Cadre institutionnel, aide publique au développement et développement socioéconomique et politique en Haïti de 2000 à 2011.par Smith Paul Université d'état d'Haïti - Licence en Administration Publique 2019 |
CHAPITRE ICADRE D'ANALYSEL'objectif de ce chapitre est de présenter d'abord le cadre théorique c'est-à-dire les diverses théories auxquelles circonscrit et oriente notre recherche à savoir la théorie de la bonne gouvernance, la théorie des choix publics ainsi que la théorie de la dépendance. Ensuite nous présenterons le cadre conceptuel de la recherche en nous efforçant de définir les concepts dominants selon le cadre d'analyse. Enfin nous tacherons de présenter la manière de faire pour parvenir aux données nous aidant d'atteindre notre objectif et la vérification de nos hypothèses, c'est-à-dire notre cadre méthodologique. 1.1.- CADRE THÉORIQUECe présent travail de recherche est contourné par trois théories nous permettant de comprendre la problématique de l'aide publique et ses répercussions sur Haïti à travers les institutions publiques ou régaliennes. Nous tacherons d'exposer l'essentiel. 1.1.1.- De la gouvernabilité à la bonne gouvernanceLes années 80-90 avaient vu déferler la « troisième vague de démocratisation10 », sous la forme d'une succession de processus de changements de régimes que l'on avait appelés transitions à la démocratie (Isabelle Lacroix et Pier-Olivier St-Arnaud, 2010). A. Venise Dubique, dans Les élections dans la transition démocratique en Haïti, a fait ressortir que cette vague de transitions de l'autoritarisme à la démocratie, qui a touché successivement les nouveaux pays industriels d'Europe du sud (1973-1978), d'Amérique latine et d'Asie de l'Est (1980-1988), les Etats communistes de l'Europe centrale et orientale et les pays en développement de l'Afrique (19891995), a provoqué la chute de nombre de gouvernements dictatoriaux, qui sont remplacés par des gouvernements de facto. Dans cette circonstance, les sociétés connaissent, pour reprendre l'expression de F. Renée (2010), des crises polymorphes. Ces crises ont provoqué de profondes mutations dans l'univers sociopolitique aussi bien qu'académique. Ainsi apparait alors un nouveau concept : la gouvernabilité qui a été remis en vogue dans les années 70, appelle le concept opposé d'ingouvernabilité : il fait référence au pouvoir ou non pouvoir, à capacité quasi 7 physique de gouverner c'est-à-dire d'imposer des actions politiques à l'ensemble de la société. S'il y a un manque de consensus ou remise en cause de la légitimité du pouvoir aux yeux d'une fraction estimée décisive de la société (soit parce qu'elle représente la majorité soit par elle est considérée comme dangereuse), le spectre de l'ingouvernabilité apparaît ; autrement dit, cette gouvernabilité correspond en miroir à la capacité du peuple à accepter d'être gouverné. Cette définition de la gouvernabilité enclenche automatiquement soit la problématique de la prétendue faiblesse de la démocratie politique et justifie le coup d'État, soit la problématique de la persuasion, de la capacité à convaincre et à séduire les masses, voire à les tromper de la part des politiques et rejoint d'une certaine façon la deuxième acception du terme. Le deuxième sens, d'usage plus récent, se réfère en effet à la capacité à gouverner non plus du point de vue du pouvoir de la force et/ou de la persuasion, mais quant au savoir gouverner et au vouloir gouverner. Bartoli (1999)11 définit la gouvernabilité dans ce même sens, c'est-à-dire comme la capacité d'un Etat à maîtriser la gestion des politiques nationales et internationales dans un souci de cohésion sociale et d'intérêt général. Cette définition fait glisser l'idée de gouvernabilité vers celui de gouvernance : savoir-faire et faire savoir afin, à la fois de mettre en oeuvre les bonnes politiques, et de les faire accepter par la population. De là, on passe aisément du concept de gouvernabilité à celui de [bonne] gouvernance. L'utilisation d'une pluralité de discipline du concept de la gouvernance ainsi que sa présentation dans « toutes les sauces », pour reprendre l'expression de Isabelle Lacroix et Pier-Olivier St Arnaud, fait d'elle un concept multiforme (D. Brunelle, 2010) et toute tentative de définition présente un défi certain. D'ailleurs c'est une question à laquelle se sont intéressés les chercheurs de différents domaines allant des sciences sociales aux sciences politiques en passant par les législateurs et les institutions internationales comme la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International (D. Bakkour, 2013). La Banque mondiale offre une définition large de ce concept : « Nous définissons la gouvernance comme étant l'ensemble des traditions et institutions par lesquelles le pouvoir s'exerce dans un pays avec pour objectif le bien de tous12 ». Pour la Commission Européenne, la « La notion de "gouvernance" désigne les règles, les processus et les comportements qui 11 Cité par A. Beaulière, B. Paul, S. Ouedraogo, L'inefficacité de l'Aide Publique au Développement à Haïti de 1980 à 2010 : une analyse en termes de gouvernabilité, p10. 