Paragraphe 2 : la passivité du délinquant
à l'appréciation de la preuve
Le délinquant quelle que soit la nature de la
preuve fournie pour sa défense ne peut influencer l'appréciation
de celle-ci au point d'en obtenir une décision
souhaitée. En effet, tel qu'ignorée à l'instruction
définitive, la volonté du délinquant ne saurait impacter
le cours de la délibération qui, en réalité, est
soumis à l'intime conviction du juge (A), bien que
celle-ci admette quelques limites (B).
A) L'appréciation selon l'intime conviction du
juge
Hors le cas où la loi en dispose autrement, les
infractions peuvent être établies par tout mode de preuve et le
juge décide d'après son intime
conviction149. C'est par ces dispositions que le
législateur béninois a su consacrer l'autonomie du juge dans
l'appréciation des preuves fournies par les parties au
procès. Ainsi, le juge dans son verdict n'est tenu par
aucune preuve150. Les faits relèvent de son
pouvoir souverain d'appréciation151 et sa
conviction relève exclusivement de sa conscience, échappant, de
ce fait, au contrôle de la cour de cassation152. Le
juge peut donc écarter un aveu suspect ou ne pas tenir compte de
sa rétractation153. De même, il peut
dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation se passer de l'aveu et se
contenter des déclarations des coprévenus lorsqu'elles sont
corroborées par d'autres éléments comme les
indices154. Mieux, il pourra également
apprécier la valeur des témoignages et choisir, s'ils sont
contradictoires, ceux qui lui paraissent
sincères155. Il en est de même quant
à l'appréciation des conclusions du rapport d'expertise, qui en
réalité n'est qu'un élément de
conviction156.
149 Article 447 alinéa 1 du code béninois de
procédure pénale.
150 Crim., 24 janv. 1973, B.C., n°33 et 34.
151 Crim., 3 janv. 1978, Arrêt n°1, B.C., n°1.
152 Crim., 3 janv. 1978, Arrêt n°2, B.C., n°1.
153 Crim., 21 oct. 1965, B.C., n°206; 3 oct. 1967, B.C.,
n°238; 18 déc. 1969, B.C. n°352; 4 janv. 1985, B.C.,
n°11.
154 Crim., 9 fév. 1955, D., 1955.274 ; 9 mars 1971, B.C.,
n°80.
155 Crim., 27 mars 1929, B.C., n°93.
156 Crim., 11 mars 1964, B.C., n°89 ; 8 novembre 1973, B.C.,
n°412.
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Toutefois, susceptible de paraitre contraire aux règles
procédurales, il a été jugé par la cour de
cassation française que le juge pourrait dans l'appréciation des
preuves, fonder sa décision sur des éléments de conviction
puisées dans une autre procédure pénale jugée
à la même audience, et même obtenus de manière
illicite par la partie civile157, dès lors que ces
éléments ont été soumis à la discussion
contradictoire des parties158.
En dépit de l'impuissance du délinquant à
influencer l'appréciation des preuves, celle-ci laissée à
l'intime conviction du juge connait toutefois des limites.
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