Chapitre 2 : L'accroissement des mesures pénales
consensuelles
Depuis quelques années, l'institution judiciaire tente de
faire face au
contentieux pénal de masse et de rehausser la
qualité de la justice pénale, notamment en diversifiant ses modes
de réponse. Dès lors, s'est développée au fil des
ans, toute une politique d'alternatives, intégratrice de la
volonté de l'agent pénal, qui, très tôt, a
révélé ses limites pour des raisons d'origines
diverses251. Ce faisant, le consentement du délinquant dont
les vertus semblent ne plus à démontrer, se veut davantage
nécessaire à la justice pénale béninoise pour
l'atteinte de ses objectifs. Et pour ce faire, celle-ci, se doit d'inciter
à l'amélioration de ses modes de traitement. Ceci passera sans
doute par l'assouplissement des institutions consensuelles préexistantes
(Section 1) et l'institutionnalisation de nouvelles
institutions plus consensuelles (Section 2).
Section 1 : l'assouplissement des institutions
consensuelles préexistantes
La justice pénale béninoise, dernier rempart des
victimes, assoiffées de restauration a, depuis quelques années,
eu le mérite de se doter, par la générosité du
législateur, de nombre de mécanismes alternatifs. Toutefois,
ceux-ci pour un rayonnement plus efficace se doivent d'être
revisités par les décideurs politiques. En effet, il parait
logique, au vu de l'état actuel des contours de la justice
pénale, de renforcer les alternatives à la poursuite
(Paragraphe 1), sans pour autant ignorer la
nécessité de consolider les alternatives à
l'emprisonnement (Paragraphe 2).
251 Celles-ci tiennent d'une part à la portée
limitée desdites alternatives et d'autre part à leurs nombres
réduits et donc insuffisants.
77
Paragraphe 1 : Le renforcement des alternatives à la
poursuite pénale
Médiation pénale, transaction pénale sont
autant de mesures alternatives consensuelles dont s'est doté le
système judiciaire béninois pour un traitement plus efficace du
contentieux pénal. En effet, les mesures alternatives peuvent être
utilisées par le parquet ou toute administration
qualifiée252 lors des poursuites, auquel cas, lesdites
autorités renoncent à poursuivre le délinquant, à
condition que ce dernier répare les dommages issus de son infraction.
Ainsi, ces institutions bien que répondant aux besoins des protagonistes
se veulent toutefois d'être enfermées dans un champ d'action
très restreint de sorte qu'elles ne s'appliquent qu'à une infirme
minorité des contentieux. Pis, celles-ci dans leur mise en oeuvre
semblent au vu de leurs régimes juridiques, dépourvue de toute
garantie nécessaire à la protection du consentement du
délinquant, déjà affaibli par son implication dans une
procédure judiciaire.
C'est alors que s'impose la nécessité
d'étendre le champ d'action des procédures alternatives à
nombres d'autres infractions (A), tout en veillant au
renforcement des garanties inhérentes à l'intégrité
du consentement des parties, en l'occurrence du délinquant
(B).
A) L'extension du domaine des procédures
alternatives à la poursuite
Tel qu'organisés par le législateur
béninois, les domaines de la médiation (1) et de la transaction
pénale (2), strictement encadrés se doivent d'être ouverts
au bénéfice de la masse des délinquants, sans distinction
aucune.
1- L'ouverture du domaine de la médiation pénale
Aux termes des dispositions de l'article 240 du code de l'enfant
en vigueur au Bénin, « La médiation pénale est un
mécanisme qui vise à conclure un accord entre l'enfant auteur
d'une infraction ou son représentant légal et la victime
ou
252 Il s'agit en l'occurrence de l'administration des eaux et
forêts, de la chasse, de la faune et de la flore, ainsi que celle de la
douane et des droits indirects.
78
son représentant légal ou ses ayants droit
». Il s'en déduit que le législateur n'a
institué la médiation pénale qu'au seul
bénéfice des enfants en conflit avec la loi, bien que le bruit de
sa nécessité n'a cessé de retentir s'agissant des
infractions commises par les majeurs.
En effet, cette philosophie du législateur pourrait
s'inscrire dans une volonté d'éducation253 et de
resocialisation du mineur, qui, très tôt, s'est retrouvé en
conflit avec la loi. Cette éducation, à vertu pédagogique
consistera à associer le mineur aussi bien à la décision
de réparation qu'au choix254 de la mesure ou activité
d'aide ou de réparation la plus pertinente eu égard à son
âge ou à sa capacité à réparer.
