SECONDE PARTIE: LA NéCESSiTE DU CONSENTEMENT DU
DéLiNQUANT POUr LE DrOiT BéNiNOiS DE LA PrOCéDUrE
PéNALE
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A l'opposé des décideurs africains, les pouvoirs
publics occidentaux se sont, depuis quelques années, au vu de la
montée en puissance de la petite et moyenne délinquance ainsi que
la multiplication des actes de terrorisme et de la criminalité
organisée, engagés dans une politique criminelle axée
d'une part, sur la sécurité et d'autre part, sur la
proximité de la justice190. Ce choix politique
témoigne, dès lors, de l'efficacité des justices
pénales européennes qui à certains endroits en est
arrivée à susciter la fermeture de nombre de centre
pénitentiaire.
Il s'en déduit donc que la procédure
pénale associée aux préceptes consensualistes dont la
nécessité semble s'imposer à l'environnement criminel
béninois (Chapitre 1), est promoteur d'une justice
pénale à double efficacité. C'est alors que le
législateur béninois est interpellé pour aménager
les normes procédurales aux fins d'une variation et d'un accroissement
des mécanismes de réponse pénale consensuelle
(Chapitre 2)
190 CHOPIN (F.), « Vers un nouveau modèle de la
justice pénale ? », in Mélanges GASSIN, Presses
Universitaires d'Aix-Marseille, 2007, p. 135.
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Chapitre 1 : La prise en compte des
réalités contemporaines de la criminalité
A la bonne administration de la justice, font écho
désengorgement des prétoires, rapidité et
effectivité de la réponse pénale191. A ces
fins, se doit d'apparaitre en droit positif béninois à l'image du
droit français, une solution consistant à alléger la
conduite du procès pénal, sinon à éviter de
façon plus radicale les poursuites. Et dans ces conditions le
consentement du délinquant est sollicité et apparait plus
déterminant. C'est alors qu'appréciée d'un point de vue
théorique, l'immixtion du consentement du délinquant dans le
processus pénal permettrait d'assurer un règlement qualitatif des
contentieux pénaux (Section 1), nonobstant l'importance
accrue des flux pénaux, et donc un traitement quantitatif
(Section 2).
Section 1 : Le traitement qualitatif des litiges
pénaux
Les données géographiques, sociologiques,
culturelles voire psychologiques à l'origine de l'affaiblissement
notoire de l'appareil judiciaire et de la remise en cause de
l'efficacité de la maison justice ont, sous d'autres cieux,
suscité en théorie, l'accroissement de la prise en compte des
données consensuelles dans l'élaboration des normes
répressives. Ces expériences, loin d'être exemptes de toute
critique, ont néanmoins laissé entrevoir nombre d'exploits dont
les plus prisés s'accommodent autour d'une efficace prise en compte des
intérêts du délinquant (Paragraphe 1),
ainsi que de sa victime (Paragraphe 2).
191 HARDOIN-LE GOFF (C.), « Le consentement du
délinquant ou l'entretien d'une illusion dans le procès
pénal », in Mélanges en l'honneur du Professeur Jacques
Henri ROBERT, LexisNexis, 2012, p. 348.
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Paragraphe 1 : l'efficace prise en compte des
intérêts du délinquant
Il est vrai que le schéma consensualiste n'a pas
été à l'origine élaboré pour répondre
aux attentes du délinquant mais bien pour satisfaire les demandes des
victimes d'infractions. Pour autant, il n'en demeure pas moins que l'auteur des
faits retire certains avantages de son adhésion aux procédures
alternatives.
En effet, la procédure alternative apparaît comme
un moyen rapide, discret et peu coûteux de résolution du conflit,
promoteur d'un allègement procédural à l'endroit du
délinquant (A). Mieux, celui-ci, pour avoir
adhérer auxdits modes de règlement pourra autant que faire se
peut bénéficier d'un allègement de la peine adaptée
à sa situation (B).
