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L'Islam et les fondements du pouvoir dans l'Egypte des années 1920

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par Sophia El Horri
Ecole normale supérieure de Lyon - Master 1 d'histoire des idées 2011
  

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IV. Califat et gouvernement à travers l'histoire

1. Les Arabes et l'unité religieuse

L'islam étant un appel ayant une dimension cosmique, dépassant le strict cadre arabe, il n'a jamais été « un appel pour la cause des arabes ; il n'a jamais été une entité arabe ni une religion arabe », bien que le Coran soit un modèle en arabe, et que son prophète soit arabe. Cela a bien évidemment conduit la révélation à se transmettre dans un premier temps chez les Arabes. Mais l'auteur montre que quand bien même Mohammad a transmis le message divin aux Arabes, rien ne permet de dire que l'unité qu'il existait dès lors était d'ordre temporel, car n'étant pas intervenu dans les affaires sociales et économiques qui préexistaient à la Révélation, les Arabes ne formaient pas un Etat uni. « Tel était l'état des Arabes à ma mort du prophète. Une unité religieuse avec, au dessus, une multitude d' « Etats ».

Mais aussitôt le prophète disparu, cette quasi-unité religieuse s'est peu à peu ténue. Son devoir était de livrer son message en intégralité : comment, dès lors, si la constitution d'un Etat faisait partie de sa mission, aurait-il pu laisser une telle question dans pareille confusion, au point que les musulmans en vinssent rapidement à `s'entretuer ? En outre, le terme de calife ne renferme pas d'un point de vue linguistique l'idée que le successeur du prophète serait nommé par le prophète lui-même ce qui explique les désaccords à la mort de celui-ci au moment d'en désigner un. Le prophète n'a donc en rien organisé la suite, car le Livre sacré constituait une succession pour vivre dans la vertu et les principes religieux. Sa mission s'achevait au moment de sa mort, et il n'aurait jamais évoqué la forme de gouvernement à entreprendre après sa mort. Le califat est, une fois de plus et ce de manière implicite cette fois, discrédité et présenté comme une supercherie, ne découlant ni des textes, ni même du Prophète mais d'un accord unanime, qui n'est pas aussi consensuel qu'il laisserait croire.

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2. L'Etat Arabe

Dans ce chapitre, l'auteur inaugure une étape nouvelle : celle de dire qu'il n'y avait qu'un seul système politique possible après la mort du prophète : un système politique laïque.

Il est surprenant que l'auteur utilise ce terme sans même en proposer une définition substantielle : parle-t-il de sécularisation ou de laïcisation ? Il semble également étrange que l'essayiste utilise ce concept, éminemment moderne. Par laïque, nous supposons que l'auteur fasse référence à un pouvoir politique purement détaché du fondement religieux pourtant unificateur, une autorité purement politique : « Qu'il n'y ait plus de direction religieuse après le Prophète est chose normale et raisonnable à l'évidence. En fait, c'est bien ce qui se produisit à l'époque. »19. Selon Abderraziq, dans une argumentation quelque peu douteuse, les peuplades arabes s'étaient constituées en Etat après l'envoi de « l'Apôtre de Dieu », ne pouvant revenir à cet état de nature anarchique qui serait prétendument la barbarie de la Jahiliya. Abderraziq dresse comme argument d'autorité la volonté de Dieu de réunir toutes les conditions nécessaires pour que les Arabes se fédèrent pour prouver l'existence d'un Etat arabe après la Révélation : « Quand Dieu réunit les conditions nécessaires pour qu'un peuple devienne fort et dominateur, ce peuple ne peut que se renforcer et dominer20 ».

Malgré l'unité religieuse, l'objet des réflexions portait sur « l'édification d'un Etat, la création d'un Etat ex nihilo ». Pour étayer cette idée, l'auteur avance l'argument de la terminologie adoptée par les Arabes : ministres, principautés ; ce qui dénoterait d'une certaine avancée en terme de gouvernement. C'est ainsi que la guerre civile, connue dans l'histoire sous le nom de hurûb ar-ridda, se révèle être une pure lutte politique entre les compagnons du prophète et les tribus refusant de faire allégeance à Abu Bakr, sans pour autant renier l'unité religieuse des Arabes. Cette allégeance n'a été arrachée que par la contrainte et la force aux dits apostats et ce faisant, elle est caractéristique de la fondation d'un Etat d'ordre temporel, un gouvernement arabe, beaucoup plus restreint que le culte musulman qui, lui, a une vocation plus universelle. Pour soutenir cet épisode capital de la fondation de cet Etat arabe qui défendait l'appel à l'Islam, l'auteur décrit la tenue des négociations entre `ansar et

19 Ali Abderraziq, L'Islam et les fondements du Pouvoir, op. cit. p 143

20 Idem p144

muhajirûn , selon Tabarî dans son Histoire des Califes : Les `Ansar proposèrent aux muhajirun une forme d'alternance au pouvoir : choisissons un prince parmi vous, puis un autre parmi nous.-Les princes doivent être nommés parmi nous, leur répondit Abou Bakr. Votre groupe fournira les ministres. » Tandis qu'Abu Sufyan s'écriait : « Par Dieu je vois s'élever une tourmente qui ne se règlera que par le sang. Ô clan de `Abd Manaf, en quoi Abou Bakr est-il impliqué dans les affaires qui vous reviennent ? Où sont les deux incapables, les deux méprisables `Ali et al-`Abbas ? ».

Ces entretiens montrent que les discussions n'étaient pas d'ordre religieux mais bien une lutte de pouvoir entre clans refusant de se voir gouverner par les chefs d'autres clans. L'enjeu n'est pas tant de choisir la personne la plus apte à transmettre et consolider la révélation dans la umma mais plutôt de choisir les personnes les mieux à mêmes de défendre les intérêts de chaque clan. Leurs divergences portaient sur des questions temporelles et stratégiques. Aux dires d'Abderraziq, personne parmi l'élite arabe, pas même Abou Bakr, n'aurait confondu sa fonction de chef politique avec une dignité religieuse. Dès lors, l'origine de la fonction politico-religieuse de calife serait née d'affabulations qui auraient hissé la fonction politique au rang de fonction céleste, transformant la désobéissance politique en péché, et la doublant d'une dimension spirituelle et morale.

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