3.4.- La situation socioéconomique du pays
1986-2000
Le Professeur Sauveur Pierre Etienne, dans L'invasion des
ONG en Haïti, a fait savoir que « n'importe quel étranger
arrivant en Haïti peut, dès ses premiers pas et au premier coup
d'oeil, se rendre compte qu'il s'agit d'un pays dont les structures sont
dramatiquement arriérées. Les statistiques officielles
disponibles sont - volontairement ou involontairement - faussées pour
masquer la gravité de la situation. Elles lui permettront, malgré
tout, de comprendre qu'une distance astronomique sépare
déjà Haïti de ses voisins les plus proches de la
Caraïbe, de l'Amérique centrale, des pays du Cône Sud et
surtout de L'Amérique du Nord. Le pays souffre en effet d'un
sous-développement chronique ; c'est d'ailleurs l'unique PMA du
continent américain, et ses structures reflètent tous les
symptômes, tous les critères, les caractéristiques
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ou caractères fondamentaux du
sous-développement63». Suite à une funeste
histoire marquée par le néocolonialisme et l'exploitation
indirecte, par une extension de l'économie de traite, après avoir
épuisé les ressources naturelles et agricoles du pays, par
l'exploitation de sa main-d'oeuvre, Haïti est un pays pionnier dans les
processus de sous-développement, et celui-ci est étroitement
lié à la problématique de la domination (N.
Baggioni-Lopez, sd, 63).
Pour mieux cerner et comprendre la situation
socioéconomique de la période, et la question de la
pauvreté chronique (voir tableau 1), nous allons nous
référer aux variables suivantes : sous-alimentation,
éducation, santé, migration et emploi, ....
Tableau 9 : Pauvreté et pauvreté
extrême en Haïti
Indice en nombre d'habitants
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Nombre d'habitants
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Extrêmement pauvres
(Moins de $1 dollar PPA / jour)
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Pauvres
(Moins de $2 dollars PPA/jr)
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Extrêmement pauvres
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Pauvres
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56%
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76 %
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4 450 000
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6 200 000
|
Source : Document de Stratégie Nationale pour la
Croissance et la Réduction de la Pauvreté (2008-2010),
p.32.
3.4.1.- L'alimentation
Le PIB par habitant est de 450 $ et 70 à 80 % des
habitants sont en dessous du seuil de pauvreté : 60 % des Haïtiens
vivent avec moins de 0,70 € par jour. La fréquence du rationnement
face au manque d'argent ou de nourriture ou l'insuffisance pondérale des
adultes montrent que la pauvreté touche d'abord l'essentiel : manger,
survivre. Ceci peut être expliqué en dépit du fait que
l'agriculture, base sur laquelle l'économie du pays a été
fondée, est en chute libre et constante. Au cours des années
1800, le secteur primaire, dominé par l'agriculture, représentait
environ 95% du PIB ; pourtant, de manière surprenante, ce secteur compte
pour moins de 25% du PIB en 2009 (IHSI, 2009). Ainsi, le peut ne peut plus
produire pour satisfaire même la demande interne puisqu''Haïti
doit importer 51 % de sa nourriture. Selon les statistiques officielles et
internationales, le déficit alimentaire chez le Haïtien est
exceptionnellement grave. En effet, sa consommation moyenne journalière
est de 1 900 calories et de 13 grammes de proteines3, contrairement aux
recommandations de la FAO qui sont de l'ordre de 2 200 calories et 55 grammes
de protéines pour une diète équilibrée. Sur la base
de ces données, le déficit alimentaire journalier chez Le
Haïtien est de 300 calories et 42 grammes de protéines (S. P.
Etienne, 2010). L'insécurité alimentaire se traduit par des taux
de malnutrition élevée,
63 Sauveur Pierre, Etienne, L'invasion des ONG en
Haïti, p114.
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notamment chez les enfants de moins de cinq ans : 23 % de ces
enfants souffrent de malnutrition chronique ; 5% de malnutrition aigüe et
17 % d'insuffisance pondérale (CCI, 2004).
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