§2. Les peines complémentaires applicables par
les juridictions militaires
Initialement, ces peines complémentaires constituaient
tout simplement des mesures disciplinaires qui ne pouvaient être
prononcées par les juridictions de jugement. Elles relevaient alors de
la compétence du commandement militaire.
L'arrêté royal du 04 février 1952, en son
article 35, prévoyait notamment les mesures disciplinaires
ci-après : La rétrogradation, la perte de grade et le renvoi de
la force publique14.
Le décret-loi du 09 juin 1965 portant règlement
de discipline des forces armées, a pris ces mesures.
C'est depuis l'ordonnance-loi n° 72/060 du 25 septembre
1972 que la plupart de ces mesures disciplinaires ont été
érigées en peines complémentaires, à
14 Consulter, CLCB, vol I, p. 44.
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part le renvoi des forces armées qui n'acquiert cette
dimension qu'en cas de vol ou de détournement d'effets militaires.
A. La privation de grade ou de la
rétrogradation
Bien que reprises sur la même ligne par le
législateur, la privation de
grade et la dégradation ne sont pas synonymes. Chacune
d'elle renferme une acception précise, distincte de l'autre. C'est ce
que nous allons démontrer dans les lignes qui suivent.
1. La privation de grade
Autre fois connue sous la dénomination de « perte
de grade », la privation de grade est une peine complémentaire
temporaire pouvant être infligée au militaire de tout grade et qui
se voit replacé soldat de deuxième classe. L'agent qui subit
ainsi un retour à la case du départ, demeure tout de même
sous le drapeau. Il est tenu au respect de ses anciens subalternes, devenus ses
supérieurs en grade. Cette peine complémentaire peut-être
obligatoire15 ou facultative16. Et elle est
prononcée par toutes les juridictions de jugement.
Toutes ces notions doivent être précisées,
puisque leur application se heurte parfois aux écueils
d'interprétation. D'aucuns croient que la privation de grade
s'étend à la durée de la détention, mieux au taux
de la peine méritée. C'est ainsi qu'un sous-officier de
première classe ayant écopé de cette peine, s'est permis
de porter ses insignes de grades après avoir purgé
complètement sa peine de servitude pénale à temps.
Rappelé à l'ordre par son commandement, il rétorque que la
peine de privation de grade a pris fin dès l'instant ou il a
recouvré la liberté.
15 Art. 87 al 6 du CPM relatif à l'outrage au
drapeau ou à l'armée
16 Art. 29 du CPM « toute condamnation militaire
peut comporter la privation de grade ou rétrogradation » Art.84 du
CPM relatif aux actes commis par les médecins, chirurgiens, sages-femmes
ou autres professionnels de santé
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C'est l'avis technique de l'officier du Ministère
public qui a convaincu finalement cet élément qui,
déçu, à déserté de
l'armée17.
Enfin, il faut noter que de par son origine disciplinaire,
cette peine s'applique généralement avec le concours du
commandement qui s'érige à l'occasion en témoin de
moralité de l'agent lors de sa mise en examen : « c'est un
élément dont les actes n'honorent pas son rang, châtiment
exemplaire à l'endroit de cet agent qui trahit son grade », etc.
2. La rétrogradation
La rétrogradation est une peine complémentaire
temporaire par laquelle un militaire est placé dans une position
hiérarchique inférieure à celle dans laquelle il se
trouvait avant sa condamnation18. La perte d'un grade est valable de
l'officier général ou sous-officier de première classe
(Adjudant) ; mais quant aux premiers sergents-majors et premier sergent, ils
sont rétrogradés au grade de sergent. Et la peine s'applique
normalement en dessous de ces sous-officiers de deuxième classe,
c'est-à-dire le sergent est remis au grade de caporal, le soldat de la
première classe est replacé soldat de deuxième
classe19.
Moins grave que la privation de grade, la
rétrogradation est infligée également avec le concours du
commandement, au condamné militaire ayant fait l'objet de punition ou
mesures disciplinaires répétées ou particulièrement
graves et le rendant partant indigne d'être maintenu dans le grade qu'il
occupe.
Le condamné peut toutefois reconquérir sa
position, si, pendant un certain délai, il fait preuve de bonne conduite
et se conduit en honnête homme en respectant les lois et
règlements qui les régissent.
17 CG Pol Kis 15 Mai 1988, inédit :
l'intéressé n'ayant pas interjeté son appel contre ce
jugement, il devait se contenter de son nouveau rang de soldat de
2ème classe, après avoir purgé sa peine de
prison
18 Art. 59 du décret-loi du 9 Juin 1965 portant
règlement de discipline des forces armées
19 Art.35 de l'A-R du 4 Févr. 1952 portant
mesures disciplinaires in CLCB, vol I p. 414.
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Notons enfin qu'à l'instar de la privation de grade, la
rétrogradation peut-être prononcée à tous les
niveaux des juridictions de jugement. Car elle n'est point inhérente au
taux de la peine principale comme la dégradation.
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