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Problématique de la responsabilité civile pour fait des produits pharmaceutiques.


par Hervé NDUWA
Université de Lubumbashi(UNILU) /RDC - Licence en Droit privé et judiciaire  2019
  

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sous-section 3 Lien de causalité

2018-2019 (c)Faculté de Droit

58 KALOMBO MBIKAYI op.cit. p. 235.

Aux termes de l'article 258, le fait de l'homme l'oblige à réparer ce qui cause à autrui un dommage. De même, selon l'article suivent c'est-à-dire 259, « chacun est responsable du dommage qu'il cause » que ce soit par son imprudence ou sa négligence. Au-delà du fait personnel, la causalité s'impose, quel que soit le fait générateur de la responsabilité, le fait des chose ou le fait d'autrui. L'exigence du lien de causalité est réaffirmée au premier alinéa de l'article 260 selon lequel : « On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde. » En effet, l'exigence d'un lien causalité entre le fait générateur de responsabilité et le dommage subi par la victime résulte de ces quelques disposition du code civil. Approuvée par la doctrine qui y ressort notamment une exigence de la raison, la nécessité d'un lien de causalité entre la faute qui est le fait générateur et le dommage, ce qui engendre un des éléments constitutifs de la responsabilité civile, aux côtés de ces deux (faute et dommage).

Le lien de causalité présente en outre deux particularité :

En premier lieu, il constitue le critère distinctif de la responsabilité civile. Puisque la responsabilité n'est pas la seule technique de réparation des dommages, d'autres procédés d'indemnisation issus de méthodes de socialisation des risques ne ce cessent de se développer en droit positif. Il en est ainsi de la CNSS (Caisse nationale de la sécurité sociale). Parmi toutes ces techniques de réparation des dommages, seule la responsabilité civile nécessite la preuve du lien de causalité entre le dommage subi par la victime et le débiteur de la réparation. Ce dernier ne peut être qualifié juridiquement de responsable s'il n'est pas lié aux préjudices réparables par un lien de causalité.

L'exigence d'un lien de causalité permet donc de distinguer la responsabilité civile des autres techniques de réparation des dommages. Véritables régimes d'indemnisation, ces procédés de socialisation des risques dispensent la victime de rechercher la responsabilité individuelle de la personne qui est à l'origine de son dommage. Le débiteur a la réparation n'est plus nécessairement celui qui l'a causé.

En second lieu, la notion de causalité atteint de bout en bout le droit de responsabilité civile. En effet, la causalité intervient dans un premier temps, a l'instar du dommage et du fait générateur (la faute), comme condition de la responsabilité civile. Le lien causal doit être établi pour engager la responsabilité de l'auteur du dommage. Mais la causalité intervient également dans un deuxième temps, pour l'appréciation des causes d'exonérations et justificatifs du responsable. Le lien de causalité peut être écarté par ce dernier.

La question qui se pose est celle de savoir comment détermine-t-on l'origine d'un dommage causé a une personne que telle ou telle faute d'une autre personne est « la cause » du dommage subi.

A cette question la jurisprudence et doctrine ont dégagées une réponse : pour qu'une faute constitue la cause du dommage intervenu, qu'elle soit la condition nécessaire directe et immédiate du dommage c'est-à-dire qu'elle puisse entrainer le dommage tel qu'il s'est produit. Faudra-t-il autrement dit que la faute soit telle que sans elle, le dommage ne se serait pas produit tel qu'il s'est produit.58

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1. Application de la notion de causalité

Il est clair que le lien causal n'est certainement pas établit s'il est constaté que sans le fait reproché à l'auteur qu'on va appeler ici « défendeur » le dommage se serait néanmoins produit. En d'autres termes, lorsque l'évènement analysé n'apparait pas comme une condition sine qua non du dommage responsabilité est écartée.

A l'inverse, en cas d'incertitude relative à la question de savoir si le fait reproché au défendeur, le dommage se serait pas produit, la réponse à la question de la causalité n'est pas tout aussi simple. En effet, si ce fait peut être alors analysé comme l'une des causes matérielles du dommage, la question qui reste est de savoir s'il en est par là même l'une des causes juridiques, de nature à engager la responsabilité de son auteur.