12 Banque Mondiale. « La gouvernance collaborative », Site de la Banque mondiale, [En ligne], http://www.worldbank.org/wbi/governance/fra/about-f.html#approach (Page consultée le 22 juillet 2014) 12 Par Isabelle Lacroix et Pier-Olivier St-Arnaud, « La gouvernance : tenter une définition », Cahiers de recherche en politique appliquée, Vol. IV, Numéro 3, Automne 2012, Université de Sherbrooke. 8 influent sur l'exercice des pouvoirs, particulièrement du point de vue de l'ouverture, de la participation, de la responsabilité, de l'efficacité et de la cohérence. Pour plusieurs organisations telles que l'Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE), s'ajoute la notion de « bonne gouvernance » qui renvoie plutôt à une prescription normative. Les organisations internationales utilisent celle-ci pour adopter des mesures d'intervention et de financement auprès des pays en développement se conformant aux critères s'y référant12. La « bonne gouvernance » inclut souvent les critères suivants : présence d'un État de droit, absence de corruption, équité, responsabilité, imputabilité, efficacité, transparence, participation. L'introduction de la gouvernance démocratique dans l'agenda des bailleurs de fonds bilatéraux n'est pas fortuite. Elle est étroitement liée aux phénomènes politiques qui marquent le début de la décennie 1990. La bonne gouvernance nous enseigne de mettre en oeuvre un processus de décision collectif qui n'implique pas une situation d'autorité de la part d'un des acteurs. Les mécanismes de gouvernance reviennent, de fait, à prescrire la formalisation des institutions et à leur application universelle. Elle n'est pas une fin en soi, mais plutôt une approche déontologique, voire un ensemble de pratiques qui permettent à une organisation d'atteindre ses objectifs dans un contexte de risque grandissant (D. Bakkour, 2013, p.36). Et pour accomplir son objectif ou sa vocation théorique, la gouvernance nécessite comme instrument des institutions fortes, une administration capable de répondre aux exigences sociales. Le caractère institutionnel de la gouvernance induit un ensemble de paramètres selon lesquels on évalue la gouvernance d'un pays. Ces paramètres sont issus de la synthèse des notions de participation, de gouvernance démocratique et enfin, d'efficacité économique et institutionnelle, la `bonne' gouvernance s'impose comme un nouveau modèle et prend, de ce fait, un sens particulier en économie du développement. Pour Bakkour (2013) les traits d'une bonne gouvernance se présentent dans l'existence d'un Etat de droit, la démocratie, l'exigence de la transparence ou la lutte contre la corruption qui occupe une place importante, la responsabilité des acteurs privés publics ainsi que la gestion participative ou la décentralisation. Précisent-ils dans cette perspective, Landell-Mills et Serageldin dès 199113 « Il est important de noter que la gouvernance consiste en deux dimensions distinctes mais finalement étroitement 13 Landell-Mills, P. Serageldin, I. 1992. « Governance and the External Factor. », Proceedings of the World Bank Annual Conférence on Development Economics 1991, Washington D.C., Banque mondiale, pp 303320 in POUILLAUDE, Agnès La `bonne' gouvernance, dernier né des modèles de développement. Aperçu de la Mauritanie, Centre d'économie du développement Université Montesquieu-Bordeaux IV - France. 14 Economiste américain, Buchanan a reçu le prix Nobel d'économie en 1986 pour sa contribution majeure dans l'élaboration de la théorie des choix publics. 9 liées : l'une est politique (et a trait à l'engagement dans la bonne gouvernance), et l'autre est technique -- et a trait aux problèmes d'efficience et de management public. Sans l'engagement politique peu de choses peuvent être réalisées, même avec une administration publique efficace. Et sans une administration publique efficace, aucun gouvernement ne peut être effectif, si bienveillant qu'il soit ». |
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