CONCLUSION GENERALE
Les sociétés commerciales sont des acteurs
clés du développement économique. Pour une bonne
régulation de leur fonctionnement, le législateur burundais a mis
un place un cadre légal et institutionnel les régissant. Il
s'agit notamment du Code des Sociétés Privées et à
Participation Publique, de la loi sur la Faillite, de la loi sur
l'Insolvabilité du Commerçant et du Tribunal de commerce. Leur
mode de fonctionnement est défini par le CSP&PP qui a prévu,
à cet effet, des organes de gestion et d'administration pouvant
différer selon le type de société.
Dans les sociétés mixtes qui ont fait objet de
notre étude, le mode de fonctionnement est calqué sur celui des
sociétés anonymes, c'est-à-dire celui où coexistent
les organes de délibération, d'administration, de gestion et de
contrôle, chaque organe étant doté de certains pouvoirs qui
lui permettent de bien remplir ses missions. Aussi, ces organes doivent-ils
agir dans l'intérêt général des actionnaires et non
privilégier leurs propres intérêts sinon il y aurait abus
de pouvoir que la loi sanctionne.
Les sociétés mixtes se caractérisent donc
par une démocratie où le pouvoir de l'actionnaire se mesure au
nombre d'actions qu'il possède. Mais, pour que les actionnaires
majoritaires n'abusent de leur pouvoir, le législateur burundais a
prévu un organe de contrôle constituant un contre-pouvoir : le
Commissaire aux Comptes.
Il a également réservé aux actionnaires
beaucoup d'instruments pour contrôler les dirigeants de la
société. Parmi ceux-là, le droit à l'information
apparait comme une garantie efficace dont ils disposent pour s'enquérir
de la vie financière de la société. Ce droit à
l'information permet d'instaurer un climat de confiance entre les actionnaires,
vrais propriétaires de la société et les organes
dirigeants qu'ils ont désignés pour conduire la destinée
de la société.
Les actionnaires se servent également de cet instrument
pour défendre leurs intérêts, lorsqu'ils constatent une
situation anormale pouvant compromettre la vie de leur société.
Dans ce cas, ils peuvent alerter la juridiction compétente afin que
celle-ci prenne des mesures préventives contre d'éventuelles
situations chaotiques pouvant survenir. Néanmoins ce droit à
l'information doit être régulé. Car, dans un monde
où la concurrence est devenue un des moyens les plus efficaces pour
s'attirer la sympathie de la clientèle, les dirigeants de la
société doivent trier, parmi la masse d'informations disponibles,
celles qui sont à mettre à la portée des actionnaires.
Mais pour que cette restriction ne puisse pas provoquer de conflits, le
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législateur a trouvé une parade en ne permettant
aux actionnaires de poser des questions que deux fois par exercice ou en leur
donnant la latitude de se rendre au siège de la société
pour consulter les documents comptables.
De même, comme dans toute démocratie, les
actionnaires disposent d'un droit de vote, la prérogative par excellence
dont dispose tout actionnaire pour participer à la vie sociale en
exprimant ses propres visions quant à l'avenir de la
société. Ce droit de vote est proportionnel au nombre d'actions.
Cependant, dans certaines sociétés comme la SOSUMO où
l'Etat est largement majoritaire (99 %), la décision de l'actionnaire
majoritaire risque de phagocyter celle des minoritaires et peut être
source de crises. C'est pourquoi, pour sauvegarder la confiance des partenaires
de la société, le législateur burundais, à l'instar
des autres législateurs, a prévu des mécanismes de
prévention de ces crises, notamment le droit des actionnaires à
déclencher l'alerte ou de demander la nomination d'un administrateur
provisoire.
Pour ce qui est de l'administrateur provisoire, il s'agit d'un
mandataire de justice chargé, en cas de graves crises sociales
résultant d'un dysfonctionnement des organes de gestion ou d'un conflit
entre actionnaires mettant en péril les intérêts de la
société, d'assurer momentanément la gestion de la
société en lieu et place des organes dirigeants. Mais,
étant donné que celui-ci intervient dans une situation
particulière, il ne doit agir que dans l'unique dessein de sauver la
société, en normalisant le fonctionnement et en permettant aux
actionnaires de profiter des fruits générés par elle.
Ici aussi, le partage des bénéfices est soumis
à certaines règles. Par cette règlementation, le
législateur a voulu éviter les éventuelles
opérations frauduleuses des actionnaires qui pourraient aboutir au
morcellement du capital par la distribution des dividendes fictifs. Il avait
également le souci de séduire et de fidéliser les
partenaires de la société. C'est pourquoi il a aussi prévu
des sanctions à l'encontre des actionnaires qui se partageraient les
dividendes fictifs.
En outre, comme l'objectif de créer une
société ne peut uniquement se limiter au partage des
bénéfices, les actionnaires ont le devoir d'investir pour
l'avenir de leur société, raison pour laquelle la loi leur impose
la constitution, à partir du bénéfice, d'une
réserve de 5 %, qui ne cesse d'être obligatoire que quand elle
totalise 10 % du capital social. Nonobstant cette obligation légale, les
actionnaires peuvent en prévoir une dans les statuts ou décider
d'en
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constituer d'autres ultérieurement, qui dans ces cas se
définissent comme des réserves facultatives.
Nous savons que, comme toute autre vie, celle de la
société ne peut toujours être vue en rose. Des
événements malheureux peuvent survenir et conduire à sa
liquidation. Devant une telle situation les actionnaires doivent
désintéresser leurs créanciers et au cas où il
resterait quelque chose, se le partager sous forme de boni de liquidation.
Cependant la distribution du boni de liquidation constitue un
fait juridique unique dans la vie d'une société puisqu'il
n'arrive qu'une seule fois, juste avant la `'mort» de la
société. En cas de provision insuffisante, les actionnaires
doivent se préparer à supporter le mali de liquidation.
Enfin, pour que la démocratie n'empiète pas sur
les droits des minorités, le législateur a mis en place des
dispositions pour protéger la minorité contre l'abus de
majorité, tout en rappelant que l'intérêt social doit
primer sur l'intérêt individuel des actionnaires.
Cette protection particulière des actionnaires
minoritaires présente un intérêt certain car, elle vient
les sécuriser contre l'usage abusif du droit des majorités,
celles-ci étant informées qu'en cas d'usage abusif de leur droit,
les minoritaires ont la prérogative d'intenter une action en justice
pour éventuellement obtenir réparation.
Au cours de notre travail de recherche, nous avons
constaté que bien que le législateur burundais ait prévu
des dispositions légales et réglementaires pour protéger
les actionnaires minoritaires dans les sociétés mixtes, le
pouvoir actionnariale forte de l'Etat peut vicier l'intérêt social
alors qu'il est le but principal de création d'une
société. C'est pourquoi, nous pensons qu'il faudrait voir comment
plafonner les actions de l'Etat dans ces types de sociétés.
En outre, la législation burundaise donne l'actionnaire
à poser deux fois par exercice des questions aux dirigeants de la
société sur toute question relative à la vie de la
société. Nous pensons qu'il fallait multiplier les
séquences de poser des questions chaque fois que ceux-ci ont un
problème à soulever. Enfin étant donné les
progrès réalisés dans les nouvelles technologies de la
communication et de l'information, il est nécessaire que le
législateur pense à réviser le code des SP&PP en
intégrant les Nouvelles Technologies de l'Information et de la
Communication notamment en ce qui concerne le vote par voie
électronique.
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