CHAPITRE II :
LES EVENEMENTS EN LIBYE ET EN SYRIE :
DEUX INSURRECTIONS VALIDEES PAR LE DROIT INTERNATIONAL
Les insurrections validées en droit international
concernent les cas dans lesquels, la société internationale sans
toutefois agréer une insurrection, ne peut néanmoins l'ignorer eu
égard des considérations d'ordre juridique et surtout humanitaire
qu'elle pose. Le droit international ne veut pas les favoriser de peur de
conférer aux insurgés une légitimité. Une telle
démarche mettrait à mal l'existence et l'intégrité
territoriale des Etats. Ces derniers sont les sujets principaux du Droit
international.
Pour comprendre le phénomène des insurrections
validées en droit international, il convient de tabler d'abord sur les
catégories d'insurrections validées en droit international
(Section I), avant de se pencher sur la question de la mise en oeuvre de
l'intervention militaire en Libye et en Syrie (Section II)
SECTION I : LES CATEGORIES D'INSURRECTIONS VALIDEES EN
DROIT INTERNATIONAL
De prime abord, il faut rappeler que le droit international
n'approuve pas de manière explicite ou affichée l'insurrection.
Il n'accorde pas à proprement parler, un regard favorable au
phénomène insurrectionnel dans les Etats. Cette position du droit
international peut se justifier par le fait que les insurgés sont des
troubles fait.
Mais la Charte des Nations unies interpelle vivement les Etats
membres de l'Organisation de s'abstenir « ... dans leurs
relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi
de la force »168(*) . L'on pourrait à la lecture de ce texte
affirmer que l'interdiction de l'usage de la force en droit international ne
concerne que les Etats, et que les groupes armés qui sont des
entités infra étatiques, y sont affranchis. C'est d'ailleurs ce
que relève le Docteur ZAKARIA DABONE que « l'interdiction
de l'usage de la force armée contenue dans le droit international
contemporain ne concerne que les Etats dans leurs rapports
mutuels »169(*). Il renchérit en disant que
cette interdiction « ne vise pas les situations qui naissent à
l'intérieur des frontières des Etats»170(*). Cette idée
suggérant la validation de certaines insurrections est tirée des
considérations factuelles ou empiriques. Au regard des
évènements vécus au quotidien et de la pratique
internationale, l'on peut dire que le droit international sans toutefois
favoriser ou attiser les insurrections, en valide tout de même
quelques-unes lorsque l'intérêt supérieur des peuples ou
singulièrement de l'être humain est mis en cause. Toute chose qui
permet d'établir une catégorisation des insurrections
validées en droit international.
Dès lors, on peut ainsi distinguer les insurrections
remplissant les critères d'un conflit armé non international
comme les évènements de 2011 en Libye et en Syrie (Paragraphe I)
et les insurrections des peuples en quête de souveraineté ou sous
oppression gouvernementale (Paragraphe II)
PARAGRAPHE I : LES
EVENEMENTS EN LIBYE ET EN SYRIE, DEUX INSURRECTIONS REMPLISSANT LES CRITERES
D'UN CONFLIT ARME NON INTERNATIONAL
Un conflit est la poursuite d'objectifs antagonistes et
incompatibles par deux ou plusieurs individus ou groupes. « Un
conflit armé est un processus dynamique de confrontation violente entre
deux ou plusieurs parties antagonistes »171(*). Selon le Droit
international humanitaire, il existe deux types de conflit armé à
savoir : les conflits armés internationaux et les conflits
armés de caractère non international.
On parle de conflit armé international quand
« des désaccords entre deux Etats provoquent
l'intervention des forces armées de l'un contre l'autre, quelle que soit
la gravité des résultats (...) et la
durée »172(*). Mais d'après le Protocole additionnel
II, est de caractère non international, le conflit qui se déroule
sur le territoire d'un Etat « ... entre ses forces armées
et des forces armées dissidentes ou des groupes armés
organisés qui, sous la conduite d'un commandement responsable,
exercent sur une partie de son territoire un
Contrôle tel qu'il leur permette de mener des
opérations militaires continues et concertées et d'appliquer le
présent Protocole.»173(*).
Les évènements de 2011 en Libye et en Syrie
répondent à la description du conflit armé de
caractère non international fait par le Protocole additionnel II. En
effet, la mouvance du vent révolutionnaire qui soufflé sur le
monde arabe, a suscité en Libye une vive opposition armée au
régime de Kadhafi. Les insurgés libyens réunis autour du
CNT créé à Benghazi, contrôlent tout le nord-est de
la Libye, et mènent des opérations militaires coordonnées,
organisées contre le pouvoir de Tripoli. On observe la même
situation en Syrie. Une insurrection éclate et en riposte le
régime de Bachar El-Assad mène une répression très
sévère. Face à la violence qu'ils subissent, les
insurgés créent l'Armée Syrienne Libre et exercent ainsi
leur influence sur une partie considérable du territoire syrien.
L'on peut dès lors retenir à la lumière
des cas libyen et syrien, deux critères qui permettent de
qualifier une insurrection de conflit armé non international, et de
la valider : le contrôle effectif des insurgés sur une partie du
territoire sous un commandement responsable (A) et la capacité pour les
insurgés de conduire des opérations militaires et respecter le
Droit international humanitaire (B)
* 168 Art 2 para 4 de la
Charte des Nations unies, op.cit.
* 169 ZAKARIA (D),
« les groupés dans un système de droit
international centré sur l'Etat », R.I.C.R, vol93, vol93,
no 882 juin 2011, op.cit. p. 89.
* 170 Ibid. p. 89.
* 171 BIT,
prévention et résolution des conflits violents et
armés : manuel de formation à l'usage des organisations
syndicales, 2ème éd, Genève, OIT, 2010, p.
2.
* 172 Ibid. p.2
* 173 Art 1er para
1 Protocole additionnel II aux Conventions de Genève du 12
août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits
armés non internationaux, op.cit.
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