L'ordre public et la liberté de manifestation. Réflexions sur les limitations du régime de déclaration en droit comparé congolais et français.par Jean Faustin Bafwa Katombe Université officielle de Bukavu - Graduat en Droit, option Droit public interne 2019 |
§2. Liberté de manifestationAutant la notion de l'ordre public est difficile à cerner, autant celle de la liberté de manifestation l'est. En effet, le droit de manifestation est une liberté, une liberté publique qui consacre un droit, celui de manifester. « La liberté est la faculté reconnue à l'homme d'agir de manière autonome, c'est un pouvoir d'autodétermination en vertu duquel l'homme choisit son comportement personnel [...] ; elle est une prise de conscience par l'individu à la fois des nécessités sociales et également de sa propre responsabilité »19(*). Il en résulte que, parce que l'homme vit en société, sa liberté doit être conciliée avec les règles établies dans un espace donné mais aussi avec celle des autres individus. Le qualificatif public exprime l'opposabilité de cette liberté à la puissance publique. Il traduit donc l'intervention des pouvoirs publics. Mais l'expression n'est que très rarement employée au singulier. Les libertés publiques sont reconnues par la Constitutions congolaise et française. Ce sont des libertés reconnues aux individus, protégées par la loi, et garanties par l'État. Si elles sont expressément mentionnées dans les Constitutions de deux pays, elles ne font pas l'objet en tant que telles d'une définition textuelle. C'est la doctrine qui a conceptualisé cette expression. En effet, Xavier Bioy considère les libertés publiques comme étant « l'expression d'un pouvoir d'autodétermination reconnu par des normes à valeur au moins législative et bénéficiant d'une protection renforcée même à l'égard des pouvoirs publics »20(*). Pour leur part, Serge Guinchard et Thierry Debard soutiennent que « les libertés publiques sont des droits de l'homme reconnus, définis et protégés juridiquement »21(*). Il faut constater que tous ses auteurs conçoivent l'expression comme une faculté d'agir librement consacrée par une règle de droit sous la protection de l'État. La manifestation, écrit Bernard Strin, est « une réunion qui présente la double particularité d'être organisée sur la voie publique et d'avoir pour projet d'exprimer un sentiment collectif ; elle peut être fixe ou se combiner avec un déplacement et un cortège »22(*). Pour sa part, Marcel-René Tercinet estime que la manifestation est « l'un des moyens privilégiés par les citoyens pour affirmer leurs croyances, pour défendre leurs intérêts, voire pour renverser un régime politique [...] »23(*). Il en découle que la liberté de manifestation est un droit de l'homme reconnu, défini et protégé juridiquement qui s'exerce individuellement ou collectivement sur la voie publique ou dans un lieu public et dont l'objectif est de rendre ostensible l'opinion ou la volonté d'un individu ou d'un groupe d'individus donnés. * 19 X. BIOY, Droits fondamentaux et libertés publiques, Paris, LGDJ, 2016, p. 675. * 20Ibidem. * 21 S. GUINCHARD et T. DEBARD (dir) et alii, Lexique des termes juridiques, 25ème éd., Paris, Dalloz, 2017-2018, v° « libertés publiques », p. 678. * 22 B. STRIN, Les libertés en question, 6ème éd., Paris, Montchrestien, 2006, p. 37. * 23 M-.R. TERCINET, « La liberté de manifestation en France », in RDP, 1979, p. 1009. |
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