Il arrive qu'une faute entraine plusieurs dommages au même moment. Il en est ainsi lorsque les dommages affectent une victime immédiate et des victimes par ricochet au préjudice réfléchi.59 Il en est de même lorsque les dommages en chaines atteignent une seule et même victime. L'exemple le plus en vogue est celui donné par Pothier : où, après avoir acheté une vache malade, un cultivateur se trouve ruiné, n'ayant pas pu cultiver ses terres suite à la contamination de tous les autres boeufs de la ferme. Le vendeur de la vache malade peut-il être déclaré responsable de la ruine du cultivateur ?60 il est à noter évidemment que la question ne se pose réellement qu'une fois rapportée la preuve d'une causalité matérielle, c'est-à-dire, une fois établi que sans la faute, le dommage final ne se serai pas produit. A défaut d'une telle preuve, la responsabilité est naturellement écartée. Or, plus on s'éloigne de la faute, plus la preuve du lien de causalité sera difficile à rapporter, en raison de l'intervention d'autres causes éventuelles du dommage. En l'espèce, si le cultivateur se serait peut-être quand même ruiné sans l'achat de la vache malade, la preuve du lien de causalité entre la faute du vendeur et le dommage final ne serait pas rapportée. En revanche, à supposer que sans la faute du vendeur, le cultivateur eut échappé à la saisie de ses biens, faut-il pour autant estimer que cette faute est la cause juridique de ce dommage, obligeant son auteur a réparation ? c'est ça que la doctrine a qualifiée de dommage en cascade.

La question de la causalité intéresse depuis longtemps la doctrine. Pour autant, l'accord ne se fait pas sur le sens exact qu'il convient de donner à cette notion, face à la difficulté de dégager une conceptuelle satisfaisantes, certains auteurs refusent tout effort de définition et adoptent une attitude pragmatique faisant plus appel au bon sens qu'aux raisonnements théoriques, il a même été envisagé de ne plus voir dans le lien de causalité une condition de la responsabilité mais plutôt de considérer l'absence de la causalité comme étant une raison pour le juge de prononcer une fin de non-recevoir.61 Quant à la jurisprudence, elle adopte une attitude empirique rendant vain tout effort de systématisation. En effet selon cette jurisprudence a admis que la chose n'est rattachée au dommage par un lien de causalité suffisant que si elle a joué un rôle actif dans sa réalisation. La simple intervention matérielle de la chose ne suffit pas dans la responsabilité civile pour fait des choses. 62

59 Supra p. 22.

60 Pothier dans traité des obligations n 166, cité par Mireille Bacache-Gibeili op.cit. p. 410.

61 J. Carbonnier, Droit civil, T. IV, les obligations, Thémis, paris, p.216.

62 Civ. 2e, 7 avril 2005, RCA 2005, com. N 173, obs. note de Mireille Bacache-Gibeili.

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2. Preuve de la causalité

Il appartient à la victime de rapporter la preuve de lien de causalité entre la faute de responsabilité et son dommage. Néanmoins, si le principe selon lequel la charge de la preuve du lien causal incombe au demandeur est toujours affirmé en jurisprudence, certaines atténuations ou exceptions en tempèrent largement les conséquences, dans le souci d'une meilleure protection des victimes.

Le principe demeure tel que, c'est au demandeur à l'action, lui qui souffre du dommage causé par la faute de son débiteur de rapporter la preuve du lien de causalité entre le fait générateur de la responsabilité et le dommage subi. Par conséquent, s'il est établi qu'en l'absence du fait évoqué, le dommage se serait néanmoins produit, on aurait eu la même ampleur, la responsabilité est écartée directement. La certitude de l'absence de causalité constitue incontestablement un obstacle à l'action en responsabilité. Pour autant cette hypothèse n'est pas fréquente dans la pratique. Très souvent, un doute subsiste quant au lien de cause à effet entre le fait du demandeur et le dommage subi. Cette incertitude relative au lien causale devrait entrainer simplement le rejet de l'action en responsabilité, au même titre que la certitude de l'absence de causalité.

