I.1.2. Quelques représentations
d'élèves de niveau CM et 6è
Nous pensons comme Ausubel (1978) cité par Cañal
(1993, p.8) que « le facteur le plus important qui influence
l'apprentissage est ce que l'élève connaît. Connaissez-le
et enseignez en conséquence ». Ainsi en plus de partager
l'importance que donne ce chercheur aux conceptions des élèves,
nous estimons que tout enseignement scientifique doit en faire le point de
départ. Voilà pourquoi nous nous y intéressons dans cette
partie.
De nombreuses recherches ont permis de recueillir quelques
conceptions d'élèves de niveau sixième ou d'un niveau
voisin, sur la nutrition et la croissance des plantes, dont nous
présentons ici, un bref aperçu issu de Cañal (1993) et de
Guichard et al. (2001).
Cañal (op.cit.) rapporte que les études de
Barker (1985) révèlent qu'il est peu probable que des
élèves de CM2 aient des conceptions sur la photosynthèse,
qui ne leur a pas encore été enseignée. Cependant,
plusieurs obstacles maintiennent les conceptions des apprenants à cet
âge, à propos de la nutrition et la croissance des plantes. Le
plus fréquent est la reproduction du modèle animal de nutrition
chez les plantes.
15
Guichard et al. (2001, p.97) rapportent que lors de ses
travaux, Vandersee (1983) obtient cette réponse d'un élève
de primaire : « ...la terre c'est l'aliment de la plante, sans elle la
plante ne peut pas vivre ». Il a noté aussi d'autres
réponses similaires : « Quand il y a plus de feuilles, la plante
boit davantage », « La chlorophylle c'est comme quand on est en
forêt, on se soigne avec » (Réponse de Tracy, 7 ans).
I.2. Quelques cas d'enseignement des
phénomènes biologiques lents
Dans sa thèse qui traite d'un phénomène
lent, la digestion, Hraïri (2004) analyse l'articulation faite entre l'in
vivo et l'in vitro dans les expériences menées en classe. Son
corpus de données était constitué d'enregistrements
audio-vidéos faits à partir de séances réelles
d'enseignement expérimental de la digestion, et d'interviews
d'enseignants et d'élèves préalablement observés.
Elle tente ainsi de montrer que le curriculum tunisien ne prend pas
suffisamment en compte les spécificités du vivant dans les
enseignements. Sa recherche, même si elle met un accent sur la
problématisation de la digestion comme démarche d'apprentissage,
ne s'intéresse pas de façon particulière à la
question de l'observation ni à la problématique de la contrainte
temporelle dans l'enseignement de la digestion.
L'enseignement de la photosynthèse était au
coeur du sujet de thèse d'Ali (2011). Ce dernier part d'une analyse du
curriculum et d'une enquête auprès d'enseignants, pour montrer la
nécessité d'orienter l'enseignement scientifique dans les
séries agricoles et générales du Liban, vers une
éducation à l'environnement et au développement durable.
Cette thèse ne s'intéresse donc pas à la
photosynthèse en tant que réaction biologique lente. Ce
phénomène a été étudié en tant que
processus physiologique au coeur des productions végétales.
La thèse d'Aroua (2002) en Tunisie, s'intéresse
plutôt au discours tenu sur un autre phénomène lent,
l'évolution du vivant. Cette chercheure part d'un questionnement sur la
scientificité du discours tenu sur l'évolution du vivant dans son
pays. Elle s'est proposé de faire susciter un regard
épistémologique chez des élèves à travers un
dispositif innovant d'enseignement. En effet, il s'agissait pour la chercheure
de concevoir et d'évaluer un dispositif d'enseignement axé sur le
débat en classe, pour enseigner la théorie de l'évolution.
Elle a enregistré des interventions en situation pré
Tout comme nous le faisons dans cette recherche, Kiema (2008)
a analysé les difficultés d'enseignement-apprentissage des
contenus de sciences. Il s'est
16
et post-dispositifs, et est arrivée à la
conclusion que son dispositif a permis de faire évoluer les discours des
élèves sur l'évolution du vivant. En effet, ces derniers
avaient un regard distancié sur le phénomène à
l'issue de la mise en oeuvre du dispositif. Tout comme dans ce type de
dispositif, le débat a également une place importante dans notre
recherche comme démarche pédagogique active, permettant de mieux
réussir l'étude des phénomènes biologiques lents en
classe.
