Le régime juridique de l'insurrection : une étude à partir des cas libyen et syrien( Télécharger le fichier original )par Joseph Marcel II MBAHEA Université de Yaoundé II - Master II Droit public international et communautaire 2013 |
B - LE RECOURS A LA FORCE PAR LES PARTENAIRES MULTILATERAUXLes Etats libyens et syriens sont membres de plusieurs organisations internationales avec lesquelles, ils entretiennent des relations de coopération. Ces organisations peuvent dans le cadre d'un partenariat, intervenir militairement en soutien aux forces gouvernementales dans la lutte contre les insurgés. Il peut s'agir selon les cas des organismes sous régionaux (1), et des organismes régionaux (2).
1 - Les organismes sous régionauxLa Libye et la Syrie sont tous deux membres de la Ligue arabe. C'est une organisation internationale regroupant les pays arabes d'Afrique du nord et d'Asie. La Ligue arabe peut intervenir conformément à son Acte constitutif dans tout Etat membre victime d'un conflit armé. Dans le cas libyen, la Ligue arabe n'a pas pris une part active dans la lutte contre les insurgés du CNT. Bien au contraire, elle a appuyé l'OTAN dans son action contre les forces de Kadhafi. En effet, la Ligue arabe a fait partie du « Groupe de contact » sur la Libye mis sur pied en application de la Résolution 1973 (2011) du Conseil de sécurité qui, « prie le Secrétaire Général de créer (...) un groupe de huit experts au maximum »113(*)afin de prêter son concours dans la conduite de l'intervention militaire. Le groupe de contact réunit en son sein les pays de l'Union européenne, de la Ligue arabe, de l'Union africaine, et des pays à titre national en vue d'organiser une coalition internationale. La Ligue arabe n'a pas participé aux hostilités contre les insurgés libyens. Mais en Syrie, bien que l'Acte constitutif interpelle la Ligue arabe à intervenir dans tout Etat membre dans lequel éclaterait un conflit armé, elle ne s'est pas clairement prononcée sur ce cas. L'on déplore même en son sein des dissensions. Le Qatar et l'Arabie saoudite, alliés historiques des Etats unis sont favorables à une intervention militaire en Syrie contrairement au Liban et à l'Iran. La Ligue arabe en tant qu'organe, partenaire multilatéral n'intervient pas militairement en Syrie, et ne l'a pas fait en Libye. Toutefois, quelques-uns des Etats la constituant et pris individuellement se battent soit pour le pouvoir de Damas, soit pour les insurgés. Qu'en est-il des organismes régionaux 2 - Les organismes régionauxLes organismes régionaux sont ici les organisations internationales à compétence continentale, qui peuvent intervenir militairement dans l'un de leurs Etats membres. L'on peut citer l'Union africaine dont la Libye est un Etat membre. C'est une organisation internationale d'intégration qui regroupe cinquante-quatre pays africains. Elle a entre autres objectifs, « défendre la souveraineté, l'intégrité territoriale et l'indépendance de ses Etats membres »114(*). Elle oeuvre également à « promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité sur le continent »115(*). L'Union africaine reconnait le principe de la « non-ingérence d'un Etat membre dans les affaires intérieures d'un autre Etat membre »116(*). Mais devant un conflit armé qui déchire un Etat membre, et qui hypothèque la paix et la sécurité sur le continent, l'Union africaine ne saurait rester indifférente. Elle est traditionnellement attachée à la préservation de la paix et de la stabilité. En effet, un Etat membre comme la Libye qui est victime d'une insurrection, peut solliciter son concours. Il est reconnu le « droit des Etats membres de solliciter l'intervention de l'Union pour restaurer la paix et la sécurité »117(*). L'Union africaine peut légitimement intervenir dans un conflit armé d'origine insurrectionnelle en Afrique fortifiée en cela par une assise juridique. Son Acte constitutif reconnait « Le droit de l'Union d'intervenir dans un Etat membre sur décision de la Conférence, dans certaines circonstances graves, à savoir : les crimes de guerre, le génocide et les crimes contre l'humanité »118(*). Lorsque la décision de recourir à la force est arrêtée devant une insurrection, l'Union africaine actionne le Conseil de Paix et de Sécurité de l'Union africaine. C'est « ... un organe de décision permanent pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits(...) »119(*)en charge de la « sécurité collective et d'alerte rapide, visant à permettre une réaction rapide et efficace aux situations de conflit et de crise en Afrique »120(*). Au milieu de toutes ces alternatives, le Colonel Kadhafi est resté silencieux. Il n'a pas fait appel comme cela lui était loisible, à l'Union africaine dans sa lutte contre les insurgés du CNT. L'Union africaine n'est pas intervenue en Libye en violation de l'article 4(h) de son Acte constitutif. Elle a au contraire porté main forte et participé activement au « Groupe de contact » sur la Libye. La Syrie quant à elle, n'a jusqu'à ce jour reçu sur son sol, aucun organisme régional armé s'interposant dans les hostilités contre les insurgés, ou luttant au côté des forces fidèles au Président Bashar El assad en vue de rétablir la paix. La répression de l'insurrection est le principe en droit interne. Souscrivant à ce postulat, le Colonel Kadhafi de Libye et le Président Bashar El assad de Syrie, ont entrepris de réprimer sévèrement les insurgés en ayant recours à la force. Au-delà du recours à la force, la répression de l'insurrection est aussi juridictionnelle. * 113 CS/RES/1973 (2011) du 17 mars 2011, para.24 op.cit. * 114 Art 3(b), Acte constitutif de l'Union africaine. * 115 Ibid., art 3(f) * 116 Ibid., art 4(g) * 117 Ibid., art 4(j) * 118 Art 4(h), Acte constitutif de l'Union africaine, op.cit. * 119 Art 2 al 1er, Protocole relatif à la création du Conseil de Paix et de Sécurité de l'Union africaine * 120 Ibid. art 2 al 1er |
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