En France, le recours à des présomptions de faits n'est possible qu'en cas d'incertitude affectant le seul lien de causalité juridique. En revanche, en présence d'une incertitude causale scientifique l'action en responsabilité doit être écartée, faute de lien de causalité établi. La distinction entre la causalité juridique et celle scientifique trouve à s'illustrer dans le domaine de la responsabilité du fait des produits de santé, comme en témoigne un arrêt de la première chambre civile du 23 septembre 2003 relatif au vaccin contre l'hépatite B. en l'espèce, un mois après avoir reçu trois injections de vaccin anti-hépatite B, une personne commence à ressentir des symptômes qui conduisent au diagnostic de la sclérose en plaques. Elle agit en responsabilité contre le laboratoire, fabriquant du vaccin, en invoquant la violation, par ce dernier, de son obligation contractuelle de sécurité. L'arrêt fait droit à sa demande en estimant notamment possible une association entre le vaccin et la maladie développée par la victime, eu égard à un faisceau d'indices graves précis et concordants, tels que la concomitance de la maladie et du vaccin, le nombre élevé de victimes ou l'absence d'autres causes de déclenchement. La cour d'appel avait pourtant constaté au préalable qu'aucune étude scientifique ne mettait en évidence l'existence d'un lien certain entre le vaccin et la maladie de la sclérose de plaque, ni n'excluait de façon aussi certaine la possibilité d'une telle association. Elle avait de la sorte choisie d'avoir recours aux présomptions de fait de l'article 1353 du CCF, aux termes duquel le juge peut en la matière se fonder sur des présomptions de fait graves précises et concordantes, pour estimer rapporter la preuve de la causalité juridique, en présence d'une incertitude scientifique. L'arrêt est cassé, aux motifs qu'il résultait des contestations de la cour d'appel que le défaut du vaccin, comme lien de causalité entre la vaccination et la maladie ne pouvait être établis ». En d'autres termes, le doute scientifique ne peut être remplacée par une certitude juridique, au moyen des résomptions. Alors qu'à l'ère actuel de la science, il n'est pas encore prouvé qu'il existe une relation certaine de causalité entre le vaccin contre l'hépatite B et la sclérose en plaque.63 Une telle action doit être déboutée pour défaut de preuve du lien causal.

La causalité est présumée lorsque la victime est dispensée de rapporter la preuve d'un rapport de nécessité entre le fait reproché au défendeur et le dommage qu'elle subit. Pour

63 Mireille Bacache-Gibeili, op.cit. p.428 et 429.

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autant, les présomptions de causalité ne produisent pas toutes le même effet à l'égard du responsable. Certaines, qualifiées de présomptions simples, peuvent être renversées par le défendeur, elles permettent alors au responsable de rapporter la preuve contraire, c'est-à-dire d'établir que son fait ou le fait dont il répond n'a pas été l'une des conditions sine qua non du dommage subi par la victime. D'autres présomptions que l'on qualifie d'irréfragables sont plus énergiques, insusceptible d'être renversées, elles n'autorisent pas le responsable à établir que son fait n'a pas été l'une des conditions nécessaires au dommage. Les trois conditions de la responsabilité civile, à savoir le fait générateur qui est la faute, le dommage et le lien de causalité sont alors toutes définitivement réunies, le seul moyen qui reste à la disposition du responsable pour échapper à l'obligation de réparer le dommage causé consiste alors à invoquer la cause étrangère, à savoir la force majeure ou la faute de la victime que nous pouvons passer un mot dessus :

a. Cause étrangère

Le lien causal établi entre le dommage et le fait générateur peut être écarté par le responsable invoquant la cause étrangère. Ayant pour effet d'exonérer le responsable ou d'alléger la charge finale de la réparation, la cause étrangère invoquée par le défendeur suppose nécessairement établies, au préalable, les conditions de la responsabilité civile.

La cause étrangère est tout évènement extérieur au responsable ayant joué un rôle causal dans la production du dommage. Les conséquences de la cause étrangère dépendent précisément de l'intensité de ce lien causal. Tout d'abord, la cause étrangère peut avoir joué un tel rôle causal dans la production du dommage qu'elle évince toutes les autres causes. Elle alors pour effet de rompre le lien de causalité entre le fait imputable au défendeur et le dommage, c'est le cas lorsque l'évènement envisage était pour le défendeur imprévisible et irrésistible. Ensuite, le rôle causal de la cause étrangère peut être moins intense et laisser subsister, a ses cotes, le fait reproché au défendeur. A défaut d'être rompue par la cause étrangère non constitutive de force majeure, la causalité est alors partagée. L'exonération ne peut être dans ce cas que partielle.

