Paragraphe 2 : Le renforcement du contrôle
externe
Le Togo a ratifié le protocole facultatif à la
convention des Nations Unies contre la torture (OPCAT) le 20 juillet 2010.
Contrairement à la plupart des mécanismes de visites des lieux de
détentions qui n'interviennent qu'après la survenue des mauvais
traitements, l'OPCAT a le mérite d'établir un système de
contrôle qui met l'accent sur la prévention. Le protocole
établit deux types de mécanismes deux mécanismes qui
contribuent efficacement au contrôle du respect des droits fondamentaux
des prévenus, et des détenus en général, dans les
lieux de détention au Togo. Aussi convient-il d'analyser dans un premier
temps la mise en oeuvre du mécanisme national de prévention de la
torture (A) et dans un second temps le contrôle du sous-comité
pour la prévention de la torture (B).
A. La mise en oeuvre du mécanisme national de
prévention de la
torture
L'OPCAT laisse le soin à chaque État partie, de
mettre en place un mécanisme national de prévention de la torture
(MNP). Cette obligation est prévue à l'article 3 de l'OPCAT.
Après la ratification de l'OPCAT, le Togo avait donc l'obligation de
mettre en place un MNP. Cette charge a été confiée
à la CNDH conformément à l'article 3 de la loi organique
n° 2018-006 du 20 juin 2018 de la CNDH. Aux termes de l'article 4 de la
loi organique, la principale mission du MNP est de faire des visites
régulières et inopinées afin de « prévenir
la torture et d'autres formes de traitements cruels, inhumains ou
dégradants dans les lieux de privation de liberté ou tout autre
lieu qu'elle aura identifié 230». Il faut
préciser que le MNP est habileté à visiter une panoplie de
lieux de détention tels que les postes de police et de gendarmerie ; les
centres de détention préventive ; les prisons pour
condamnés ; les centres de détention pour enfants ; les
229 Art 41, code de la santé publique au Togo «
Les établissements pénitentiaires et autres locaux de
détention doivent être dans un bon état d'hygiène,
bien aérés et éclairés. Ils sont soumis à un
contrôle sanitaire permanent. »
230 Art 4, loi organique n° 2018-006 du 20 juin 2018 de la
CNDH
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postes de police aux frontières ; les centres
psychiatriques ; etc. Le contrôle préventif qu'effectue le MNP
intéresse la protection du droit à la liberté avant
jugement à plusieurs égards. Le MNP est habileté à
effectuer des visites inopinées, sans prévenir, dans tous les
lieux de détention231. Ces contrôles permettent
à la commission d'identifier toutes violations aux droits acquis aux
personnes incarcérées. Les violations sont légions tels
que les détentions arbitraires, les détentions prolongées,
les actes de tortures ou de mauvais traitements infligés aux
prévenus par les officiers de police judiciaire, etc. L'action du MNP
permet de régulariser de telles situations au regard du droit positif
togolais. Il faut surtout relever que l'action du MNP a pour ultime objectif de
prévenir les violations à travers la récurrence des
visites inopinées et des contrôles dans les lieux de
détention.
Courant l'année 2019, le MNP a effectué des
visites régulières de contrôle dans sept prisons civiles du
Togo232. Lors de ces visites, l'équipe du MNP a
examiné la situation des personnes privées de liberté se
trouvant dans les lieux de détention en vue de renforcer leur
protection. Ainsi, plusieurs prévenus en situation de détention
arbitraire ont pu recouvrer leur liberté suite à l'action du MNP
par suite de leur identification. L'un des cas identifiés est celui du
prévenu L.P, poursuivi pour homicide involontaire et détenu
pendant 7 ans sans jugement. L'homicide involontaire est un délit en
droit positif togolais233. Le prévenu L.P avait purgé
bien plus que l'intégralité de la peine maximale prévue
pour les infractions délictuelles. Bien que son dossier ait
été finalement retrouvé, le prévenu L.P ne fut pas
libéré, « la procédure suit son
cours234 ». Le MNP est également intervenu
auprès du ministère de la justice à l'effet de doter la
prison civile d'Atakpamé d'un personnel soignant235.
Au terme de son mandat de MNP courant l'exercice 2019, la CNDH
a fait des recommandations à l'endroit de l'administration
pénitentiaire et du gouvernement,
231 Art 6, loi organique n° 2018-006 du 20 juin 2018 de la
CNDH
232 Rapport d'activités, Exercice 2019, CNDH, p. 118
233 Art 178 NCPT
234 Selon le courrier notifié à la CNDH, voir
Rapport d'activités, op.cit., p. 134
235 Suite à une visite le 10 décembre 2019
à la prison civile d'Atakpamé, le MNP a réalisé que
celle-ci ne disposait pas de personnel soignant. À cet effet, la CNDH a
adressé un courrier au ministère de la justice (Voir rapport
CNDH, ibidem)
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particulièrement du ministre de la justice, pour
renforcer la protection des personnes privées de liberté en
générale. Plusieurs recommandations intéressent la
situation des prévenus. S'agissant du droit d'être jugé
dans un délai raisonnable, la commission recommande « (d')
instruire formellement les juges d'instruction des ressorts des prisons
visitées d'accélérer l'instruction des détenus
inculpés dans leurs cabinets 236».
Également, elle recommande « (d') instruire formellement les
juges d'instruction et les procureurs de la République d'effectuer des
visites régulières dans les prisons afin de s'enquérir des
cas de détention préventive de longue durée qui
s'apparentent à des détentions arbitraires
237». S'agissant du droit à la santé, la
commission recommande de « créer en concertation avec le
ministère de la santé, une direction de la santé au sein
de l'administration pénitentiaire238 ».
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