Paragraphe 2 : L'actionnariat de la SOSUMO
Les mixtions des capitaux publics et privés ayant
généralement pour cadre les sociétés anonymes
soulèvent souvent le problème de la légitimité de
l'exercice du pouvoir : qui, du détenteur du pouvoir politique, ou de
celui qui contrôle le capital est sensé l'exercer? En principe, la
détention du pouvoir présente un avantage énorme pour
chaque catégorie d'actionnaire.40
Si on analyse le prescrit du CSP&PP, on se rend compte que
le législateur burundais n'a rien prévu pour assurer un
équilibre entre le détenteur du pouvoir politique et le
détenteur du capital. Le Code ne précise pas non plus si
l'actionnaire détient les deux à la fois et quel impact cette
situation a sur la vie de la société.
En réalité, il a laissé aux deux parties
le libre choix de fixer le montant du capital social ainsi que sa
répartition.41 En agissant ainsi, nous pensons que le
législateur burundais a voulu donner plus de poids à
l'actionnaire majoritaire. Mais cela peut conduire à l'abus de
majorité qui peut se manifester par une ingérence politique
excessive, la passivité du Conseil d'administration pouvant souvent
conduire à un manque de transparence.42
Dans le cas de la SOSUMO, le capital social a
été fixé à deux milliards cent quarante-cinq
millions (2 145 000 000 BIF) de francs burundais, représentant vingt et
un mille quatre cent cinquante (21 450) actions toutes entièrement
libérées43 et dont la valeur nominale est de cent
mille (100 000 BIF) francs burundais. Ce capital est réparti comme suit
:
39 Article 2 des statuts harmonisés de la
SOSUMO.
40 Désire Cashmir KOLONGELE EBERANDE, Le
Pouvoir dans les sociétés à capitaux mixtes. Aspects de
droit français, OHADA et congolais, thèse de Doctorat,
Université Paris 1, Panthéon- Sorbonne, LGDJ, Paris 2012,
p.123.
41 Article 545 du CSP&PP.
42 Gouvernance des Entreprises Publiques :
Panoramique des pays de l'OCDE, op.cit. p.1. 43Article
5 des statuts harmonisés de la Sosumo s.m avec CSP&PP.
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1° l'Etat du Burundi : 21 250 actions ;
2° la Société « Brasserie et Limonaderies
du Burundi): 100 actions ; 3° la Société Ecobank du Burundi
s.a : 100 actions.
Au regard de cette répartition, quand bien même
la SOSUMO se veut être une société d'économie mixte,
l''Etat est largement majoritaire à tel point qu'il risque d'imposer ses
décisions aux actionnaires minoritaires qui ne feront que s'y plier. Or,
dans un cas comme celui-ci, l'exercice du pouvoir au sein des organes sociaux
est susceptible d'engendrer des abus de pouvoir et des conflits
d'intérêts entre deux types d'actionnaires aux
intérêts opposés.
En effet, le dispositif exorbitant du droit commun propre aux
sociétés mixtes qui vise à assurer à l'Etat
actionnaire la prise en compte de l'intérêt général
dans le fonctionnement des organes sociaux au mépris parfois du principe
de proportionnalité peut s'ériger en vraie source de
déséquilibre des intérêts, coupant ainsi l'herbe
sous les pieds des investisseurs privés.44
Mais, l'Etat, en choisissant de mettre en commun ses apports
avec ceux des actionnaires minoritaires accepte de veiller à ce que ces
derniers puissent bénéficier d'un traitement équitable.
Il est d'ailleurs de son intérêt de veiller
à ce que les actionnaires minoritaires soient traités avec
équité puisque sa réputation dans ce domaine a une
influence sur la capacité à attirer les investisseurs.
Dans la gestion de ce genre de situation, nous pensons qu'il
devrait plutôt se référer aux clauses statutaires et aux
pactes d'actionnaires qui sont à même d'équilibrer les
rapports de pouvoir et d'intérêts entre actionnaires au niveau
aussi bien des droits individuels que des droits collectifs au sein des organes
sociaux.
En effet, les clauses pouvant être contenues dans le
pacte d'actionnaires concerneraient le droit de vote, celles concernant
l'actionnariat, le droit de souscription ainsi que la stabilité du
capital propre. Aussi, la souplesse avec laquelle les organes de gestion
assument leurs responsabilités peut tempérer les
déséquilibres.
44 Désire Cashmir KOLONGELE EBERANDE,
op.cit, p.267.
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