Section II- Droit au respect de la vie privée et
droit de l'information : deux libertés opposées dans leurs
fonctions.
Toute personne est seul maître de la divulgation des
secrets de sa vie privée. Ce qui signifie que la diffusion d'un
élément de la vie privée d'une personne suppose
l'autorisation ou le consentement de cette dernière. Dans cet
état de fait, deux principes gouvernent l'utilisation des
éléments de la vie privée d'une personne dans le cadre de
la diffusion d'une information. Le principe de l'interdiction de divulguer la
vie privée des personnes sans leur consentement (Paragraphe I) et celui
de l'inviolabilité du domicile, siège privilégié
d'expression de la vie privée
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Droit au respect de la vie privée et droit de
l'information en côte - d'ivoire.
(Paragraphe II) limitent l'exercice de la liberté
d'expression. Ces deux principes opposent donc le droit à la vie
privée au droit de l'information.
Paragraphe I- Le principe de l'interdiction de divulguer la
vie privée des personnes sans leur consentement, obstacle à
l'expression du droit de l'information.
Le consentement est, selon le dictionnaire1, un
assentiment donné à une proposition ou une réponse
favorable que l'on veut bien donner à une demande d'autorisation.
Dans la création d'un acte juridique, le consentement
est une adhésion d'une partie à la proposition ou à la
pollicitation faite par l'autre2.
En somme, le consentement est l'adhésion d'une personne
à une proposition à lui faite par autrui mais aussi et dans
certains cas, une manifestation de volonté en vue de l'accomplissement
d'un acte ou une autorisation donnée de façon expresse ou tacite
à un tiers d'accomplir tel ou tel acte sans qu'il y ait pourtant
naissance d'une quelconque obligation.
Ainsi les hommes des médias ne peuvent transmettre des
informations concernant la vie privée des individus, qu'il soit des
personnalités connues soit des anonymes, sans leur consentement.
Dans cette perspective, il est admis qu'une personne dont
certains détails de sa vie intime sont publiés par la presse,
puisse s'opposer à une telle diffusion. Cette solution est parfaitement
juste à notre avis en ce sens qu'il est normal que les droits de la
personnalité, consubstantiels à une existence paisible
prévalent sur la liberté de l'information lorsqu'il s'agit de
sauvegarder ou de protéger l'intimité des individus. La vie
intime d'un individu est sacrée, en Afrique et particulièrement
en Côte d'Ivoire. Par conséquent, le journaliste, dans le
traitement de l'information, doit respecter l'intimité de la vie
personnelle, familiale des citoyens.
Leur ingérence dans les aspects intimes de la vie
privée des individus, au nom du droit du citoyen à l'information
et à une information vraie ne peut être motivée
1 Dictionnaire de la langue française, volume
I, A-H, éd. Bordas, Paris, 1986, p.560.
2 Lexique des termes juridiques, 10e
éd., Dalloz, Paris, 1995, pp.146-147.
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Droit au respect de la vie privée et droit de
l'information en côte - d'ivoire.
que pour des raisons extrêmement graves et
d'intérêt national ou général. La loi garantit le ((
droit à l'intimité du foyer » et le (( droit à la vie
conjugale et sentimentale » au nom de la sauvegarde d'une certaine morale
ou des droits d'autrui.
La jurisprudence ivoirienne et française vont dans le
même sens et sanctionnent les atteintes à la vie privée et
sentimentale qui mettent en cause la personnalité des individus
concernés et leur portent préjudice1.
Cette protection se manifeste davantage à
l'égard des journalistes qui relatent, diffusent avec
indiscrétion les relations sentimentales, intimes des tiers.
Face à cette situation des rapports entre le droit
à la vie privée et le droit de l'information, nous sommes en
droit de dire sans nous tromper qu'il y a une opposition entre ces deux
droits.
En effet, le droit au respect de la vie privée limite
l'exercice de la liberté de l'information.
Le journaliste ne peut donc utiliser des aspects de la vie
privée d'une personne sans que cette dernière n'ait donné
son accord. Le consentement de l'individu constitue la porte d'entrée du
journaliste dans la vie intime de celui-ci. Sans cette manifestation de
volonté, il serait en droit de s'opposer à toute publication ou
diffusion de sa vie privée. Deux droits apparemment incompatibles dans
leur exercice assurément.
A côté du principe de l'interdiction de divulguer
la vie privée des individus sans leur consentement limitant ainsi le
principe de la liberté de l'information ,se trouve également un
autre principe agissant dans le même sens que le premier cité. Il
s'agit du principe de l'inviolabilité du domicile, lieu de
prédilection et d'expression de la vie privée.
1 Trib. Première instance Abidjan,
3e ch. Civile, 29 janvier 1976 n°228, Dame Kamé N'Daw c/
Editions Jean-claude Nourault et Librairie de France, RID, Cirej Abidjan 1976,
1-2, pp.34-36.
Trib. P.I., Abidjan (Plateau), 7e ch. Civile
n°502 du 20/06/2001, affaire Bohouri Kobena Jose Marius c/ Gecos Formation
et M ? Koné Laman, Abidjan le 29 janvier 2003 (inédit).
Cass. Civ. 2e, 26 novembre 1975,
sociétés éditeurs parisiens associés c/ Gary : JCP
78, II, T. 8811.
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Droit au respect de la vie privée et droit de
l'information en côte - d'ivoire.
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