III. Islam et gouvernement
Dans cette deuxième section de L'Islam et les
Fondements du pouvoir, l'auteur se concentre sur le fonctionnement des
différentes institutions qu'implique le gouvernement et l'Etat, comme la
justice, pendant une période peu étudiée qui est celle du
gouvernement du prophète. Comment rendait-il justice ? Comment
gouvernait-il ? Peut-on affirmer que la gouvernance du prophète
n'était qu'une période extraordinaire ?
1. Le système du pouvoir au temps du
prophète
Ce premier chapitre traite, ainsi que nous l'avons dit,
s'intéresse au fonctionnement de la judicature au temps du
Prophète. Spécialiste et chercheur dans le domaine de l'arbitrage
et du règlement des contentieux, il n'est pas étonnant que
l'auteur cherche à retrouver les fondements du droit islamique en
plongeant dans ses débuts et ses origines. Le droit naît avec la
société et la communauté, car il est le principal
régulateur social. Or, la société musulmane n'est pas
née ex nihilo, elle était préexistante à
l'avènement de l'Islam, et possédait déjà certaines
coutumes et certaines normes. Il n'est donc pas étonnant de retrouver
pendant la Jahiliya et le début de l'Islam les mêmes formes de
judicature. Il a été demandé au Prophète d'examiner
des affaires et d'en rendre les jugements ; à défaut de pouvoir
avoir une idée claire de la manière dont s'organisait certaines
affaires judiciaires par le prophète ou ses envoyés, l'auteur
conclut que les envois de délégations de juges n'était ni
continu ni étendu dans ses pouvoirs. Ainsi, ce qui est rapporté
sur ce sujet permet simplement de conclure que le prophète donnait de
temps en temps, à certaines personnes, des délégations
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limitées, telles que le commandement des troupes, la
gestion des biens, la direction de la prière, l'enseignement de la
prière, l'enseignement du Coran ou la prédication religieuse.
Mais les témoignages n'évoquent pas les autres fonctions
constitutives d'un Etat, comme le maintien de l'ordre. Nous ne pouvons pas
dès lors conclure l'existence d'un gouvernement du Prophète
à cette période. De même, alors que les chroniqueurs
dressent la liste des collaborateurs, des juges, des généraux,
des gouverneurs des différents califes, leurs propos et
précisions sur le gouvernement du prophète deviennent ambigus et
obscurs.
Si la finalité de son argumentation n'est pas encore
très claire, Abderraziq la dévoile en déclarant que son
but, à travers ces recherches-là, est de s'interroger sur la
nature du rôle du prophète, en plus d'être le messager de
Dieu. Etait-il un chef de gouvernement au sens politique qu'on lui accorde ?
Etait-il roi ?
D'autre part, c'est à la fin de ce chapitre que l'autre
formule ses inquiétudes quant à la levée des boucliers des
conservateurs qui seraient contre ce genre de recherches présupposant
que ce qui découle de la religion est un donné immuable et
figé. Aussi exprime-t-il sa volonté, légitime de par sa
profession, de sonder l'histoire jusqu'à ses débuts afin de
montrer si le gouvernement du calife est légal, de par la loi islamique.
Si le calife est le représentant du prophète dans toutes ses
fonctions, il faudrait d'abord savoir si le prophète exerçait un
rôle éminemment politique pour se prononcer sur la
légitimité du calife au sommet de l'Etat.
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