Conclusion
Nous avons voulu dans ce travail étudier les pratiques
d'enseignants de français en Norvège à travers le prisme
des approches plurielles et plurilingues. Nous nous sommes
particulièrement intéressées au phénomène de
décloisonnement des apprentissages, à travers la mise en relation
au sein de la classe des langues
parlées par l'apprenant et notamment de l'anglais.
Nous avons questionné divers aspects du domaine de la
didactique des langues dans ce travail : l'aspect linguistique, avec l'analyse
des similarités existant entre les langues et de l'intérêt
de la mise à profit de ces phénomènes comme
stratégies d'enseignement et d'apprentissage ; l'aspect
sociolinguistique, comme outil d'analyse et d'explication de la
diversité des représentations des enseignants et des choix
didactiques ; et enfin, l'aspect psychopédagogique lors de
l'étude de paroles d'apprenants.
Ce que nous avons été amenées à
comprendre au cours de ce travail, c'est qu'il n'existe pas de consensus dans
les pratiques enseignantes, mais surtout, qu'il n'existe pas de « oui
» ou de « non » brut comme réponse à la question
« utilisez-vous l'anglais en classe de français langue
étrangère ». Malgré leur ancrage dans un contexte
social et culturel similaire, les pratiques sont diverses, ainsi que leurs
possibles justifications. Ainsi, certains enseignants ne veulent pas introduire
la langue anglaise en tant que telle au sein de la classe de français
langue étrangère, mais l'utilisent comme élément
comparatif. D'autres communiquent parfois en anglais, ayant des besoins plus ou
moins spécifiques selon les classes. Certains, enfin, écartent
catégoriquement un tel usage de leurs classes, mais là encore, on
ne peut brosser un portrait générique de ces pratiques.
Cependant, nous avons pu vérifier certaines de nos
hypothèses grâce aux réponses des enseignants. Notre
première hypothèse était que l'on pouvait mettre à
profit les similarités entre l'anglais et le français pour
soutenir certains aspects de l'apprentissage, et notre seconde que les
enseignants de français en Norvège mettaient déjà
de tels stratégies en pratique dans leurs enseignements. Nous avons
confirmé que les élèves eux-mêmes puisent dans leurs
connaissances en anglais (qui est la première langue «
étrangère » apprise à l'école) lors de
l'étude du français, ce qui donne lieu à de nombreuses
interférences. La majorité d'enseignants
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l'a remarqué, et beaucoup ont même
repéré des interférences régulières chez ce
public. Ils se servent donc notamment de la langue anglais pour enseigner des
éléments lexicaux ou grammaticaux, et pour faire des
comparaisons.
Notre troisième hypothèse concernait les
représentations de la langue française chez les apprenants
norvégiens. Nous pensions que le français, dont l'apprentissage
est en déclin en Norvège, souffrait de représentations
plus négatives que l'anglais - notamment à cause de la
difficulté de la langue, et paraissait donc peu attractive. Nous
pensions cependant que créer des liens entre les deux langues, tant au
niveau culturel qu'au niveau linguistique, pouvait permettre aux apprenants
ayant déjà une vision positive de la langue anglaise de voir la
langue française sous un jour plus positif. En effet, il est possible
que le rapprochement des deux langues au sein de la classe ait un effet positif
sur leurs représentations et donc notamment sur la volonté
d'apprentissage. Les dessins d'élèves que nous avons
analysés ont confirmé cette tendance, ce manque d'enthousiasme
à l'égard du français, et au contraire les nombreux
aspects positifs liés à l'anglais.
A l'heure d'achever ce mémoire, il apparait qu'il reste
encore de nombreuses études à mettre en place concernant la mise
en pratique des approches plurielles dans des contextes spécifiques.
Nous avons tenté de représenter une partie des pratiques de tous
les profils d'enseignants de français en Norvège, et de les
expliquer. A la suite de ce travail, nous espérons pouvoir continuer
dans cette voie, par intérêt personnel comme didactique, et
peut-être travailler sur des outils plurilingues spécifiques pour
combler ces écarts entre théories et pratiques.
Camille Bardyn | L'anglais en cours de FLE : Etude de cas du
contexte scolaire norvégien
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