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La protection des interets des actionnaires minoritaires dans les societes mixtes cas de la societe sucriere de Moso (SOSUMO)


par Jean Claude BIZIMANA
Université Lumière de Bujumbura - Master 2021
  

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CHAPITRE PRELIMINAIRE : CADRE CONTEXTUEL

Depuis la colonisation jusque vers les années 1970, le commerce au Burundi était entre les mains des sociétés étrangères qui se souciaient très peu de ménager durablement sa clientèle puisqu'elles n'avaient pas vocation à rester toujours dans le pays. Elles se contentaient alors d'exploiter l'ignorance des citoyens burundais et l'inexpérience du jeune appareil étatique, lui aussi victime d'évasion fiscale et pour cela, souffrant d'un manque criant de devises.22

Pour pallier ce manque et satisfaire les besoins de la population en approvisionnement des produits de première nécessité, l'Etat du Burundi s'est investi dans la création des sociétés publiques tout en élargissant son partenariat avec les particuliers. C'est ce processus qui a conduit à la création des sociétés mixtes.

Dans ce chapitre, nous nous efforcerons d'abord de comprendre le concept de « société mixte » (section1) avant de faire une présentation succincte de la SOSUMO (section 2).

Section 1 : Le concept de société mixte

Les sociétés mixtes ont initialement été créées pour répondre aux besoins des personnes publiques. Elles avaient pour but la gestion d'une activité dévolue par principe à l'administration, autrement dit une activité de service public ou présentant un caractère d'intérêt général.23 La forme sociétaire de ces entités permet à l'administration une gestion plus souple de ses activités tout en conservant un certain contrôle sur elles puisque l'Etat est, dans la plupart des cas, majoritaire.24

Cependant que le concept de « société mixte » renferme une signification que nous devons expliciter, les mobiles de sa création méritent aussi d'être élucidés.

Paragraphe 1 : Définition de la société mixte

En général, pour promouvoir le commerce, l'Etat peut s'associer à des privés dans le but de réaliser une activité d'intérêt général et créer ainsi une société mixte. Dans le Code Burundais des Sociétés Privées et à Participation Publique, celle-ci est définie comme étant « une personne morale créée par l'Etat, la commune, une ou plusieurs personnes morales de droit

22 Raphaël NTIBAZONKIZA, Au Royaume des Seigneurs de la lance, Tome 2, de l'indépendance à nos jours (1962-1992), Bruxelles, Droit de l'Homme, p.119.

23 Entretien réalisé avec un expert du Service chargé des entreprises Publiques (SCEP), le 20 décembre 2019.

24 Voir l'annexe I montrant les sociétés mixtes où l'Etat est actionnaire.

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public avec une ou plusieurs personnes physiques ou morales de droit privé. Elle est dotée d'un patrimoine propre, d'une autonomie financière et organique. 25»

En votant le CSP&PP, le législateur burundais a donné la latitude à l'Etat, à la Commune ou à d'autres personnes morales de droit public de créer seuls ou en association une société qui aura pour objet de réaliser des activités industrielles, commerciales, financières ou agricoles.

Cependant, le législateur burundais n'a pas déterminé jusqu'à quelle hauteur de participation les actionnaires publics devraient aller pour qu'une société soit qualifiée de mixte. Alors qu'en France par exemple, la participation des actionnaires autres que les collectivités locales et autres groupements ne peuvent être inférieurs à 15 % du capital social.26 Quant à la participation publique, elle est plafonnée à 85 %.

Ce silence du législateur burundais laisse le choix aux personnes publiques de se tailler « la part du lion» dans la constitution des sociétés mixtes jusqu'à être actionnaires à 99 %.27

A notre avis, le législateur aurait dû prévoir dans le CSP&PP des dispositions fixant un seuil au-dessous et au-delà duquel la part de l'Etat et de ses démembrements ne doit pas aller dans les sociétés mixtes. Or, dans le cas de la SOSUMO, la participation étatique confirme le choix français : on reste dans la logique de la majorité dominante de l'Etat.

Cela aurait permis à l'Etat d'impulser une bonne gouvernance dans le système managérial de ce type de sociétés, car, actuellement dans les sociétés où il est largement majoritaire, il possède le monopole de décision dans les Assemblées générales. Dans une telle situation il est clair que la contribution des actionnaires minoritaires privés dans la prise de décision est pratiquement nulle.28

Mais, pour que l'actionnaire majoritaire qu'est l'Etat ne puisse pas complètement phagocyter les actionnaires minoritaires, le législateur burundais a mis en place des contrepoids pour contrebalancer son éventuel absolutisme. Ceux-ci sont notamment, l'existence des Commissaires aux Comptes, ainsi que le pouvoir des actionnaires minoritaires d'enclencher l'alerte en cas de constatation de tout fait pouvant compromettre le fonctionnement de la société.

25 L'article 501 du CSP&PP.

26 Article Art. L. 1522-2 du Code des collectivités locales.

27 Dans le capital de la SOSUMO l'Etat est actionnaire à 99 % d'information voir annexe I.

28 SOFRECO, rapport de l'audit organisationnel de la SOSUMO, annexe 1, aspects juridiques, août 2018, p.8.

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En outre, les actionnaires minoritaires peuvent conclure un « pacte d'actionnaires » pour contrecarrer ce pouvoir absolu de l'actionnaire majoritaire. Ce pacte est défini comme « un contrat conclu par tous les actionnaires d'une société, ou un certain nombre d'entre eux, en vue d'organiser leurs relations en dehors des statuts ».

Une fois conclu, le pacte d'actionnaires permet de préserver les intérêts communs de ces derniers tout en complétant les règles d'organisation de la société prévues par les statuts.29

Les actionnaires minoritaires ont donc intérêt à réduire le pouvoir monopolisant de l'Etat actionnaire majoritaire, car, ce monopole pourrait avoir des conséquences sur la vie de la société : les actionnaires seront, dans la plupart des cas, obligés de s'aligner derrière les décisions de l'actionnaire majoritaire qui s'est assuré un contrôle très important sur la société. En effet, accepter de s'associer à l'Etat majoritaire, signifie pour eux de subir de surcroit la « dictature de la majorité », qui devrait normalement être exercée dans le strict respect de l'intérêt social et la protection des actionnaires minoritaires. Nous y reviendrons dans le chapitre sur la protection particulière des actionnaires minoritaires.

En outre, le recours à la société mixte garantit au pouvoir public, à la collectivité locale ou à toute autre personne publique actionnaire et cocontractante, la prise en compte effective de l'intérêt général tel que défini dans les objectifs de l'entreprise et de la souplesse de la société de droit privé. C'est cette clause qui, par ailleurs, justifie la création des sociétés mixtes, création dont le but est la sauvegarde l'intérêt général.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard