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La protection du droit à la liberté à l'épreuve de la détention préventive en droit positif togolais


par P. Roger KPAKOU
Université de Parakou - Master en droit pénal et sciences criminelles 2020
  

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B. Le contrôle du sous-comité pour la prévention de la torture

Le sous-comité de prévention contre la torture est un mécanisme de contrôle supranational, mis en place par l'OPCAT. Il a un double mandat « visiter les lieux de détention dans les États qui ont ratifié le Protocole facultatif et ... fournir conseils et assistance concernant l'établissement des MNP dans ces pays 239». Pour ce faire, les États parties sont tenus de lui accorder un libre accès aux lieux de détention sur leur territoire et de faciliter sa mission. Le sous-comité effectue des visites inopinées de contrôle dans les lieux de détention de chacun des pays membres des Nations-Unies sans distinction. À la suite d'une visite, le sous-comité élabore un rapport et prépare des recommandations qui sont ensuite soumises au gouvernement. Le sous-comité effectue le suivi de ces recommandations par l'entremise du comité contre la torture (CAT).

Le Togo a déjà reçu deux visites du sous-comité. Lors de sa première visite régulière du 1er au 10 décembre 2014, le sous-comité s'est rendu dans 25 lieux de détention240 dans

236 Rapport d'activités, Exercice 2019, CNDH, p. 135

237 Ibidem

238 Ibidem, p. 136

239 Prévenir la torture : Guide pratique à l'intention des Institutions nationales des droits de l'homme, p. 78

240 Y compris les commissariats de police et de gendarmerie, les prisons, les camps militaires, l'hôpital psychiatrique de Zébé, la brigade pour mineurs de Lomé, l'unité du Cabano

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les 5 régions241. S'agissant des prisons, le sous-comité a relevé que « ces conditions correspondent à un traitement inhumain et dégradant, certaines pouvant même être assimilées à un acte de torture dans la mesure où les autorités compétentes en sont pleinement informées 242». Au terme de ses visites, le sous-comité a fait plusieurs recommandations à l'État togolais. L'une concernait l'adoption en urgence d'un règlement intérieur pour tous les centres de détention parce qu'en l'état, le régime de détention est géré par les détenus auxquels l'autorité pénitentiaire remet le contrôle de la vie interne des centres de détention243. Ceci est bien évidemment cause d'une gestion arbitraire qui implémente l'enracinement des « privilèges monnayés ». Une autre recommandation concerne l'équipement de « chaque établissement pénitentiaire des services réguliers d'un médecin qualifié pour examiner chaque détenu aussitôt que possible après son admission, et pour surveiller la santé physique et mentale des personnes détenues, notamment par la création d 'un dossier médical pour chacune d'elles.244». Il en est de même de celle « d'assurer un accès aux traitements à tous les détenus, y compris aux indigents245 ». L'ensemble des recommandations vise à l'amélioration de la protection des personnes incarcérées au Togo.

Une seconde visite a été effectuée par le sous-comité du 8 au 12 avril 2019 au Togo. Cette mission a été effectuée avec l'assistance des organisations internationales et nationales, notamment l'OMCT et le CACIT. La problématique persistante de la détention préventive, a emmené le sous-comité à faire plusieurs recommandations. Il a recommandé que « les magistrats (soient formés) sur les effets de la détention préventive anormalement longue qui est cause de la surpopulation carcérale246 ». Également, il a recommandé de « faciliter l'accès à tous les lieux de détentions à la CNDH et aux organisations de la société civile afin de permettre un contrôle externe par les MNP et le sous-comité 247».

241 Rapport du SPT, Visite au Togo menée du 1er au 10 décembre 2014 : observations et recommandations adressées à l'État partie, par.2, p. 2

242 Rapport du SPT, Visite au Togo menée du 1er au 10 décembre 2014 : observations et recommandations adressées à l'État partie, par.21, p.6

243 Rapport du SPT, ibidem, par.36, p. 9

244 Rapport du SPT, ibidem, par.49, p. 13

245 Ibidem, par.50, p. 13

246 Rapport de mission du sous-comité pour la prévention de la Torture au Togo, p.12 (version non finalisée)

247 Ibidem

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Les mécanismes de visites des lieux de détention créés par l'OPCAT contribuent à veiller au respect des droits fondamentaux des détenus, dont les prévenus, en ce qui concerne spécifiquement le droit au respect de sa dignité et l'interdiction de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

SECTION 2 : La contribution de la société civile au respect des garanties de protection du droit à la liberté

Selon la définition des Nations Unies, les acteurs de la société civile comprennent248 : les organisations de défense des droits de l'homme, Les fédérations (aussi bien syndicats qu'associations professionnelles telles que les associations de journalistes, les ordres des avocats, les associations de magistrats, les fédérations étudiantes), etc. Les OSC sont très actives dans la protection des droits de l'Homme au Togo. En ce sens, elles s'engagent aux côtés du gouvernement et font parallèlement un contrôle citoyen de ses actions publiques. Les OSC sont des acteurs clés du contrôle externe de la protection des droits fondamentaux des personnes poursuivies au plan national. Pour étudier le champ d'action de la société civile, il convient d'aborder dans un premier temps la contribution à l'effectivité de la protection du droit à la liberté (Paragraphe 1) et dans un second temps la contribution au renforcement de la connaissance des droits et libertés fondamentales (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : la contribution à l'effectivité de la protection du droit à la liberté

La société civile participe à l'amélioration de la situation des droits de l'Homme au Togo. Son action en faveur de l'effectivité de la protection du droit à la liberté avant jugement peut s'appréhender en deux temps. Aussi, il sera abordé dans un premier temps la contribution pour un recours effectif aux droits de la défense (A) et dans un second temps le plaidoyer pour un renforcement du cadre institutionnel (B).

248 Guide pratique pour la société civile, LE CHAMP D'ACTION DE LA SOCIÉTÉ CIVILE ET LE SYSTÈME DES DROITS DE L'HOMME DES NATIONS UNIES, OHCR, p. 3

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A. La contribution pour un recours effectif aux droits de la défense

Plusieurs OSC sont engagées dans la protection des droits fondamentaux des personnes en conflit avec la loi au Togo : le CACIT, l'UCJG, le CDFDH, le WANEP, la SMPDD, etc. Certaines OSC ont un mandat de spécifique en faveur des groupes vulnérables. C'est l'exemple du BNCE-Togo qui s'intéresse spécifiquement à la protection des droits de l'enfant et du GF2D qui s'intéressent aux questions à la protection spécifique des femmes. Les activités menées par les OSC et qui servent de cadre de contrôle du respect des droits fondamentaux des personnes en conflit avec la loi sont multiples. Les plus importantes sont les activités de monitoring des lieux de détention. Selon la définition du HCDH, « Le monitoring est un terme de sens large, décrivant la collecte active, la vérification et l'usage immédiat d'informations en vue de résoudre des problèmes de droits humains 249». L'objectif du monitoring des lieux de détention est de contribuer à une meilleure protection des droits fondamentaux des personnes incarcérées à travers l'identification et le report des violations observés. Le monitoring des lieux de détention joue également un rôle préventif puisse que les acteurs étatiques deviennent plus attentifs à leur conduite du fait de la permanence du contrôle. Au cours des actions de monitoring des lieux de détention, les OSC font des assistances juridiques.

L'assistance juridique qui est apporté aux détenus lors des actions de monitoring, permet d'orienter ces derniers vers tout moyen de droit pouvant leur permettre de défendre leurs intérêts250. Ainsi, les OSC aident les détenus à rédiger des demandes de libération provisoire, des lettres de demandes d'audience, etc. Dans son rapport d'activité de l'année 2019, le CACIT affirme que « Quarante-huit (48) lettres de demande d'audience, huit (08) demandes de libération provisoire et six (06) lettres de libération conditionnelle ont été déposées devant les juges d'instruction. Ces lettres d'audience

249 MANUEL DE FORMATION SUR LE MONITORING DES DROITS DE L'HOMME, SÉRIE SUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE N° 7, HCDH, p. 16

250 Notamment le droit à la liberté en ce qui concerne les prévenus

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ont permis aux détenus de rencontrer leur juge d'instruction et de voir leurs dossiers avancer251 ». Suite aux dépôts des différentes requêtes, les OSC effectuent des actions de suivi auprès des cabinets d'instruction pour prévenir la lenteur judiciaire. Il faut à cet égard relever la collaboration positive avec les cabinets d'instruction. C'est surtout le cas avec les juges pour mineurs. Très souvent, c'est l'intervention des OSC est nécessaire pour la libération effective des enfants en conflits avec la loi. En effet, certains parents ne veulent plus accueillir leurs enfants après leur séjour carcéral. L'enfant demeure ainsi en détention bien que le juge pour enfant ait ordonnance de libération et de placement dans sa famille. Les OSC effectuent des actions afin de rechercher et rencontrer ces parents afin de les entretenir sur leur devoir à l'égard du mineur. Ces actions aboutissent le plus souvent au retour des enfants dans leur famille ou le cas échéant au placement des mineurs ainsi libérés dans des centres d'accueil. Un fait notable de l'action des OSC pour la protection du droit à la liberté est celle du CACIT qui a conduit à la libération de trois mineurs en situation de détention arbitraire à la brigade pour mineurs de Lomé. Alors que l'article 323 alinéa 2 du code de l'enfant prescrit un délai maximal de trois mois de détention pour les mineurs poursuivis pour avoir commis des délits, ces trois mineurs ont passé plus de huit mois de détention préventive. Cette situation était en grande partie due au fait que les trois mineurs avaient été transféré depuis la prison civile de Tsévié pour Lomé. Par suite de leur transfert, le juge en charge a été muté. Il se posait une difficulté pratique d'accessibilité. Après identification de ce cas, le CACIT a rencontré le juge pour mineurs en charge le 14 octobre 2019. Le juge a rendu une ordonnance de mainlevée de la garde provisoire trois jours plus tard, le 17 octobre 2019.

Certaine OSC s'engagent également dans la lutte contre la lenteur judiciaire et les détentions prolongées. C'est le cas de l'ONG Prisons délices qui a appuyé à l'organisation des audiences en exécution d'un projet dénommé « aide judiciaire aux détenus ». En trois ans, plus de cinq cent252 détenus ont retrouvé leur liberté. Le projet a couvert la période de 2012 à 2018.

251 Rapport d'activités Janvier-Décembre 2019, CACIT, inédit, pp. 9-10

252 6è, 7è et 8è Rapports périodiques de l'état togolais sur la mise en oeuvre de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples, p. 197

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon