommes
portées sur ce titre et uniquement à celles-ci. Les
pénalités de retard, compte
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tenu de leur nature, ne peuvent pas être
liquidées et mises en recouvrement en même temps que les droits
auxquels elles se rapportent.
- Les personnes concernées par la
prescription
Tout comptable public, sur la base d'un titre
exécutoire, est fondé à poursuivre le recouvrement de ses
créances auprès des débiteurs au paiement des impositions.
Lorsque le comptable poursuit le recouvrement d'une créance à
l'égard de débiteurs tenus conjointement ou solidairement au
paiement de celle-ci, il notifie préalablement à chacun d'eux un
titre de perception. En cas de pluralité de débiteurs, la
prescription de l'action en recouvrement est affectée par les
règles qui gouvernent la notification de titres exécutoires,
déterminées en fonction de la nature de l'obligation : conjointe,
solidaire.
En cas d'obligation conjointe où les codébiteurs
tenus chacun pour une part de la créance fiscale, chaque titre de
perception a pour effet d'interrompre le délai de reprise à
l'égard de chaque débiteur séparément et à
concurrence du montant figurant sur le titre concerné. Chaque titre fait
courir le délai de prescription de l'action en recouvrement de
manière indépendante pour chaque débiteur,
En cas d'obligation solidaire, la dette réclamée
au codébiteur solidaire est identique, dans sa nature et son montant,
à celle mise à la charge du débiteur principal. Le titre
de perception émis à l'encontre du débiteur initialement
recherché en paiement interrompt le délai de reprise à
l'égard de tous et y substitue également à l'égard
de tous, la prescription de l'action en recouvrement. Par conséquent,
les titres émis par la suite ne peuvent lancer de nouveaux délais
de prescription et ne constituent pas davantage des actes de poursuite
susceptibles d'interrompre la prescription en cours.
Cependant, un acte interruptif de prescription
délivré à l'un des débiteurs solidaires interrompt
le délai de prescription contre l'autre. Ce lien de solidarité
concerne, par exemple, les héritiers pour les droits de mutation
à titre gratuit. Il concerne également la caution : le
règlement auquel renvoie expressément 1'acte de cautionnement
prévoit en effet que la caution s'oblige solidairement avec le redevable
et renonce en conséquence au bénéfice de discussion.
- La responsabilité du comptable
public
Les titres exécutoires représentent des
documents juridiques formels sur lesquels sont inscrites les recettes à
prendre en charge et à recouvrer. La prise en charge d'une recette ou
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d'une dépense, c'est l'enregistrement comptable
exhaustif des informations financières contenues dans le document
transmis par l'ordonnateur de cette recette ou cette dépense. En
matière de recettes, la prise en charge correspond à
l'acceptation par le responsable du recouvrement des titres exécutoires
et des renseignements qui y sont contenus mais surtout à son engagement
à apurer ces titres.
Le comptable public prend sous sa responsabilité
personnelle et pécuniaire le recouvrement des titres exécutoires
mis en recouvrement ou à en justifier valablement le non-recouvrement.
C'est sous ce rapport que sa responsabilité est mise en cause. Dans
l'hypothèse où la recette ne serait pas recouvrée dans le
délai prescrit ou la dépense ne serait pas payée dans les
conditions légales et règlementaires, le comptable serait
responsable sur ses propres biens.
Le comptable public dont la responsabilité est
engagée, a l'obligation de verser, de ses deniers personnels, une somme
égale soit au montant du déficit ou manquant constaté, de
la perte de recette subie, de la dépense payée à tort ou
de l'indemnité mise, de son fait, à la charge de l'Etat ou de
tout autre organisme public.
En revanche, le comptable public n'est ni personnellement ni
pécuniairement responsable des erreurs commises dans l'assiette et la
liquidation des produits qu'il est chargé de recouvrer. Il n'est pas
tenu de déférer aux ordres irréguliers qui engagent sa
responsabilité personnelle et pécuniaire, sauf réquisition
émanant de l'ordonnateur principal.
La responsabilité pécuniaire du comptable public
est mise en jeu par une décision de débet de nature soit
administrative, soit juridictionnelle. Le débet administratif
résulte d'un arrêté du ministre chargé des Finances.
Le débet juridictionnel résulte d'un arrêt de la Cour des
comptes. Néanmoins, le comptable public peut obtenir une décharge
de responsabilité ou la remise gracieuse des sommes laissées
à sa charge.
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