CHAPITRE 2 : L'absolutisme de la quasi-absence du
consentement du délinquant à la phase décisoire du
procès pénal
La phase décisoire marque l'aboutissement du processus
pénal129. Elle a, en effet, pour objet deux questions : celle
de la culpabilité et celle de l'application de la peine. A cet effet,
parmi les acteurs de ladite phase, le prévenu semble un acteur
ignoré en ce qu'il n'a pratiquement point de volonté à
faire valoir (Section 1), à moins qu'il ne s'agisse de
son adhésion au prononcé de la peine de travail
d'intérêt général à son encontre
(Section 2).
Section 1 : La passivité du délinquant
dans la mise en oeuvre de la phase décisoire du procès
pénal
Outre la saisine de la juridiction de jugement qui semble, en
l'espèce, d'une importance moindre,130 la procédure
devant les juridictions de jugement se décline en deux phases
catégoriques, toutes insensibles à la volonté du
délinquant. Ainsi, l'agent pénal bien qu'étant au centre
de ladite phase, parait passif tant à la recherche des preuves
(Paragraphe 1) qu'à l'appréciation de celles-ci
(Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La passivité du délinquant
à la recherche de la preuve
La preuve est la rançon du droit dit-on. Celle-ci, bien
qu'ayant été l'objet de la phase préparatoire se retrouve
à nouveau évoquer et débattue lors de l'instruction
définitive de la cause par le magistrat de jugement. En effet, sans
prétendre discréditer le préalable accompli par les
organes de la phase préparatoire, le juge lors de l'audience et dans
l'optique d'une bonne administration de la justice pénale permet aux
parties de discuter le bien fondé des preuves préalablement
recueillies. A tous égards, cette discussion sans
129 NOUWADE (G.), la gouvernance du procès
pénal, Mémoire de DEA, Abomey-Calavi, FADESP, 2012, p.
58.
130 Il peut s'agir du tribunal correctionnel ou de la cour
d'assise voire des juridictions pénales d'exception.
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préjudicier aux droits de la défense doit
s'avérer respectueuse de certains principes tels
l'oralité131, la publicité132 et la
contradiction133. Ce faisant, l'audience correctionnelle, outre les
phases préliminaires se base fondamentalement sur l'opinion des
justiciables (A) et celles des justiciers
(B)
A- L'opinion des justiciables
Le justiciable est la personne considérée dans
ses rapports avec la justice, soit qu'elle demande justice, soit qu'elle soit
appelée en justice134. Ainsi, sans pour autant
prétendre équivaloir au consentement, les propos avancés
par le prévenu suite à son interrogatoire (1) font, de même
que l'audition des témoins (2), partie intégrante du cours normal
de la phase décisoire du procès pénal.
1) L'interrogatoire du prévenu
A l'entame de l'audience, le président commence par
s'assurer de la présence et de l'identité exacte du
prévenu135, ce dans l'optique d'éviter une
éventuelle erreur. A ce propos, la cour de cassation française a
pu juger qu'il n'y avait là qu'une recommandation et que son
inobservation ne saurait entrainer la nullité du moment qu'aucune
contestation n'a été élevée à l'audience sur
l'identité du prévenu136. Ce faisant, le
président, détenteur de la police de l'audience, donne
l'indication en substance de l'acte saisissant le tribunal137,
procède à l'interrogatoire au fond de la personne poursuivie et
reçoit ses déclarations. A cet effet, le ministère public
et la partie civile peuvent lui poser toutes questions susceptibles de
contribuer à la manifestation de la vérité.
131 L'oralité découle de l'intime conviction du
juge. En vertu de ce principe, le juge ne doit pouvoir se décider que
sur des preuves qui ont été directement et immédiatement
soumises au débat, donc devant lui. L'oralité conduit donc
à limiter la possibilité d'utiliser directement comme preuves,
les actes réalisés au cours de l'enquête et de
l'instruction préparatoire.
132 La publicité, garantie fondamentale de la justice
pénale, porte sur le jugement qui sauf en cas d'ordonnance
pénale, doit être prononcé publiquement. Elle porte aussi
et surtout sur les débats que le public est admis à suivre et
dont un compte rendu peut reproduit par la presse.
133 Cet ultime caractère, considéré comme
principe directeur du procès pénal consiste dans la
présence dans la présence des parties au procès et se
trouve garanti par l'assistance d'un défenseur. V. PRADEL (J), op. cit.
p. 800.
134 Guinchard (S.) & Debard (Th.) (Dir), Lexique des termes
juridiques, 25ème édition, 207-2018, p.1219.
135 Article 423 du CBPP.
136 Crim, 6 mai 1969, Bull. n°152.
137 Le prévenu doit en effet être informé
tant des divers chefs d'infractions qui lui sont reprochés que de
chacune des circonstances aggravantes susceptibles de rester à sa
charge. V. Crim. 21 Nov. 2000, Bull. n°347 ;
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Outre l'interrogatoire du prévenu, il est loisible pour
la réduction du risque d'erreur judiciaire, de passer à
l'audition des témoins susceptibles d'éclairer sur les
circonstances de l'infraction.
2) L'audition des témoins
Il est procédé à l'audition orale des
témoins, même si ceux-ci ont déjà été
entendus lors de l'enquête préliminaire ou de l'instruction
préparatoire. En revanche, bien que son opportunité soit
laissée à l'appréciation de la Cour,138 il
n'était pas d'usage d'entendre à nouveau, devant la chambre des
appels correctionnels, les témoins qui ont déposé en
première instance139. Pour ce faire, les témoins
doivent été cités par acte d'huissier à la
requête du ministère public, de la personne poursuivie ou de la
partie civile. Ce faisant, la déposition des témoins est
respectueuse d'une procédure pas des moindres. En effet, à
l'appel de la cause, les témoins, selon l'article 328 du code de
procédure pénale, doivent se retirer dans une salle
spéciale d'où ils sont appelés successivement pour faire
leur déposition sans avoir entendu les débats qui ont
précédé celui-ci140. Les témoins peuvent
être confrontés entre eux ou bien avec le prévenu, voire la
partie civile141.
Toutefois, l'audition des témoins devenue
quasi-obligatoire, sous peine de sanction, semble admettre une limite notamment
lorsqu'il s'agit de certaines personnes. En effet, à titre exceptionnel,
les témoins ne déposent pas s'ils sont astreints au secret
professionnel142. Pis, les journalistes entendus comme
témoins semblent libres de ne pas révéler l'origine des
informations recueillies dans l'exercice de leur
activité143.
138 Crim. 5 Nov. 1975, Bull. n°237 ; Crim. 12 juin 1975, D.
1975. IR 443.
139 Crim., 8 fév. 2000, Bull. n°58.
140 Article 328 du C.P.P.B « Le Président ordonne
aux témoins de se retirer dans la salle qui leur est destinée.
Ils n'en sortent que pour déposer. Le président prend, s'il en
est besoin, toutes mesures utiles pour empêcher les témoins de
conférer entre eux. »
141 C'est le pourquoi les témoins ne doivent pas
s'éloigner, sauf autorisation du président, avant la
clôture des débats.
142 PRADEL (J.), op. cit. p. 758.
143 Ibidem
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Tel qu'organisé par les législations en vigueur
au Bénin, le déroulement de la phase décisoire du
procès pénal, insensible à la volonté du
délinquant, connait outre l'intervention des justiciables, celle des
justiciers en l'occurrence du ministère public et des avocats.
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