B. Les travaux forcés
La peine de travaux forcés est d'application
récente dans la législation congolaise, ou elle est devenue une
réalité irréfutable depuis la promulgation de la loi
n°73-017 du 5 janvier 1973. Cette sanction la privation de la
liberté, de même que le condamné se trouve astreint
à exécuter un ou plusieurs travaux réglementaires autres
que les travaux généralement confiés aux pensionnaires des
établissements pénitentiaires. Elle vise à assurer
à l'Etat une certaine compensation de la perte qu'il subit à la
suite de l'infraction de détournement des deniers publics7. A
cette fin, elle répond à une logique d'opportunité et
d'efficacité qui lui procure un effet bénéfique dans la
collectivité nationale.
Au fait, le législateur a voulu que la peine de travaux
forcés soit ferme tant au moment du prononcé du jugement que dans
son exécution, c'est-à-dire, dépourvu de toute mesure de
clémence : sursis, libération conditionnelle ; la loi
précise aussi que l'exécution de la peine de travaux
forcés ne peut être assimilée ni confondue avec la peines
de servitude pénale8. Mais jusqu'à ce jour les mesures
d'application qui devraient accompagner l'exécution de cette sanction
n'ont pas encore été déterminées. D'où
contrairement à la volonté légale, la pratique assimile
cette peine à celle de servitude pénale.
En droit pénal militaire, la peine de travaux
forcés a été introduite par l'ordonnance-loi n°
78-010 du 29 mars 1978 modifiait et complétait l'ordonnance-loi n°
72/060 du 25 septembre 1972 portant institution d'un code de justice
7 Exposé des motifs de la loi n°73-017 du
5 Janv. 1973, in J.O, éd prov du 15 févr. 1975,
n°4, p. 29.
8 BAYONA-ba-MEYA, cours de procédure
pénale, Faculté de droit, UNIKIN, 1982-1983, p.142-143
cité par MUTATA LUABA, Droit pénal militaire congolais,
Ed. Du SDEMJDH, Kinshasa 2012
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militaire. Cette sanction fut obligatoirement attachée
à deux incriminations : celle d'incitation à commettre les actes
contraires au devoir ou à la discipline9 et celle de
violation des consignes10 et ce, en remplacement de la peine de
servitude pénale initialement prévue. Le législateur en
alourdissait même la durée d'emprisonnement et ce, jusqu'à
la réforme du 18 novembre 2002.
C. La servitude pénale
En reprenant cette peine dans la nomenclature des sanctions
principales, le législateur a remis la pendule à l'heure en
consacrant un concept exact, contrairement à « l'emprisonnement
militaire » que retenait l'ancien code de justice militaire.
La servitude pénale principale est une peine
d'emprisonnement de droit commun qui peut être temporaire ou
perpétuelle11, lorsqu'elle est temporaire, on parle de
servitude pénale principale à temps dont le taux maximum est
impérativement fixé à 20 ans. Lorsqu'elle est
perpétuelle, elle est qualifiée de servitude pénale
à perpétuité. La doctrine constate l'inefficacité
de cette sanction qui, ignorée de nos ancêtres, ne revêt
aucun caractère infamant ; le citoyen qui revient de la prison, sauf
peut-être le voleur, n'est pas l'objet de mépris. Car personne ne
s'inquiète de son passé judiciaire12. Cependant, le
concept « emprisonnement » étant d'usage dans le
système romano-germanique, il sied d'en élucider la portée
tant universelle que spécifique à certaines législations
du système romano-germanique.
9 Art. 457de l'ancien code de justice militaire
10 Art. 480 de la loi précitée
11 LIKULIA BOLONGO, droit et sciences
pénitentiaires, PUZ, Kinshasa 1981, p.21 cité par MUTATA
LUABA, op. cit, P103
12 BAYONA-ba-MEYA, op. cit. p. 143.
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1. L'approche universelle du concept «
emprisonnement »13
Les instruments juridiques internationaux spécifient le
sens de ce concept par une étude comparative avec d'autres notions
voisines relatives à la privation de liberté, en l'occurrence :
l'arrestation et la détention.
a. L'arrestation
L'arrestation s'entend de tout acte qui consiste à
appréhender une personne du chef d'une prétendue infraction ou
par le fait d'une autorité quelconque.
Notion très proche du droit interne, elle
déborde le cadre judiciaire pour s'étendre à tout acte
posé par n'importe quel détenteur de l'autorité ou de la
puissance publique. Tel serait le cas de toute arrestation opérée
par les services de sécurités, les forces armées, les
autorités politico-administratives, etc.
b. La détention
La détention est conçue comme la condition d'une
personne privée de liberté individuelle, sauf à la suite
d'une condamnation pour une infraction.
Mais, cette approche nous semble insuffisante, et prête
à confusion avec le concept « arrestation » ; dans la mesure
où elle ne fait aucune allusion à l'endroit où l'individu
est retenu à son corps défendant. Et pourtant la personne
arrêtée c'est-à-dire privée de sa liberté
d'aller et de venir, devient détenu dès lors qu'elle est
placée à un endroit bien déterminé par la loi.
On parle alors de la détention préventive
justifiée par les poursuites judiciaires ou encore de la
détention découlant d'une décision judiciaire de
condamnation : tel est le cas de l'emprisonnement.
13 Extrait du code de conduite pour les responsables
de l'application des lois, annexé à la résolution 34/169
de l'assemblée générale des NU en date du 17
Décembre 1979, in droits de l'homme et application des lois, manuel de
formation à l'intention des services de police, NU, New York et
Genève,1997, p. 193, cité par Ibidem
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c. L'emprisonnement
L'emprisonnement, c'est la condition de toute personne
privée de liberté individuelle à la suite d'une
condamnation pour une infraction. Notion judiciaire, l'emprisonnement se
relève ainsi comme un acte du seul juge de fond ayant statué sur
les faits articulés contre la personne emprisonnée,
c'est-à-dire gardée contre son gré en milieu
carcéral.
En droit congolais, le concept « emprisonnement » ne
peut revêtir qu'un seul usuel, celui de la mise en prison ou de
l'incarcération d'un individu poursuivi ou condamné pour une
infraction déterminée. La nature de la peine importe peu pour les
condamnés, il peu s'agir d'une servitude pénale principale ou des
travaux forcés.
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