A- L'allègement du temps procédural du
délinquant
Aux termes de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des
Peuples faisant partie intégrante de la constitution béninoise du
11 décembre 1990, « toute personne a le droit d'être
jugée dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale
»192. Cette disposition législative, pour être
effective, se doit de consacrer nombres de sacrifice à la charge du
délinquant. En effet, le jugement du délinquant dans les
meilleurs délais nécessite une contrainte de
célérité dans l'élaboration son dossier
pénal (1). Mieux, celui-ci doit par ce faire, et par son consentement,
renoncer à l'exercice de son droit de contestation des actes de
procédure (2)
1- La réduction du temps d'élaboration du
dossier pénal
L'élaboration du dossier pénal renvoie à
la construction de ce dernier, préalablement à toute orientation
et à toute décision. Principalement, il s'agit de l'étape
au cours de laquelle les services d'investigation entreprendront les actes
nécessaires à la recherche de la vérité. Autrement
dit, cela revient à s'intéresser à la quête des
éléments de preuve permettant de donner consistance au
192 Article 7 alinéa 1er - d.
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dossier. Ainsi, l'immixtion des données consensuelles
dans cette étape fondamentale de la procédure contribuerait
à la réduction du temps dévolu aux investigations.
En effet, nous savons que les actes d'investigation se
trouvent dans certains cas de figure conditionnés par le consentement du
particulier. Ainsi, l'accord donné à la proposition de contrainte
traduit toute la volonté de l'intéressé de collaborer avec
les services enquêteurs. Le particulier qui autorise une perquisition,
une visite ou saisie dans le cadre de l'enquête préliminaire,
facilite assurément la conduite des investigations. Il évite
à l'autorité publique de rechercher un cadre de contrainte exempt
de tout obstacle consensuel, tel que l'ouverture d'une information judiciaire.
Pareillement, celui qui adhère aux examens médicaux tels que
prévus par le code béninois de procédure pénale,
réalisée par les autorités compétentes,
évite la sollicitation de l'autorité judiciaire pour qu'elle
autorise une fouille coercitive. Ce qui témoigne à suffisance de
l'importance du consentement initial du délinquant dans la
réduction de la démarche procédurale, alors de la
brièveté de l'investigation pénale.
2- La réduction du temps de contestation
L'immixtion du consentement dans le déroulement de la
justice pénale offre souvent au particulier une faculté de
contestation. Ladite faculté d'importance notoire peut se manifester
doublement, c'est-à-dire, soit au stade de l'instruction par le droit
d'agir en nullité, soit au stade du jugement par le droit d'exercer une
voie de recours.
Usant de ses prérogatives, l'intéressé
contribue à un allongement de la durée du procès
pénal. Mais l'on peut aussi adopter une autre forme de lecture,
placée sous l'angle de l'adhésion. En effet, l'individu n'est pas
dans l'obligation d'user de la contestation offerte par le législateur
et il peut s'en défaire par un acte de
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renonciation explicite ou implicite. Dans ce cas, il accepte
le dossier en l'état, adhérant soit à son
élaboration, soit à la décision de
justice193.
Pour ce qui est de la phase d'élaboration du dossier
pénal, on retrouve au stade de l'information judiciaire, cette
hypothèse de volonté `'abdicative»194, expression
du défaut de contestation.
Ainsi, au cours de l'instruction, les parties privées
peuvent saisir la Chambre de l'instruction afin qu'un acte ou une pièce
de la procédure fasse l'objet d'une annulation. Mais le recours en
nullité ouvert sur le fondement des articles 184 et suivants du code
béninois de procédure pénale est une faculté de
contestation à laquelle la partie peut renoncer. Mieux, l'article 184,
en son dernier alinéa, dispose « les parties peuvent renoncer
à se prévaloir de la nullité, lorsqu'elle n'est
édictée que dans leur seul intérêt. »
Cette renonciation dont la forme demeure sujette à interrogation ne
peut être convenablement donnée qu'en présence de l'avocat
ou de la partie concernée dûment appelée. Ce faisant, cette
disposition consacre le consentement comme acte de validation de l'état
de la procédure en cours. Et, par son refus de toute contestation, la
partie privée non seulement ne critique pas l'acte ou la pièce en
cause, mais offre une validation de toute irrégularité la
concernant, susceptible d'accélérer le mouvement de l'instruction
par une compression de sa temporalité.
Mieux, le consentement, outre, son influence sur le temps des
investigations peut également impacter la situation du délinquant
quant au quantum de la peine encourue.
193 Il s'agit du refus d'exercer les voies de recours contre
toute décision juridictionnelle, d'instruction ou de jugement.
194Cette expression est employée par
certains auteurs pour désigner une adhésion à une
décision de justice sous l'angle de l'acquiescement ou du
désistement. V. PIN (X.), Le consentement en matière
pénale, op. cit. pp. 485 et s. et pp. 491 et s.
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