Pour constituer une cause étrangère, l'évènement envisagé doit obéir à une double condition. Premièrement, il doit s'agir d'un fait qui constitue, à l'instar de celui imputable au défendeur, une cause juridique dont souffre la victime. La cause étrangère doit donc être nécessairement l'une des conditions sine qua non du dommage. Deuxièmement, il doit s'agir d'un fait causal extérieur au défendeur. La condition d'extériorité est inhérente à la nation même de cause étrangère.

b. La force majeure

La force majeure est une variété de cause étrangère qui a pour effet d'exonérer totalement le responsable. Le fondement de l'exonération totale réside dans la rupture du lien de causalité entre le fait imputable au défendeur et le dommage subi par la victime : la force majeure serait exonératoire en ce qu'elle établirait la preuve de l'absence de faute du défendeur. La justification n'est pas pleinement convaincante dans la mesure ou la faute n'est pas une condition nécessaire à toute responsabilité, celle-ci peut être objective, contrairement au lien de causalité qui reste le seul élément caractéristique de toute responsabilité civile. L'évènement causal extérieur présentant les caractères de la force majeure absorbe à lui seul toute la causalité

 

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du dommage et prive le fait dont répond le responsable de tout effet causal. L'importance du rôle causal de la force majeure rend toutes les autres causes juridiquement insignifiantes, ce qui incite a présenté la force majeure comme étant « la cause exclusive » du dommage.

La force majeure est par définition un évènement extérieur imprévisible et irrésistible qui a pour effet de rompre le lien de causalité entre le fait dont répond le défendeur et le dommage. Il en résulte deux conséquences relatives à l'appréciation de cette cause d'exonération.

En premier lieu, la force majeure doit être définie de façon purement objective. En effet, tout évènement extérieur, imprévisible et irrésistible peut constituer un cas de force majeure et entrainer par surcroit l'exonération totale de la responsabilité. Il en est ainsi du cas fortuit, entendu comme un évènement naturel ou anonyme, du fait de la victime ou du fait d'un tiers.

En deuxième lieu, aucun évènement, considéré en lui-même, ne peut constituer un cas de force majeure. Il n'existe pas de liste préétablie de cas de force majeure. Le même évènement peut, selon les circonstances de l'espèce, rompre le lien causal ou le laisser particulièrement subsister. Seul compte, au-delà de la nature de l'évènement envisagé, l'intensité de sa participation causale au dommage. La force majeure s'apprécie de façon relative, par rapport aux faits de chaque espèce, et non de façon absolue en fonction de la nature de l'évènement extérieur.

c. La faute de la victime

La causalité étant partage tout fait de la victime devrait entrainer une exonération partielle du responsable. Cependant, la stricte logique de la causalité partielle devrait être tempérée par des considérations plus objectives tenant au soucis l'indemnisation de la victime. La prise en compte du fait causal de la victime constitue en effet un obstacle à la réparation intégrale de son dommage. C'est en ce sens que s'est orientée la jurisprudence aussi bien dans la détermination de la nature du fait causal exonératoire, que dans celle du domaine et de l'étendue de l'exonération partielle.

Le principe de l'exonération partielle par la faute de la victime connait en droit positif un domaine très large. Il joue quelle que soit la nature de la responsabilité encourue et quel que soit le fait générateur de responsabilité en cause. Bien plus, la victime peut se voir opposer non seulement sa propre faute mais aussi la faute des personnes dont elle est responsable. La faute de la victime peut être opposée à la victime par ricochet pour limiter son droit à réparation. Le principe de l'exonération partielle connait néanmoins des exceptions. Il en est en outre fortement contesté en présence d'une faute commise par une victime privée de discernement.

La jurisprudence répressive a fait naitre des exceptions à ce principe d'exonération partielle. Après avoir tout simplement écarté, puis cantonné aux infractions involontaires, désormais, l'auteur de l'infraction pénale, même volontaire, peut sur le plan civil profiter d'un partage de responsabilité, en présence d'une faute de la victime. Pour autant, le principe n'est pas absolu, dans la mesure où il ne s'applique qu'en matière d'infraction contre les personnes. En revanche, l'auteur d'une infraction intentionnelle contre les biens ne peut invoquer la faute de négligence de la victime pour réduire le montant de l'indemnisation mise à sa charge64. Cette exception se justifie en opportunité : afin d'éviter que l'auteur de

64 Crim. 27 mars 1973, RTD civ. 1973, p. 780, obs note de Mireille Bacache-Gibeili n 434 p. 486.

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l'infraction conserve une partie du bénéfice qu'il a pu en retirer, la faute de la victime est privée de sa vertu partiellement exonératoire.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille