La protection des interets des actionnaires minoritaires dans les societes mixtes cas de la societe sucriere de Moso (SOSUMO)par Jean Claude BIZIMANA Université Lumière de Bujumbura - Master 2021 |
Paragraphe 2 : La mission du liquidateurLa mission du liquidateur est intimement liée à son mode de désignation. Mais dans tous les cas que ce soit en cas de liquidation à l'amiable (A) ou judiciaire (B), il a de grandes responsabilités tant envers les créanciers qu'envers les débiteurs de la société. A. La mission du liquidateur « amiable »En cas de liquidation, les associés doivent nommer un liquidateur Cette obligation légale est prise en Assemblée générale extraordinaire. Au cours de celle-ci, les associés fixent les conditions de la liquidation.257 La mission principale du liquidateur est de réaliser l'actif. Pour cela, il dispose des pouvoirs de recouvrer toutes les créances sociales, quel que soit le débiteur y compris les associés. Il doit également procéder à la vente de tous les actifs de la société Il est également libre du choix du mode de cession dans le respect de l'intérêt de la société. Le liquidateur dispose des pouvoirs de transiger et de compromettre. Mais, le liquidateur doit tenir régulièrement informés les actionnaires, car la survie de la personnalité morale permet le respect des rites sociétaires.258 La liquidation amiable de la société impose l'apurement intégral du passif. Le liquidateur doit ainsi payer les créanciers de la société. Celle-ci n'étant pas placée sous le régime des procédures collectives, le principe applicable est le droit commun. Les créanciers sont donc payés « au prix de la course» voire par compensation. Néanmoins, en cas d'opposition d'un créancier, le paiement devra se faire « au marc le franc» sous contrôle judiciaire.259 257 Article 104 du CSP&PP 258 Philippe Merle, Anne Fauchon, op.cit. p.224. 259G. RIPERT et R. ROBLOT par M. GERMAIN, op. cit. p. 117 71 En pratique, le liquidateur s'efforce généralement de réaliser un état liquidatif avant de payer les créanciers afin de faire apparaître le passif privilégié, le passif chirographaire et des éventuels prêts participatifs qui seront remboursés en derniers.260 La distribution des fonds se fera selon les modalités prévues dans l'acte nominatif en cas de liquidation amiable, et librement, en cours de procédure, en cas de liquidation judiciaire.261 Au Burundi, les conditions de liquidation sont prévues par les articles 102 à 115 du CSP&PP. En effet, ces articles précisent les modalités de liquidation, la nomination d'un liquidateur ainsi que les personnes ayant qualité pour nommer le liquidateur. En cas de liquidation, les associés ont l'obligation de nommer le liquidateur au cours d'une Assemblée générale ordinaire. S'ils ne le font pas, toute personne intéressée peut demander en justice la nomination d'un liquidateur. Aussi, le législateur a prévu des mesures préventives pour éviter que des personnes ayant eu dans la société qualité d'associé en nom, de Gérant, d'Administrateur, de Directeur Général, de membre du Conseil de Surveillance, de membre du Directoire, de Commissaire aux Comptes ou de Contrôleur, ne puissent profiter de leur position dans la société pour s'octroyer des avantages dans la société en liquidation. Pis encore le législateur burundais interdit formellement la cession de tout ou partie de l'actif de la Société en liquidation au liquidateur, à ses employés, conjoint, ascendants, ou descendants, frère, soeur ou alliés jusqu'au deuxième degré.262 B. La mission du liquidateur d'une société en liquidation judiciaire Dès sa nomination, le liquidateur se substitue aux organes de direction qui perdent leurs pouvoirs de gestion et de représentation à compter de la dissolution de la société.263 Le liquidateur est désormais le seul représentant de la société.264Une fois donc nommé, il dessaisit le débiteur de la libre disposition de ses biens, mais il doit remplir sa mission avec diligence, car en cas de mauvaise exécution, il peut encourir des sanctions pénales et même civiles. 260 Philippe Merle, Anne Fauchon op. cit. p.165 261Cass. Com., 19 janv. 1993, n° 91-10534 262 Article 108 du CSP&PP. 263 Maurice Cozian, Alain Viandier, Florence Deboisssy, op.cit. p.224 264 Com. 6 juin 1990, Bull Jolly, 1990, 866 n° 262
