Conclusion partielle :
Ce chapitre avait pour objectif de présenter
brièvement le contexte de l'étude. Après avoir
présenté certaines caractéristiques
générales du pays, nous avons décrit le système
éducatif tchadien et donné la justification de l'étude. La
principale conclusion qu'on peut tirer au terme de ce premier chapitre est que
le Tchad est un pays très pauvre et situé au coeur du continent
africain. Le niveau de développement socio-économique reste
faible et le niveau d'instruction observé dans le pays en est le reflet.
Tout ceci a pour conséquence l'aggravation des problèmes relatifs
à l'éducation des enfants.
CHAPITRE
II
CADRE THÉORIQUE DE
L'ÉTUDE
Dans ce chapitre, nous allons
élaborer le cadre théorique qui va servir de base à notre
étude. Dans un premier temps il s'agira de présenter la revue de
la littérature relative aux disparités régionales et entre
sexes en matière d'éducation. Après cette revue de la
littérature, nous formulerons les hypothèses qui vont sous-tendre
cette étude. Avant de terminer, nous schématiserons les relations
entre les concepts contenus dans ces hypothèses.
1) REVUE DE LA
LITTÉRATURE
Nous nous proposons d'examiner les
différents facteurs liés à la scolarisation des enfants en
général et ceux relatifs aux inégalités en
matière de scolarisation des enfants en Afrique subsaharienne en
particulier.
La problématique de la scolarisation
revêt en général deux aspects : l'offre et la demande
scolaires. L'offre scolaire est le produit des politiques. La demande scolaire
est le produit d'un ensemble de facteurs (scolaires, économiques,
sociaux, démographiques, religieux, culturels), que les individus et les
groupes prennent en compte, directement ou indirectement consciemment ou non,
dans leurs pratiques de scolarisation ; ces facteurs conditionnent ainsi la
mise à l'école, l'itinéraire scolaire et la durée
de la scolarité (Pilon et Yaro, 2001 :8).
Quatre principales approches
permettent d'appréhender les problèmes liés à la
scolarisation dans les pays en voie de développement (l'approche
institutionnelle, l'approche socioculturelle, l'approche
socio-économique et l'approche socio-démographique).
1.1) approche
institutionnelle
Elle repose plus sur l'offre scolaire que sur la
demande d'éducation et intègre des éléments comme
la capacité d'accueil des établissements scolaires, leur nombre,
la quantité et la qualité des enseignants et des enseignements,
etc. C'est par ces différents facteurs que cette approche explique les
écarts observés entre certaines catégories sociales et
régions.
Pour expliquer la
sous-scolarisation dans certaines régions on évoque comme causes
entre autres :
- les contenus des enseignements ;
- les méthodes ;
- les compétences des enseignants
;
- l'éloignement de l'école
;
- le nombre limité
d'établissements scolaires ;
- la qualité médiocre de
l'enseignement et apparemment sans rapport avec la vie réelle ;
- les coûts élevés de
la scolarité ;
- les faibles perspectives d'emploi pour
les diplômés ;
- etc.
Quant à la faible scolarisation des
filles, elle résulterait grandement des curricula (contenus, valeurs,
compétences, organisations et gestion du temps et de l'espace) des
écoles publiques qui ne prendraient pas suffisamment en compte les
attentes des parents.
Pour Djarma et Tolmbaye (1995), la
décision de la fréquentation scolaire des filles émane des
familles. Cette décision est conditionnée au niveau des parents
par :
- le désir et la capacité à
prendre en charge les coûts directs qui sont liés aux frais de
scolarité (écolage, cotisations mensuelles, fournitures
scolaires, participation aux constructions...) ;
- le désir et la capacité à
supporter les coûts indirects appelés coûts
d'opportunités (ou encore manque à gagner) ;
- l'espérance d'un revenu à l'issue de
la scolarisation des filles ;
- leurs appréciations des facteurs internes du
système.
Les écoles sont souvent concentrées dans
les villes et zones où résident les familles riches et cela
empêche ceux qui sont éloignées de ces centres de
fréquenter. En plus de cela l'inadéquation entre les attentes des
parents et le sort réservé aux enfants sortis
diplômés du système constitue une source de
découragement, de perte de confiance des parents vis-à-vis de
l'école, ce qui freine leur élan à en scolariser d'autres.
L'école facteur de mobilité sociale mais aussi de reproduction
des classes sociales apparaît aux yeux des parents comme un moyen
d'accès aux statuts sociaux supérieurs. Mais dès qu'elle
cesse de jouer ce rôle, elle ne fait plus partie des priorités des
parents.
Au Tchad, l'arrêt par le gouvernement des
recrutements systématiques des diplômés dans la fonction
publique dans les années 1990 a amené certains chefs de
ménages à cesser de scolariser les filles et certains
élèves à abandonner l'école pour se lancer dans la
vie active. Car pour ces derniers, il est difficile de rattraper les autres
-qui exercent déjà dans le secteur informel ou dans
l'agriculture- après avoir passé tout son temps à
étudier pour ne rien gagner en fin de compte.
En Amérique latine, les
inégalités du niveau d'études sont attribuées
à l'inefficacité de l'école publique, dont les pauvres
sont tributaires, et à la part relativement faible du budget
consacré à l'enseignement primaire et secondaire, dont les
pauvres tirent généralement le plus de profit. Même quand
l'Etat consacre suffisamment de ressources pour améliorer l'accès
des pauvres à l'éducation, il arrive que les services fassent
défaut (Bilo'o, 2004 :26).
La littérature
révèle également que, même lorsque
l'éducation a fait l'objet d'une réforme, la formation des
enseignants a souvent été négligée et seul un
faible pourcentage de l'appui financier a été affecté
à la formation avant l'entrée en service ou en cours d'emploi. Le
manque de personnel enseignant au Tchad était si considérable en
2000 à tel point que les solutions de rechange telles que la
multiplication des classes multigrades étaient devenues un
impératif pour l'amélioration de l'offre scolaire en milieu
rural. Durant l'année scolaire 2000/2001, les classes multigrades
à deux niveaux représentaient 34% des classes dans le secteur
public, 10,7% dans le secteur privé et 55,68% dans le secteur
communautaire (MEN, 2003 : 33).
1.2) approche socioculturelle
Elle est basée sur la perception et la
valeur que les parents ont non seulement de l'éducation des enfants mais
aussi du rôle de ceux-ci. La littérature sur la demande
d'éducation fait souvent référence à des facteurs
socioculturels, en particulier la religion et l'ethnie pour expliquer les
réticences observées en matière de scolarisation des
enfants.
La prééminence de certaines
données sociales, comme les différences de statut et de
rôle selon les sexes, entre notamment dans l'explication de la
sous-scolarisation des filles. Si la sélection des enfants à
scolariser est dictée par des considérations économiques,
le fait qu'il se fasse au détriment des filles relève davantage
de considérations socioculturelles. Les traditions africaines relatives
au mariage et à la fécondité jouent fortement en faveur de
la non-scolarisation des filles.
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