2.5 Gouvernance et corruption dans les PED
La littérature concernant l'inefficacité de
l'aide publique octroyée au PED pour favoriser le développement
et les conduire sur la voie du développement ne manque pas (Catherine
Korachais32, 2010 ; Miriam Cue Rio33, 2013 ; Eckhard
Deutscher et Sara Fyson34, 2008 ; Marc-Antoine Perrouse de
Montclos35, 2005 ; Gérard Azoulay36,
2011). Le débat sur cette inefficacité de l'aide remonte au monde
de gestion et de gouvernance pratiquée par ces pays (Gérard
Azoulay, 2011 ; Eckhard Deutscher et Sara Fyson, 2008). Malgré
la constante augmentation des fonds alloues dans les pays au
développement, la situation de précarité, de
pauvreté, et de croissance économique sont restées
presqu'inchangées, surtout dans les pays les plus aides. A ce propos G.
Azoulay37 écrit : « Les préoccupations quant
à l'efficacité de l'aide en matière de croissance et de
réduction de la pauvreté se sont accrues du fait de son
échec dans les pays les
32 Catherine Korachais. Contribution de l'aide
publique au développement à l'amélioration de la
santé dans les pays en développement. Sciences de l'Homme et
Société. Université d'Auvergne - Clermont- Ferrand I,
2010, 257p.
33 Miriam Cue Rio. UNE APPROCHE DE L'AIDE PUBLIQUE
AU DÉVELOPPEMENT PAR LE BIAIS DE SES OBJECTIFS CHIFFRÉS : examen
de la définition des objectifs comme facteur explicatif de leur non
réalisation. Economies et finances. Université de
Versailles-Saint Quentin en Yvelines, 2013, 386p.
34 Eckhard Deutscher et Sara Fyson, »
Améliorer l'efficacité de l'aide », septembre 2008, 5p.
35 Marc-Antoine Perousse de Montclos, «
la face cachée de l'aide internationale » in Politique
internationale, no 107, Printemps 2005, 10p.
36 Gérard Azoulay, « Les nouvelles
formes de l'aide publique au développement et l'éventuel "retour
de l'État" dans les pays d'Afrique subsaharienne », Mondes en
développement 2011/1 (n°153), p. 57-70.
37 Gérard Azoulay, « Les nouvelles
formes de l'aide publique au développement et l'éventuel "retour
de l'État" dans les pays d'Afrique subsaharienne », Mondes en
développement 2011/1 (n°153), p. 59.
30
plus aidés, particulièrement ceux d'Afrique
subsaharienne. » Pour Certains auteurs, épousant notamment
l'approche classique et officielle de l'inefficacité de l'aide
après examen des principes directeurs des IFI et des principaux
bailleurs de fonds, l'inefficacité de l' aide est due à un
déficit de gouvernance, selon l'idée émise dans la
déclaration de Doha en décembre 2008 : « f...] la prise
en main et la maîtrise des stratégies de développement par
les pays et la bonne gouvernance sont des facteurs importants pour la
mobilisation efficace des ressources financières nationales et pour la
promotion d'une croissance économique soutenue et d'un
développement durable38». Voilà pourquoi
dans cette partie nous allons traiter la question de gouvernance dans le monde
en développement et nous mettrons emphase principalement sur la
corruption. Car il serait incomplet d'étudier les impacts de non
développement de l'aide à générer le
développement socioéconomique et politique des pays aidés
tout ignorant leur situation de gouvernance, étant pour les bailleurs de
fonds, la condition première.
2.5.1 Un Etat de droit fragile
L'état de droit trouve ses racines historiques dans la
pensée libérale qui répondait au pouvoir absolu
détenu par le roi ; depuis lors, il a été appliqué
de maintes manières, dans les systèmes juridiques ainsi que dans
les contextes économiques et politiques les plus divers (DDC, 2008).
Depuis les années 90, avec la vulgarisation du concept de bonne
gouvernance, le concept Etat de droit fait l'objet d'une très vaste
littérature. Pourtant, aucune définition lui est attribuée
qui soit internationalement acceptée. De leur coté, les Nations
Unies ont tenté de le définir ainsi :
« Il désigne un principe de gouvernance en vertu
duquel l'ensemble des individus, des institutions et des entités
publiques et privées, y compris l'Etat lui-même, ont
répondu a l'observation de lois promulguées publiquement,
appliquées de façon identique pour tous et administrés de
manière indépendante, et compatibles avec les règles et
normes internationales en matière de droits de l'homme. Il implique,
d'autre part, des mesures propres à assurer le respect des principes de
la primauté du droit, de l'égalité devant la loi, de la
responsabilité au regard de la loi, de l'équité dans
l'application de la loi, de la séparation des pouvoirs, de la
participation à la prise de décisions, de la
sécurité juridique, du refus de l'arbitraire et de la
transparence des procédures et des processus
législatifs39. »
38 Déclaration de Doha : Conférence
internationale de suivi sur le financement du développement,
chargée d'examiner la mise en oeuvre du Consensus de Monterrey, Doha
(Qatar) 29 novembre-2 décembre 2008.
39 Rapport du Secrétaire
général sur l'état de droit et la justice transitionnelle
dans les sociétés en proie à un conflit ou sortant d'un
conflit (S/2004/616), par. 6, cité et reproduit par Nations Unies,
Indicateurs de l'Etat de droit des Nations Unies, Juin 2012, New York,
p. vii.
31
Cette définition de l'Etat de droit par les NU contient
un ensemble d'indicateurs considérés pour parler d'état de
droit. Et à partir de cette définition, nous pouvons donc
conclure qu'un Etat de droit est un Etat qui respect les lois et qui les fait
respecter. Ce qui fait que l'Etat de droit est un des indicateurs clés
de la Bonne gouvernance (DDC, 2008, p.5), qui met emphase tant sur les acteurs
que les institutions qui tous les Etats du monde sont censés
adoptés afin d'enrôler dans le plein du processus
démocratique. Pourtant, dans les pays de l'Afrique de l'ouest, comme l'a
fait remarquer Losseni Cisse (2009, p34), les questions liées aux droits
de l'homme qui constituent une composante essentielle de l'Etat de droit, sont
souvent bafouées. Dans plusieurs pays en développement (tel
Afghanistan, Irak etc) on parle désormais d'Etat fragile, Etat en
faillite ou même d'Entité chaotique ingouvernable. Pour
l'ODCE, « un Etat est fragile lorsque son gouvernement et ses
structures étatiques n'ont pas la capacité ou dans un certains
cas la volonté politique d'assurer la sureté et la
sécurité du public, la bonne gouvernance et la réduction
de la pauvreté de ses citoyens40. » Ces Etats se
trouvent géographiquement en lieu et place des Etats en
développement : Afrique, Asie [Moyen-Orient], Amérique Latine
et Haïti.
Dans un article paru en avril 1999 dans Le monde
diplomatique41, il est écrit : « dans beaucoup de
pays pauvres, [le monde en développement], le nombre de territoire
gagnés par la violence ne cesse d'augmenter. En Afrique, en
Amérique Latine, en Asie, des conflits s'éternisent... l'Etat
s'effondre partout, abandonnant les populations à l'hyperviolence. Ainsi
prolifèrent les entités chaotiques ingouvernables. »
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