3. L'islam est un message de Dieu et non un
système de gouvernement, une religion et non un Etat
Constatant que des obstacles se dressent contre sa recherche
historique, l'auteur postule que le prophète n'était pas un roi,
mais uniquement le messager de Dieu, chargé de transmettre un appel
purement religieux : il ne fut ni roi, ni fondateur d'empire, ni encore
prédicateur attelé à l'édification d'un royaume.
Tout d'abord, l'autorité que s'est acquise Muhammad
n'est pas due à son pouvoir temporel mais bien à la position que
lui a octroyée la mission prophétique. En effet, le messager est
élu, il n'a aucune tare et jouit d'un certain charisme, rien en lui
n'est sensé repousser les siens. Outre cela, il appartient au peuple
auquel il délivre le message, et possède des qualités pour
délivrer de matière optimale le message. De par ce charisme
imposant, le rang d'envoyé de Dieu est encore plus puissant que celui de
roi, car sa fonction implique qu'il puisse pénétrer l'âme
et à l'intimité des coeurs.
Usant de versets coraniques18, Abderraziq montre
que l'oeuvre spirituelle du messager ne dépassait pas les limites d'une
prédication dénuée de pouvoir temporel. De plus, le
prophète n'est pas habilité à tyranniser les hommes, il
exclue de la même manière qu'il puisse user de contrainte pour lui
inculquer la foi. Il ne peut être un chef, au sens temporel du terme, car
la contrainte et la domination seraient le propre du gouvernement temporel.
Dans la Sîra Nabawiya, il en est de même ; le prophète dit,
alors qu'un homme venu lui présenter une affaire tremble de frayeur
à sa vue : « Calme toi, je ne suis ni un roi ni un tyran. Je ne
suis en fait que le fils d'une femme de Qoreich qui mangeait de la viande
salée... ». Par ailleurs, le message divin s'adressant à
l'humanité entière, on ne peut imaginer l'humanité
entière régie
18 Coran VI, 106-107, X, 99-100
23
par un seul gouvernement, il s'agirait là selon Abderraziq
du propre des hommes.
Abderraziq conclue ce chapitre en déclarant le message
prophétique ne comportait en rien le dessein d'un projet politique
temporel, et l'autorité qu'avait le prophète sur les croyants
émanait de son charisme et de son rang de messager divin : il n'y a ni
gouvernement ni Etat, ni visées de rois ou de princes.
|