SECTION 4. PREJUDICE CORPOREL
L'indemnisation des préjudices corporels est une
matière qui présente une difficulté majeure : fixer le
montant de l'indemnisation des préjudices extrapatrimoniaux.
Le dommage corporel comporte deux composantes, l'une
patrimoniale, matérielle ou économique et l'autre
extrapatrimoniale ou morale. En effet, l'atteinte à la personne, qui
peut aller de simples blessures jusqu'au décès en passant par un
handicap ou une infirmité plus ou moins grave, ici nous allons l'analyse
dans l'hypothèse où ces préjudices seraient causés
par un produit pharmaceutique, se traduit toujours par des préjudices
matériels plus ou moins étendus tels que frais médicaux,
pharmaceutiques ou paramédicaux.
Le droit congolais a encore du chemin à faire dans
cette matière contrairement au droit français qui face à
la difficulté majeure de fixer le montant de l'indemnisation des
préjudices moral ou extrapatrimoniaux ont amené des magistrats
à rédiger un guide de l'indemnisation du préjudice
corporel. Celui-ci contient une sorte de manuel de l'indemnisation du
préjudice corporel et des indications relatives aux montants des
indemnités se présentant sous forme de fourchettes de montants
d'indemnisation pour les différents postes de préjudices. C'est
à propos de ces différentes fourchettes que malgré cette
avancée combien significative un débat est né puisque leur
présence est décriée par une partie des acteurs de
l'indemnisation du préjudice corporel.
Dans le cas des dommages corporels, la réparation se
traduit en général par une indemnisation de la victime,
c'est-à-dire par le versement d'une somme d'argent destinée
théoriquement à compenser l'intégralité des
dommages.
Pour être indemnisées, les victimes doivent
franchir aujourd'hui toute une série d'étapes, plus difficiles
les unes que les autres. Car l'impact du droit européen sur les
démarches d'indemnisation des victimes aux niveaux nationaux commence
à être bien connu aujourd'hui et à montrer clairement les
failles du dispositif.
En cas d'effet indésirable grave lié à un
médicament, afin d'obtenir réparation, la victime doit
impérativement et dans tous les cas de figure :
? Agir avant que son action ne soit plus recevable ;
? Démontrer l'existence d'un dommage ;
? Démontrer le lien de causalité entre ce
dommage et le médicament (alias imputabilité
médicamenteuse).
De plus, pour faire indemniser un préjudice devant les
instances judiciaires, la victime devra choisir entre plusieurs régimes
de responsabilités. Dans ce domaine, l'évolution du droit
européen et son impact sur les étapes à franchir par la
victime sont venus singulièrement remettre en cause les croyances
établies.
116 Benoit MORNET, op.cit. p. 8
2018-2019 (c)Faculté de Droit
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sous-section 1 Preuve pour être indemnisé
Indépendamment de toute stratégie, la victime
devra d'abord démontrer l'imputabilité de ses dommages à
un produit de santé. Cette étape est sans doute la plus
redoutable entre toutes.
C'est sur la victime que repose la charge de la preuve : la
victime doit être capable de démontrer la causalité
possible entre la prise d'un médicament donné et l'effet
indésirable dont elle a été victime. Cette information est
généralement à rechercher dans la notice, mais aussi dans
la littérature scientifique (en effet, au moment de la mise sur le
marché d'un médicament, certains effets indésirables rares
mais parfois très graves n'ont pas forcément été
détectés lors des essais cliniques).
En fin, pour procéder à l'indemnisation du
préjudice corporel, il est donc souvent indispensable de se fonder sur
une expertise médicale dont l'objet est de décrire
médicalement chacun des préjudices subis par la victime. Il
appartient ensuite au juge de transformer la description médicale des
préjudices en une indemnisation monétaire. Si d'aucuns contestent
leur pertinence, les référentiels d'indemnisation n'en sont pas
moins des outils indispensables, ne serait-ce que pour harmoniser les
indemnités allouées d'une région à l'autre.
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