SECTION 3. DE LA RESPONSABILITE EXTRACONTRACTUELLE
Cette section procèdera à l'analyse de la
responsabilité extracontractuelle ou délictuelle en droit
positif.
En droit civil : les obligations, le délit et le
quasi-délit forment après le contrat, la deuxième source
classique des obligations.
Les articles 258 et 259 constituent le siège de la
matière pour cette notion, aux termes de l'article 258 : « tout
fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui
par la faute duquel est arrivée, à le réparer ». De
son côté l'article 259 édicte que « chacun est
responsable du dommage qu'il a causé, non seulement par son fait, mais
encore par sa négligence ou par son imprudence ».
En effet, il ressort de ces deux dispositions du code civil
des obligations que trois (3) conditions cumulatives suffisent pour que soit
établie la responsabilité extracontractuelle en droit commun
à savoir :
1. L'existence d'un dommage ou préjudice subi par la
victime ;
2. La preuve que ce dommage a été causé
à la suite de la faute de son auteur ; la faute.
3. L'établissement d'un lien de causalité entre le
dommage subi et la faute invoquée.
24 L'article 2270-1 du code civil français
dispose que : « les actions en responsabilité civile
extracontractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la
manifestation du dommage ou de son aggravation ».
25 Infra p.40.
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Toutes ces conditions feront l'objet d'un sous-section dans la
présente section.
Seul l'auteur d'une faute causale peut être tenu
à réparation. Si la double exigence d'un dommage et d'un lien de
causalité est reprise dans aux dispositions du code civil
susvisé, en revanche, la nécessité d'une faute est
remplacée, soit par le fait d'une chose dont on est responsable de la
garde, sot par le fait d'autrui dont le responsable doit répondre.
Dès que ces conditions sont établies par la victime, il nait au
bénéfice de celle-ci une obligation en réparation qui
incombera à l'auteur de la faute. Si le dommage et le lien de
causalité constituent des notions unitaires, quelles que soient les
hypothèses de responsabilités, le fait générateur
est en revanche multiple. Pour faire valoir et préciser cette
obligation, le créancier qui est la victime, dispose d'une action en
justice autrement appelée « action en responsabilité »
qui fera aussi objet d'une analyse dans la sous-section.
sous-section 1 Du dommage
La responsabilité civile a une fonction essentiellement
indemnitaire. Elle consiste à assurer à la victime la
réparation d'un dommage causé par un tiers. Par
conséquent, elle ne se conçoit qu'en présence d'un dommage
déjà réalisée, qu'il conviendra
précisément de réparer.
Cependant, une partie de la doctrine contemporaine tente
d'attribuer à la responsabilité extracontractuelle une nouvelle
fonction, dite préventive. Elle pourrait être sollicitée
non seulement pour réparer un dommage actuel et certain mais
également pour prévenir un simple risque de dommage qui ne s'est
pas encore réalisé. Tournée vers l'avenir, elle
permettrait à la victime potentielle d'échapper au
préjudice qui la menaçait.
Le dommage, condition élémentaire à la
responsabilité civile, peut être défini comme la
lésion d'un intérêt, se traduisant pour la victime par une
perte imputable au responsable.26 Cette perte s'observe de la
comparaison entre la situation actuelle de la victime et celle qui aurait
existée si le fait dommageable ne s'était pas produit.
Cependant, pour qu'une telle perte subie sur la victime soit
juridiquement réparable, au titre de la responsabilité civile, il
faut qu'elle présente trois caractères : elle doit être
certaine, légitime et
personnelle. Nous examinerons ces différents
caractères dans les lignes qui vont suivre.
Avant d'aller plus loin dans cette étude du dommage il
serait judicieux de préciser la distinction sur les vocables du dommage
et du préjudice qui, parfois sont vu comme étant des mots
synonyme a raison ou a tort. Une partie de la doctrine propose de ne pas tenir
ces deux notions de dommage et de préjudice pour synonymes : le dommage
serait ainsi une notion purement matérielle, représentant
l'atteinte a une personne ou à un bien ; le préjudice serait une
nation purement juridique, désignant les conséquences
patrimoniales ou extrapatrimoniales d'un dommage que le droit accepte de
réparer. Tout dommage, toute atteinte matérielle ne donne pas
lieu à réparation. Dans la mesure ou le dommage n'est pris en
compte par le droit que s'il répond à certains caractères
et correspond à certains chefs de préjudices indemnisable, la
distinction proposée présente un réel
intérêt. Elle permet de faire le tri entre
26 Définition adoptée par l'avant-projet
catala de réforme du droit des obligations et de prescription, paris,
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les dommages ignorés par le droit et les
préjudices juridiquement réparables. Cependant, étant
donné que le droit positif adopte une approche de plus en plus laxiste
des caractères que doit présenter un dommage et accepte de
réparer toutes sortes de dommages, il nous parait plus simple de tenir
en principe ces deux notions de dommage et de préjudice pour synonymes.