Toutefois, cette philosophie du législateur dont la
visée est salutaire serait d'une parfaite ingénierie si la mesure
était étendue à la personne majeure présumée
auteur d'infraction à la loi pénale. En effet, la
médiation pénale a pour but d'apporter une réponse
institutionnelle aux conflits les plus délicats255 et
répétitifs256, ceux-ci étant la plupart du
temps, l'oeuvre de personnes majeures. Cela s'illustre par la récurrence
d'infractions telles l'abandon de famille257, de plaintes pour non
représentation d'enfant258, pour violences volontaires au
sein de la famille, vol, escroquerie, destruction et dégradation,
injures, appels téléphoniques malveillants, toutes l'oeuvres de
délinquants majeurs.
253 Le principe d'éducation s'analyse dans les
réponses à la délinquance des mineurs au travers des
mesures éducatives, entendue au sens large, de protection, d'assistance,
de surveillance et d'éducation. V. MBANZOULOU (P.), op. cit. p. 65.
254 Ce choix sera opéré parmi les mesures ou
activités énumérées par l'article 244 du code de
l'enfant.
255 Ceux dans lesquels les peines ne peuvent être que
symboliques et/ou disproportionnées par rapport au contexte même
de l'infraction et ceux dans lesquels la peine encourue par l'auteur ne peut
qu'aggraver la situation de la victime ou de son entourage.
256 A l'aune du contentieux familial, et ceux de faible
gravité.
257 Cette infraction implique une vie de couple
corroborée par le mariage. Celui-ci étant le fait des majeurs
sauf les rares cas de mineurs émancipés.
258 La non représentation d'enfant concerne la
variété de situations rencontrées par tous ceux qui sont
admis par décision de justice à faire valoir un de ces droits :
le droit de visite, le droit de garde, le partage des vacances scolaires. Ceci
impliquant la qualité de parent, la plus part du temps
réservée aux personnes majeures.
79
Ceci en appelle donc à la bienveillance du
législateur béninois qui, soucieux de l'efficacité de la
justice étatique, devra emprunter les pas de son homologue
français, qui n'a hésité à le faire depuis la loi
du 4 janvier 1993, modifiée par la loi 9 mars 2004259 ;
celle-ci paraissant de nos jours comme un mécanisme flexible de
résolution de conflits nés d'infractions pénales, moins
couteux en temps, en énergie et en argent.
2- La diversification du domaine de la transaction
pénale
La transaction pénale, prototype de la
négociation ou du contrat en matière pénale, est au
Bénin, d'un domaine peu restreint, susceptible de justifier son
application très rare dans le quotidien pénal. En effet, à
la lecture de l'arsenal juridique béninois, la transaction pénale
ne peut trouver application que s'agissant de contentieux relatifs à
l'environnement260 ou à la fiscalité, en l'occurrence
les infractions douanières commises par la personne des
commerçants. En effet, cette réticence du législateur
quant au recours à la transaction découle du principe de
l'indisponibilité de l'action pénale, qui bien qu'exercée
par le Ministère public, appartient toutefois à la
société261.
Cependant, le législateur français, sans
mépriser l'indisponibilité de l'action publique, a toutefois su
l'affaisser. En effet, on assiste depuis peu, à une multiplication en
droit français, des autorités admises à proposer à
l'auteur d'une infraction une transaction pénale. Ainsi, par l'office de
la loi n°2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des
chances, les maires peuvent mettre en oeuvre une procédure de
transaction. C'en est pareil pour le directeur de l'établissement
259 MBANZOULOU (P.) op. cit. p. 11.
260 Instituées par la loi-cadre sur l'environnement en
République du Bénin et les lois connexes.
261 DESPORTES (F.) & LAZERGES-COUSQUER (L.), op. cit. p.
713.
80
public des parcs nationaux262 et mieux pour le
Défenseur des droits263 quant aux auteurs des faits
constitutifs d'une discrimination264.
Ceci appelle donc la sagesse du législateur
béninois, qui, fera oeuvre utile en conférant à plus
d'autorité, le pouvoir de transiger sur des infractions mettant au prise
des intérêts de diverses portées.
Loin de s'en contenter, le délinquant, acteur
prioritaire des alternatives pourrait voir son consentement vicié par
divers facteurs, en l'occurrence l'erreur et la violence ; d'où la
nécessité de garanties de la libre expression de la
volonté du délinquant.
|