Section 2 : L'instauration de nouvelles institutions
plus consensuelles
Les impératifs de développement et de
crédibilité de la justice pénale béninoise tendent
à exiger l'agrandissement des fenêtres de procédures
négociées, tributaires de la volonté du délinquant
et donc consensuelles ouvertes par le législateur. Cela suscitera, sans
doute, la prise en compte de nombres de procédures tant alternatives
à la poursuite classique (Paragraphe 1), que favorables
à la réinsertion du délinquant (Paragraphe
2).
Paragraphe 1 : l'instauration de nouvelles mesures
consensuelles
A l'exemple de la France, l'introduction de l'idée de
négociation en procédure pénale s'est concrètement
illustrée par la création de deux institutions majeures
taxées par la doctrine de nouvelles modes de transaction287.
En effet, par ces modes, le procureur de la République dont les pouvoirs
semblent désormais très étendus, a la possibilité
de proposer une peine au délinquant, qui dès acceptation,
pourrait éteindre l'action publique288. Il s'agit, de ce
fait, de la composition pénale289 (A) et la
comparution sur reconnaissance préalable de
285 DARSONVILLE (A.), « la légalisation de la
correctionnalisation judiciaire », Revue Droit Pénal, Mars
2007, Etude, pp. 7-9.
286 PRADEL (J.), op. cit. p. 111.
287 JOSEPH-RATINEAU (Y.), La privatisation de la sanction
pénale, op. cit. p. 345.
288 Ibidem
289 Instaurée par la loi française n°
99-515 du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la
procédure pénale, JO, 24 juin 1999, p. 9247.
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culpabilité290 (B),
impliquant toutes deux, un renforcement des pouvoirs du parquet au-delà
de la simple faculté de poursuivre ou de ne pas poursuivre.
A) Le consentement du délinquant à la
composition pénale
Alternative aux poursuites pour certains
auteurs291, poursuite alternative ou encore action a fin publique
pour d'autres292, la composition pénale est une
procédure dont le champ d'application (1) et le fonctionnement (2)
contribueront à délimiter nature controversée.
1- Le champ d'application de la composition pénale
Par l'entremise d'une circulaire293, le
Ministère français de la Justice indique aux procureurs de la
République que le recours à la composition pénale doit
être réservé à des délinquants primaires. A
ce titre, la composition pénale s'appliquant aux infractions de masses,
ne troublant pas gravement l'ordre public, en l'occurrence les infractions
routières sans victime, aux violences ou dégradations
contraventionnelles, aux violences ayant entrainés une incapacité
de travail supérieure à huit jours, aux actes de
délinquance touchant la famille tel que l'abandon de famille, à
la non- représentation d'enfant ou l'absence et bien d'autres encore.
Néanmoins, à la suite de l'entrée en
vigueur de la loi Perben II, la composition pénale a vu son champ
d'application considérablement élargi. En effet, depuis 2004,
elle est applicable à tout délit puni à titre principal
d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement d'une durée
inférieure ou égale à cinq ans, à l'exclusion des
délits de presse, des délits politiques et des délits
290La CRPC issue de la loi française n°
2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions
de la criminalité, dite Loi « Perben II ».
291 GUINCHARD (S.) & J. BUISSON (J.), Procédure
pénale, op. cit, p. 976. D'autres auteurs parlent toutefois d'une
« alternative punitive » ; PRADEL (J.), Procédure
pénale, op. cit, pp. 547-552 ; DESPORTES (F.) &
LAZERGES-COUSQUER (L), Traite de procédure pénale, op.
cit, p. 797, V. aussi, EXPOSITO (W.), La justice pénale et les
interférences consensuelles, thèse Lyon III, 2005.
292 CONTE (Philippe), « La nature juridique des
`'procédures alternatives aux poursuites» : De l'action publique
à l'action à fin publique », in Mélanges
GASSIN, Presses Universitaires d'Aix-Marseille, 2007, 526 pages.
293 V. Circulaire Crim. 2001-14 F1/11-07-2001.
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d'homicide involontaire294 et peut en outre
concerner toutes les contraventions295.
