SECTION 4. LA RESPONSABILITE DU FAIT DE LA PRESCRIPTION
ET LA DELIVRANCE DU MEDICAMENT
Si aujourd'hui en république démocratique du
Congo, la mise en cause de la responsabilité de médecin est rare,
ceci n'en ai pas de sorte en France ou en Belgique et beaucoup d'autres pays.
Il est certain que l'accroissement de cas de responsabilité est
lié au développement et la complexité des activités
professionnelles, qui, avec l'évolution des techniques médicales,
ont amené le médecin à prendre davantage de risque.
Une personne peut obtenir un médicament grâce
à la prescription faite par un médecin dans le cadre de
l'exercice de sa profession et qui conduit la personne malade à
s'adresser à une officine de pharmacie.
|
2018-2019 (c)Faculté de Droit
|
- 47 -
Le médecin est libre de ses prescriptions qui seront
celles qu'il estime les plus appropriées en la circonstance. Cependant,
ce principe n'est pas absolu, la prescription de médicaments disposant
d'une AMM est parfois restreinte, et une prescription hors AMM peut être
appréhendée comme une susceptible de fonder la mise en jeu de la
responsabilité du médecin.
De sa part, le pharmacien autant qu'homme de
médicament, c'est-à-dire gardien du poison, peut lui aussi
engager sa responsabilité, tant il est vrai que chaque
médicament, de par son action directe sur le corps humain, est
considéré comme un fanas à double visage : tantôt
bienfaisant quand il est utilisé à bon escient et correctement,
tantôt toxique, iatrogène89 ou mésusage.
Cette ambivalence se retrouve dans le nom même du
pharmacien qui dérive du vocable grec « Pharmakon », lequel
pouvait désigner tout aussi bien le poison que le remède. Le
pharmacien peut ainsi, engager à l'occasion de son exercice
professionnel une responsabilité civile et pénale, vue les
conditions d'exercice de la profession qu'il doit rempli, et les obligations
strictes dont il doit répandre. Surtout, que les pharmaciens disposent
d'un monopole de la préparation, la vente et toute dispensation au
public des médicaments.
sous-section 1 La responsabilité du médecin
prescripteur
La prescription médicale est une étape
importante. Après la consultation et le diagnostic, le médecin va
proposer au malade une prescription médicamenteuse, du fait de cette
dernière il pourra voir sa responsabilité pénale et civile
engager.
Ainsi, le médecin doit prescrire en son âme et
conscience en ne tenant compte que de l'intérêt du patient et de
lui prescrire les produits les plus adaptés à son état au
regard des dernières données de la science médicale.
De plus, il doit se tenir informé des évolutions
de la science médicale et de l'évolution des indications
thérapeutiques des médicaments. Par ailleurs, le médecin a
l'obligation de délivré une information loyale, claire et
appropriée à son patient. Il doit apporter la preuve qu'il a
respecté ces modalités lors de la prescription, sinon il pourra
voir sa responsabilité engager.
Un médecin a pour obligation d'offrir des soins
consciencieux et conformes aux connaissances médicales. Lorsque celui si
accepte de soigner un patient, il est tenu de donner les meilleurs soins
possibles à celui-là.
I. Responsabilité pour faute
En principe, la responsabilité médicale est une
responsabilité pour faute, c'est-à-dire que le médecin
n'est tenu à réparation que si la victime rapporte la preuve
d'une faute à son encontre. Il n'est pas tenu à un
résultat ; il est tenu à une obligation de moyens. L'obligation
de moyens se justifie par l'aléa qui plane sur les résultats de
l'acte médical. Le médecin ne peut pas promettre une
guérison qui est étroitement dépendante de
l'inachèvement des connaissances médicales et de l'état de
santé de chaque patient.
89 Maladie iatrogène, Se dit d'une maladie
ou d'un trouble provoqués par les thérapeutiques, Jacques
DANGOUMAU, pharmacologie générale, UVSB, 6em
édition, bordeaux, 2006.