Dans l'exécution de sa mission, le liquidateur doit accomplir certains actes et ne pas en omettre certains autres, car les sanctions pénales supposant omission consciente ou de mauvaise foi269. Mais, ce qu'il faut souligner ici c'est que les statuts ou une convention entre associés peuvent toutefois modifier les obligations des liquidateurs.270 Les infractions peuvent également résulter de la commission ou de la négligence. 265M. JEANTIN et P. LE CANNU, Droit commercial, Entreprise en difficulté, Dalloz 7èmeéd. 2007, p. 706 266JCl. Commercial, Fasc. 2702, par J. VALLANSAN et M. BEAUBRUN 267Cass. com., 15 mai 2001, n° 98-15106 : « si le débiteur est recevable à former un pourvoi contre l'arrêt qui statue sur la liquidation de ses actifs, il ne peut, s'agissant d'une personne morale dissoute en application de l'article 1844-7.7 du Code civil et dont le dirigeant est privé de ses pouvoirs à compter de la liquidation judiciaire, exercer ce droit que par l'intermédiaire de son liquidateur amiable ou d'un mandataire ad hoc» 268 Etienne Grosbois, op.cit. p.209 269Jean Larguier, Philippe Conte, op.cit p.401. 270Crim. 9 mai1977, B.163 73 Ainsi, le liquidateur est responsable à l'égard tant de la société que des tiers des conséquences dommages des fautes par lui commises dans l'exercice de ses fonctions, le liquidateur qui refuse ou néglige de communiquer aux associés les comptes de liquidation et/ou de convoquer l'Assemblée générale.271 Aussi, en cas de mauvaise foi, il est pénalement responsable. Celle-ci se manifeste quand le liquidateur aura fait des biens ou crédit de la société en liquidation un usage qu'il savait contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise à laquelle il était intervenu directement ou indirectement (...).272 Les peines encourues varient d'une servitude pénale d'un an à cinq ans de prison et d'une amende de cent mille à un million de francs burundais.273 Les actionnaires en créant la société n'ont qu'une seule idée en tête, celle de la voir prospérer et générer des bénéfices. Mais, une fois que celle-ci voit le jour, elle suscite trop de convoitises et de hantises que des tensions entre coassociés surgissent et qui si on n'y prend pas garde risquent de provoquer la disparition de la société. Pour éviter cet état de fait, le législateur burundais à l'instar des autres législateurs a mis en place une législation permettant aux actionnaires d'être régulièrement informés sur la situation de leur société et poser des questions aux dirigeants de la société chaque fois qu'il existe des points obscurs dans la gestion de biens de la société. Bref, les actionnaires doivent se sentir comme dans « une maison en verre» pour permettre la confiance entre actionnaire et les dirigeants mandatés par ces derniers et qui ont du reste l'obligation de résultat envers ceux qui les ont donnés mandat. En outre, comme dans toute démocratie, le pouvoir appartient aux actionnaires et corollairement à celui-ci, les actionnaires ont droit de participer aux Assemblées générales et d'y prendre la parole. Mais, comme dans toute la vie sociale, il peut survenir des crises aux sein des actionnaires et afin que ceux-ci ne puissent porter préjudice à la société et décourager les parties prenantes de celle-ci, le législateur a prévu des mécanismes de prévention de conflits potentiels et en cas de survenance de tels conflits, il a mis en place des organes pouvant les régler. 271 Article 114 du CSP&PP 272 Article 164de du CSP&PP. 273 Article 477 et 482 de la loi n° 1/27 du 29 décembre 2017 portant révision du code pénal. 74 Enfin, comme toute personne, la société peut mettre fin à ses missions par liquidation amiable des actionnaires ou sur décision de justice. Etant donné que la société atteint une étape ultime, le législateur a prévu un arbitre appelé liquidateur pour gérer les biens de la société afin de faire rentrer dans leurs droits toute personne qui avait intérêt dans la société y compris les actionnaires minoritaires. 75 |
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