2- Le fonctionnement de la composition pénale
En présence d'infraction entrant dans le champ
d'application de la transaction pénale et lorsque la victime est
identifiée, le procureur de la République dispose de la
faculté de trancher le litige par l'emprunt de l'option de la
composition pénale. Cette procédure qui fait procureur de la
République un « quasi-juge »296 se déroule en
deux étapes.
A la première étape, l'auteur de l'infraction
doit reconnaitre sa participation aux faits reprochés. Ce qui illustre,
ni plus ni moins, la nécessite d'un aveu de culpabilité et plus
précisément d'un acte d'auto-incrimination. En effet, même
s'il est question de « reconnaissance de sa participation aux faits
», les dispositions de la circulaire du 11 juillet 2001 conduisent
à considérer que l'expression équivaut à une
reconnaissance de culpabilité297. C'est alors que le
procureur peut, soit directement, soit par l'intermédiaire de son
délégué ou d'un médiateur ou encore d'un officier
de police judiciaire, proposer le déclenchement d'une composition
pénale.
A la suite d'un délai de réflexion de dix (10)
jours, l'auteur de l'infraction devra faire connaitre sa décision
à l'égard de la procédure : refus ou acceptation.
Toutefois, la mesure reposant en effet sur un aveu et un consentement devant
être donne en toute liberté par le délinquant, il
apparaissait opportun de décider que le moment de la proposition de la
mesure était incompatible avec celui de la garde à vue.
Néanmoins, la raison de la pratique semble être toujours la
294 Art. 41-2 al. 27 du CPPF.
295 Art. 41-3 al. 1er du CPPF.
296 DALLE (H.), « Juges et procureurs dans la loi Perben
II », in Le nouveau procès pénal après la loi
Perben II, Coll. Dossier Journées d'Etudes Dalloz, Dalloz, 2004, p.
464.
297 Crim. 01-14 F1 du 11 juil. 2001, le point 1.3.1.2 intitule
« Reconnaissance des faits » est rédigé ainsi :
« aux termes mêmes du premier alinéa de l'article 41-2,
la procédure de composition pénale exige que la personne
reconnaisse avoir commis l'infraction. Elle n'est donc pas possible si la
personne conteste sa culpabilité ».
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meilleure et cette juste appréhension du moment de la
proposition d'une mesure de composition pénale fut abandonnée par
la loi du 9 septembre 2004, l'auteur de l'infraction pouvant désormais
être amené à s'auto-incriminer et se voir proposer une
mesure de composition pénale dès le stade de la garde à
vue.
A ce stade, le délinquant a le choix entre refuser la
mesure ou l'accepter. Dans la première hypothèse où
l'intéressé refuse la proposition, l'action publique est alors
mise en mouvement par le procureur de la République. A
contrario, son accord est recueilli par procès-verbal signé,
précisant « la nature des faits reproches ainsi que leur
qualification juridique, la nature et le quantum des mesures proposées
en stipulant le délai d'exécution et le cas
échéant, le montant et la nature des réparations
proposées ».
A la seconde étape, le procureur de la
République saisit, en effet, par requête, aux fins de validation,
le président du tribunal de grande instance298. Cette
exigence de validation par un magistrat du siège marque la
spécificité procédurale de la composition pénale
par rapport aux autres alternatives aux poursuites, y compris la
médiation. Ainsi, une fois la mesure de composition pénale
validée par un magistrat du siège, son exécution fera
l'objet d'une inscription au casier judiciaire du mis en cause.
Enfin, il sied de préciser que le succès d'une
mesure de composition pénale entraine l'extinction de l'action publique.
Outre l'incohérence du constat selon lequel l'action publique est
éteinte alors même qu'elle est censée ne jamais avoir
été mise en mouvement, une composition pénale
réussie produit des effets identiques à l'égard de
l'action publique que ceux qu'entrainerait un jugement. Il parait de même
lorsqu'il s'agit de la mise en oeuvre de la procédure de comparution sur
reconnaissance préalable de culpabilité, à la
réserve que
298 Art. 41-2 CPPF, art. R. 15-33-46 CPPF.
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celle-ci semble transiger, non sur l'action publique mais sur
le quorum de la peine issue de l'action publique.
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