Section 2 : Les droits financiers des actionnaires
Les actionnaires, en créant une société
commerciale, visent en premier lieu le partage des bénéfices, ou
s'attendent à en tirer d'autres profits économiques qu`elle
pourrait générer176. Cette vocation financière
de l'entreprise se matérialise généralement, pour
l'actionnaire, par la jouissance de son droit aux dividendes,
c'est-à-dire aux quotte- parts des bénéfices
distribués à la fin de chaque exercice (Paragraphe 1), ainsi que
de son droit aux réserves qui représentent la masse des
bénéfices non distribués et aux boni de
liquidation177 (Paragraphe 2).
Paragraphe 1. Le droit aux dividendes
Le but de la création d'une société
commerciale est avant tout de réaliser des bénéfices pour
le compte des actionnaires. C'est pourquoi des auteurs ont pu dire que la
société commerciale n'a pas d'âme : elle ne connait pas les
sentiments affectifs. Elle est guidée par un seul but : la recherche de
bénéfices.178 Mais cette conception doit être
nuancée.
En effet, dans les sociétés coopératives,
le but visé est la promotion des valeurs de prise en charge, de
bien-être, de démocratie, d'égalité. Ces
sociétés veillent également, dans l'exercice de toutes
leurs activités, au respect des valeurs d'intégrité et
d'ouverture à tous. Elles doivent de manière particulière
répondre aux besoins de leurs membres qui participent de manière
égale à la constitution de leur capital.179
Avec l'émergence de la notion de la
responsabilité sociale et d'entreprises citoyennes, nous voyons que le
seul but de la recherche de bénéfices s'estompe. Car, les
société vont plutôt
176 Article 2 du CSP&PP.
177 Maurice Cozian et consort, op.cit.p.330
178ANOUKAHA François, CISSE Abdoullah, DIOUF
Ndiaw, NGUEBOU TOUKAM Josette, POUGOUE Paul-Gérard, SAMB Moussa,
Sociétés commerciales et GIE, Collection Droit uniforme
africain, Bruylant, Bruxelles, 2002, p. 124
179 Article 6 de la loi n° 1/12 du 28 juin 2017
régissant les sociétés coopératives au Burundi.
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privilégier les politiques incitatives qui invitent les
entreprises à travailler avec des partenaires aux pratiques commerciales
éthiques, au réinvestissement des bénéfices dans
des programmes de santé et de sécurité, ou
d'environnement, au soutien d'organismes de bienfaisance dans les
communautés où elles exercent leurs activités ainsi
qu'à la promotion de l'égalité femme/homme au sein des
équipes de direction.
Néanmoins, ce serait un leurre que de penser que la
création d'une société doit déboucher
nécessairement sur la récolte de bénéfices. Des
déboires imprévisibles peuvent survenir et entraîner des
pertes que les actionnaires doivent assumer.
Le législateur burundais a défini le
bénéfice comme étant constitué des produits nets de
l'exercice, déduction faite des frais généraux et autres
charges, y compris tous les amortissements et provisions.180
Cependant, parler de bénéfice ne doit pas faire penser
immédiatement à sa distribution automatique entre actionnaires.
Loin de là.
En effet la société doit d'abord satisfaire
certaines obligations légales avant de penser à distribuer des
dividendes aux actionnaires. Ces obligations sont notamment la constitution
d'une réserve à partir des prélèvements par une
société sur les bénéfices avant qu'ils ne soient
distribués aux associés, dans un but de prévoyance. Les
réserves permettront de faire face plus tard à certains risques,
ou de faciliter l'extension de l'affaire.181
Ces réserves sont des réserves légales
car prévues par la loi. Le législateur burundais les a
fixées à 5 % du bénéfice. Elles ne cessent
d'être obligatoires qu'une fois qu'elles atteignent un montant
égal à 10 % du chiffre d'affaire.182 Elles peuvent
également être prévues par les statuts ou
décidés librement par les associés en Assemblées
générales ordinaires : ce sont alors des réserves
facultatives ou libres.183
Quant au partage des bénéfices, c'est
l'Assemblée générale qui détermine la part à
attribuer aux associés sous forme de dividendes, après
approbation des comptes et constatation de l'existence des sommes
distribuables.
Mais qu'entend-on par dividendes, et comment sont- ils
constitués (A) ? Qu'en est-il de leur distribution ? Et quid d'une de
ses variantes appelée dividende fictif (B) ?
180 Article 72 du CSP&PP.
181 Serge Guichard, Thierry Debard, op.cit.
182 Article 73 CSP&PP
183 Ibidem.
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A. Les dividendes
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