La distinction pourra, en revanche être utilisé parfois à
titre pédagogique.
1. Un dommage certain
Dire qu'un dommage doit être certain, signifie avant
tout que sa preuve doit être rapportée par le demandeur a l'action
en responsabilité. Cela va de soi, pour être indemnisée, la
victime doit prouver l'existence du dommage qu'il a subi. Ce dommage doit
être certain au moment où le juge doit statuer de façon que
son évolution en soit facilité. En outre, le préjudice
à indemniser doit certain et actuel. Mais cette notion exige quelques
précessions dans la pratique. Il n'est pas nécessaire pour
être réparé, que le préjudice soit actuel au jour du
jugement.
? Le dommage futur : un dommage
certain
il a été admis que la réparation d'un
préjudice futur était possible des lors que sa
réalisation, son existence, ou encore son avènement était
certaine dans l'avenir et son évaluation par le juge est possible
désormais.27 L'exigence de la certitude n'empêche pas
la réparation du dommage futur. Elle ne fait pas non plus obstacle
à la réparation de la perte de chance. Il n'y a pas à
tenir compte du dommage simplement éventuel dont la réalisation
n'est pas certaine. Exiger une indemnisation pour perte d'un enfant en arguant
de la perte matérielle des avantages financiers que cet enfant aurait
génère s'il était en vie. Ces avantages étant
incertains, le préjudice l'est aussi.
Cependant, le dommage simplement éventuel n'est pas
à confondre avec la perte d'une chance qui, elle, peut constituer un
préjudice actuel et certain.28
Au-delà des questions de preuve, la notion même
de certitude signifie que le dommage, pour ouvrir droit à la
réparation, ne doit pas être simplement éventuel ou
hypothèque.29 Un dommage purement éventuel ou
hypothétique, dont la réalisation n'est pas certaine ne peut
donner lieu à réparation, titre d'exemple, est éventuel
l'exposition a un risque qui ne s'est pas finalement réalisé.
Il arrive fréquemment que, la situation dommageable
développe ses effets dans le temps, au-delà de la date à
laquelle intervient le jugement statuant sur la responsabilité civile.
Il en est ainsi en matière de troubles de voisinage ou d'accidents
corporels. Pour être réparable, le préjudice futur doit
également se plier à l'existence de certitude et ne pas
être éventuel. Le principe de réparation du dommage futur
et certain a été par la suite réaffirmé et
appliqué essentiellement en matière de dommage
corporel. A titre d'exemple, et certain le dommage
correspondant aux frais des soins futurs qui seront prodigués à
la victime d'un accident corporel
27 KALONGO MBIKAYI, DROIT CIVIL : les
Obligations, Tome I, Editions Universitaires Africaines, Kinshasa, 2012,
p. 219 tiré de la revue juridique zaïroise (RJZ), l'Shi, 7n aout
1974, no1, 2 et 3, p. 74-75.
28 Il en est ainsi : de la perte de la chance de
pouvoir être nommé a tel poste si on avait passé le
concours ; ce qui est diffèrent de la réussite elle-même
qui reste éventuelle.
29 Civ. 2e, 20 juin 1990, B II n 142,
paris, dans cette décision de la cour de cassation il en en ressort
qu'elle exerce son contrôle sur la certitude du dommage à partir
des éléments de preuve souverainement constatés par les
juges du fond.
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« s'il est d'ores et déjà constaté,
à la date de la décision que lesdits soins demeurent
nécessaires dans l'avenir ». De même, est certain le dommage
correspondant aux pertes de salaires d'une victime contaminée par le
virus du sida pour la période postérieure au jugement, lorsque la
séropositivité a entrainé une réduction de la
capacité de travail pour la période
antérieure.30
Il est vrai que, le principe de réparation du dommage
futur et certain, présente pour le juge une difficulté
supplémentaire d'évaluation. L'arrêt du 1er juin
193231, qui avait admis le principe de réparation du dommage
futur en avait par contre restreint la portée, en exigeant que le
dommage fut susceptible « d'estimation immédiate » cette
notion sera approfondie dans l'étude que nous allons consacrée au
régime de réparation du préjudices subi du fait de
produits pharmaceutiques. Cette exigence a par la suite été
abandonnée. Par conséquent, si le juge ne dispose pas, au jour
où il est amené à statuer sur le principe de
responsabilité, d'éléments suffisants pour évaluer
définitivement le dommage futur.
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