2018-2019 (c)Faculté de Droit
- 48 -
Ainsi, Le médecin est tenu à une obligation de
compétence scientifique et d'efficacité technique normalement
attendue étant rappelé que la faute éventuelle du
médecin est appréciée au regard des données
acquises de la science à la date des soins et non des données
actuelles; il est également tenu à un devoir d'humanisme
médical (consentement éclairé du patient qui inclut une
obligation d'information, obligation de donner des soins personnels, obligation
de surveillance et de suivi, obligation de secret médical ... ) ; ces
obligations se prolongent en des devoirs d'attention, de prudence, de vigilance
et d'adresse.90
D'une manière générale, constitue une
faute, l'acte que n'aurait pas commis un médecin normalement diligent et
compétent. On compare ainsi le comportement du médecin
incriminé à un médecin "standard" éventuellement de
la même spécialité, placé dans les mêmes
circonstances.
Ainsi, lors de l'utilisation des médicaments prescris
par le médecin, la faute peut prendre trois formes différentes.
La faute peut se produire lors de l'indication thérapeutique. Celle-ci
peut prendre la forme d'une erreur de traitement (surdose de médicament
par exemple). Dans ce cas, le médecin engage sa responsabilité
s'il prescrit un médicament à un dosage excessif.
La Cour de cassation française91 a
approuvé la Cour d'appel de Lyon qui a retenu la responsabilité
d'un médecin ayant prescrit deux boites de FANASIL92 à
dose de deux comprimés par jour à une patiente qui après
avoir suivi le traitement présenta un syndrome de Lyell93. La
posologie était trop élevée. De même, le
médecin engage sa responsabilité s'il prescrit une posologie
d'adulte à un enfant.
Le médecin peut commettre une faute dans la
prescription du traitement. Ainsi, La Cour d'appel de Montpellier94
a retenu la responsabilité d'un médecin homéopathe qui
pour traiter une brûlure de l'oesophage provoquée par du potassium
ingéré accidentellement par la patiente a prescrit un traitement
homéopathique alors que "des lésions de cette nature
évoluent vers un rétrécissement cicatriciel progressif qui
risque d'aboutir à l'obstruction quasi totale de l'oesophage" et sont
traitées de manière classique "par des dilatations
mécaniques réalisées par le passage de sondes". La cour
énonce que le médecin "a fait preuve d'une imprudence
caractérisée", "que le traitement qu'il a appliqué ne
saurait être considéré comme conforme aux données
actuellement acquises de la science ».
En effet, l'erreur n'est fautive que lorsque le professionnel
ne respecte pas les données acquises de la science à la date des
soins, où il a été jugé que le médecin, en
privilégiant une technique par rapport à une autre n'engage pas
sa responsabilité dans la mesure où les données acquises
de la science à la date des soins ne permettaient de la
privilégier ou au contraire de la déconseiller par rapport aux
autres quant aux résultats espérés) ou fait une
interprétation erronée des symptômes observés au
regard des données acquises de la science.
De même, le médecin va engager sa
responsabilité s'il choisit une technique nouvelle ou
controversée et que celle-ci cause un dommage au patient. Elle comporte
des risques plus importants pour le malade et nécessite des
précautions particulières de la part du
90 Hamadi Saliha op.cit. p. 86
91 Cass. Civ 1er, 29 mai 1979, Gaz. Pal 1979, 2,
Panorama p. 417.
92 Le Fanasil est un bactériostatique principalement
indiqué pour le traitement du paludisme.
93Jacques DANGOUMAU op.cit. p. 478. Le syndrome de
Lyell (nécrolyse épidermique toxique) est un état
dermatologique potentiellement létal. Cet état
généralement induit par un médicament aboutit à la
nécrose aiguë de l'épiderme comme lors d'une brûlure
thermique ou chimique.
94 Montpellier 14 décembre 1954, D. 1955 p.
745. Voir aussi Bordeaux 18 janvier 1994, JURISDATA n°043879.
2018-2019 (c)Faculté de Droit
- 49 -
médecin. Il peut aussi s'agir d'un manquement fautif
dans le suivi des soins ou d'un défaut de surveillance du patient, ces
faits étant, aussi, susceptibles de donner lieu à des poursuites
pénales pour homicide involontaire.95
Ainsi, tout en devant respecter l'indépendance
professionnelle des pharmaciens, les médecins sont tenus de veiller
à la bonne qualité et préparation des médicaments
fournis à leurs malades par le pharmacien. Le tribunal de
première instance de Charleroi a, dans un jugement du 9 mai 1989,
considéré qu'« un médecin commet une faute lorsque,
malgré les questions du patient relatives à la nature
différente du médicament prescrit pour la deuxième fois,
il ne vérifie pas la composition exacte de la préparation
magistrale »96
|