De Vecchi (2005) a publié un livre intitulé :
« Une banque de situations-problèmes (vol1). » Dans ce livre,
il montre comment, par l'approche de la résolution de
situation-problème, l'enseignant peut rendre claire chez des
élèves de 6è, la compréhension de la
décomposition (putréfaction) des feuilles, un
phénomène lent et complexe.
I.3.Démarches scientifiques et
stratégies d'enseignement-apprentissage des SVT Selon Rumelhard
(2010, p.1), « la valeur principale d'un enseignement scientifique
résiderait dans son initiation à la méthode scientifique,
mieux, à la démarche scientifique, mieux encore à l'esprit
scientifique ». Il est présenté dans le paragraphe suivant,
quelques écrits sur l'enseignement scientifique, afin d'éclairer
davantage notre sujet qui se préoccupe également de la question
des stratégies d'enseignement scientifique.
Calmettes (2009) s'est intéressé à la
mise en oeuvre de la démarche d'investigation en sciences physiques. A
partir d'observations de classes d'enseignants stagiaires et
expérimentés, et d'entretiens réalisés
auprès des mêmes profils d'enseignants, il a analysé les
pratiques enseignantes pour les confronter aux prescriptions officielles. Il
ressort de son analyse une diversité de mise en oeuvre de la
démarche d'investigation chez les enseignants de sciences physiques. La
recherche de Calmettes (op.cit.) se fonde sur le constructivisme comme cadre
d'analyse de mise en oeuvre des démarches d'investigation. Comme dans le
cas de notre cadre théorique de référence, il s'est agi,
pour ce chercheur, de se référer aux théories qui
préconisent les méthodes actives. En revanche, la méthode
d'observation n'occupe pas une place particulière dans sa recherche.
17
particulièrement intéressé aux
difficultés que les enseignants rencontrent dans l'enseignement de
l'écologie dans les classes de seconde au Burkina Faso. Ses
enquêtes ont révélé que les enseignants rencontrent
de réelles difficultés dans l'enseignement de l'écologie
dans les classes de seconde. Le faible volume horaire exécuté,
l'escamotage des tâches assignées par le curriculum, l'absence de
séances de travaux pratiques sont les indicateurs de difficultés
qu'il a relevés.
Seni (2007) a réalisé son mémoire
d'inspectorat de l'enseignement primaire sur l'observation chez les apprenants
de cours moyen. L'enquête qu'il a effectuée lors de ses
recherches, montre que 27, 69% des enseignants enquêtés estiment
qu'il y a une rupture entre les exercices d'observation du primaire et les
contenus des sciences expérimentales enseignés dans les
collèges. Il prône donc une cohérence entre les contenus du
primaire et du post-primaire, pour une meilleure efficacité de
l'enseignement scientifique chez les jeunes apprenants. Son étude
rejoint notre travail de recherche en ce sens qu'il s'intéresse à
la problématique de l'enseignement expérimental. Mais, ses
travaux qui montrent une faible concrétisation des leçons de
sciences à l'école primaire ne traitent pas de façon
substantielle les questions qui sont posées dans le cadre de cette
recherche.
L'approche utilisée par Bodur et Guichard (2006) pour
faire face aux spécificités du vivant est la conception d'un
modèle « simulatif ». En effet, ils s'intéressent
à l'étude des mouvements d'extension et de flexion de
l'avant-bras sur le bras chez l'Homme, dans leur dynamique interne, mettant en
exergue les rôles de l'articulation, des os, des muscles, des attaches,
etc. La difficulté étant ici l'impossibilité de manipuler
et d'observer le vivant en mode « disséqué », ces deux
chercheurs proposent un logiciel de simulation à partir de
schémas scientifiques et de photos animées. Ils sont
arrivés à la conclusion que la simulation informatique
associée à la manipulation d'un modèle
matériel7, permet une meilleure compréhension de la
dynamique des mouvements de flexion et d'extension de l'avant-bras sur le
bras.
7 Ils ont utilisé des morceaux de cartons
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L'approche par simulation préconisée par ces
deux chercheurs ne propose donc pas une stratégie pour observer le
vivant en situation de classe. Elle se présente plutôt comme une
alternative à l'observation du réel, donc une approche
d'étude des phénomènes biologiques spécifiques.
Cette revue a permis de constater que les recherches sur le
sujet se focalisent, soit sur la problématique de l'observation, soit
sur la thématique des phénomènes biologiques lents.
D'où la particularité de notre sujet qui articule les deux
aspects.
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