PARAGRAPHE II : HARMONISATION FISCALE VERSUS CONCURRENCE
FISCALE
A- L'harmonisation fiscale
L'harmonisation fiscale consiste à coordonner les
politiques fiscales de manière à éviter des
réductions non concertées et concurrentielles de taux et
d'assiette. En rappel, la politique fiscale participe à la politique
économique de l'Union, en contribuant au financement des dépenses
publiques et à la redistribution des revenus.
Pour les défenseurs de l'harmonisation fiscale,
notamment Guichard et Lefebvre9, cette dernière trouve son
fondement dans la lutte contre la délocalisation des entreprises
dû au fait que certains Etats membres de l'Union appliquent des taux
d'imposition plus bas ou d'autres méthodes de gestion fiscale plus
favorables par rapport aux autres Etats.
Cependant, en l'absence d'une harmonisation fiscale, la
coordination fiscale paraît nécessaire. La coordination fiscale
consiste pour les Etats à coordonner leur politique fiscale respective,
aussi bien pour les textes adoptés que les échanges
d'information, de sorte que les décisions d'un Etat n'impactent pas sur
l'économie d'un autre. Elle permet en outre de contrôler les
effets indirects de la fiscalité sur l'intégration lorsque les
dispositions adoptées par les Etats intégrés vont à
l'encontre des principes de base du marché unique. Dès lors, la
coordination apparaît comme un moyen de se garantir contre la concurrence
fiscale.
9Guichard et Lefebvre, Pour ou contre le
système commun de TVA ?, CEPI,1997
9
En somme, on peut dire que l'harmonisation fiscale est un
moyen de réaliser pleinement l'intégration économique.
B- La concurrence fiscale
Dans le marché unique, l'interdépendance fiscale
entre les différents Etats membres est la règle. Si un pays
décide unilatéralement de baisser, par exemple, sa
fiscalité sur les entreprises, le principe de libre circulation va
favoriser la délocalisation de facteurs de production aux dépens
des autres Etats membres. C'est là qu'apparaît la concurrence
fiscale.
La concurrence entre les systèmes fiscaux des
différents pays peut être saine, quand elle aboutit par exemple
à la réduction des dépenses publiques excessives ou
à l'allégement de la pression fiscale. Chaque pays évalue
en permanence ses régimes fiscaux et ses dépenses publiques en
vue de procéder, si nécessaire, à des ajustements pour
améliorer l'investissement.
Mais elle est déloyale quand elle incite par exemple
l'épargne à se localiser, non en fonction des besoins
économiques locaux, mais de la fiscalité des Etats. Il s'agit de
détourner l'épargne des autres pays et diminuer ainsi leurs
recettes fiscales. Certains pays vont modifier leur système fiscal afin
d'attirer l'épargne venue d'ailleurs pour élargir leur part de
base imposable mondiale et exporter ainsi leur fardeau fiscal vers les autres
pays.
Cette tendance est observée en particulier pour les
bases d'imposition mobiles (bases d'imposition qui peuvent se déplacer
à tout moment vers le pays offrant un système fiscal favorable)
qui sont susceptibles de faire l'objet d'un arbitrage entre les
différents systèmes d'imposition au sein de l'Union. C'est donc
dans les domaines tels que celui de la fiscalité des entreprises et des
épargnes que la baisse est plus visible.
En somme, le choix entre l'harmonisation fiscale ou la
concurrence fiscale dépend de l'usage que les Etats
intégrés font des recettes publiques, de la nature et de la
destination des biens et services publics fournis, finalement du rôle
même des Etats dans la consolidation de l'intégration
économique.
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